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Full text of "Procès de J.-Bte. Beauregard convaincu du meurtre d'Anselme Charron [microforme] : cour du banc de la reine, terme criminel : présidence de S. H.M. Le Juge Aylwin"

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Wëfc»TGR,N.Y.  14580 

(716)  •^72-4503 


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Microfiche 

Collection  de 

Séries. 

microfiches. 

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Canadian  Instituts  for  Historical  Microreproductions  /  institut  canadien  de  microreproductions  historiques 


Technical  and  Bibliographie  Notes/Notes  techniques  et  bibliographiques 


The 
tott 


The  Institute  has  attempted  to  obtain  the  best 
original  copy  available  for  filming.  Features  of  this 
copy  which  may  be  bibliographically  unique, 
which  may  alter  any  of  the  images  in  the 
reproduction,  or  which  may  significantly  change 
the  usual  method  of  filming,  are  checked  below. 


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Coloured  covers/ 
Couverture  de  couleur 


□    Covers  damaged/ 
Couverture  endommagée 

□    Covers  restored  and/or  laminated/ 
Couverture  restaurée  et/ou  pelliculée 


L'Institut  a  microfilmé  le  meilleur  exemplaire 
qu'il  lui  a  été  possible  de  se  procurer.  Les  détails 
de  cet  exemplaire  qui  sont  peut-être  uniques  du 
point  de  vue  bibliographique,  qui  peuvent  modifier 
une  image  reproduite,  ou  qui  peuvent  exiger  une 
modification  dans  la  méthode  normrle  de  filmage 
sont  indiqués  ci-dessous. 

□    Coloured  pages/ 
Pages  de  couleur 

□    Pages  damaged/ 
Pages  endommagées 

□    Pages  restored  and/or  laminated/ 
Pages  restaurées  et/ou  pelliculées 


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Cover  title  missing/ 

Le  titre  de  couverture  manque 


□    Coloured  maps/ 
Cartes  géographiques  en  couleur 

□    Coloured  ink  (i.e.  other  than  blue  or  black)/ 
Encre  de  couleur  (i.e.  autre  que  bleue  ou  noire) 


Coloured  plates  and/or  illustrations/ 
Planches  et/ou  illustrations  en  couleur 

Bound  with  other  matériel/ 
Relié  avec  d'autres  documents 

Tight  binding  may  cause  shadows  or  distortion 
along  interior  margin/ 

La  re  liure  serrée  peut  causer  de  l'ombre  ou  ^'3  la 
distortion  le  long  de  la  marge  intérieure 

Blank  leaves  added  during  restoration  may 
appear  within  the  text.  Whenever  possible,  thèse 
hâve  been  omitted  from  filming/ 
Il  se  peut  que  certaines  pages  blanches  ajoutées 
lors  d'une  restauration  apparaissent  dans  le  texte, 
mais,  lorsque  cela  était  possible,  ces  pages  n'ont 
pas  été  filmées. 


Additional  comments:/ 
Commentaires  supplémentaires: 


Various  paging. 


v/ 


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Pages  discoloured,  stained  or  foxed/ 
Pages  décolorées,  tachetées  ou  piquées 


□    Pages  detached/ 
Pages  détachées 

0Showthrough/ 
Transparence 

□    Quality  of  print  varies/ 
Qualité  inégale  de  l'impression 

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Comprend  du  matériel  supplémentaire 

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Seule  édition  disponible 


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Pages  wholly  or  partially  obscured  by  errata 
slips,  tissues,  etc.,  hâve  been  refilmed  to 
ensure  the  best  possible  image/ 
Les  pages  totalement  ou  partiellement 
obscurcies  par  un  feuillet  d'errata,  une  pelure, 
etc.,  ont  été  filmées  à  nouveau  de  façon  à 
obtenir  la  meilleure  image  possible. 


This  item  is  filmed  at  tho  réduction  ratio  checked  below/ 

Ce  document  est  filmé  au  taux  de  réduction  indiqué  ci-dessous 

10X                            14X                            18X                            22X 

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30X 

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12X 

16X 

20X 

24X 

28X 

32X 

Th«  copy  filmad  her«  has  bean  raproducad  thanks 
to  tha  ganaroaity  of  : 

University  of  British  Columbia  Library 


L'axamplaira  filmé  fut  raproduit  grflca  à  la 
générosité  da: 

University  of  British  Columbia  Library 


Tha  Imagas  appaaring  hara  ara  tha  bast  quailty 
possibla  considaring  tha  condition  and  laglbllity 
of  tha  original  copy  and  In  Icaaping  with  tha 
filming  contract  spacif icatlons. 


Las  imagas  suivantas  ont  été  raprodultes  avac  le 
plus  grand  soin,  compta  tanu  da  la  condition  at 
da  la  nattaté  da  l'axamplaira  filmé,  at  en 
conformité  avec  les  conditions  du  contrat  de 
fllmaga. 


Original  copias  In  printad  papar  covers  ara  filmad 
beginning  with  the  front  cover  and  ending  on 
the  last  page  with  a  printad  or  illustratad  impres- 
sion, or  the  bacit  cover  when  appropriate.  AH 
other  original  copias  ara  filmad  baginnirg  on  the 
first  page  with  a  prinvad  or  illustratad  impres- 
sion, and  ending  on  '.he  last  page  with  a  printad 
or  illustratad  imprersion. 


Les  exemplaires  originaux  dont  la  couverture  en 
papier  est  imprimée  sont  filmés  en  commençant 
par  le  premier  plat  et  en  terminant  soit  par  la 
dernière  page  qui  comporte  une  empreinte 
d'impression  ou  d'illustration,  soit  par  le  second 
plat,  selon  le  cas.  Tous  las  autres  exemplaires 
originaux  sont  filmés  en  commençant  par  la 
première  page  qui  comporte  une  empreinte 
d'impression  ou  d'illustration  et  en  terminant  par 
la  dernière  page  qui  comporte  une  telle 
empreinte. 


The  last  racorded  frama  on  each  microfiche 
shall  contain  the  symbol  — ^>  (meaning  "CON- 
TINUED"),  or  the  symbol  y  (meaning  "END"), 
whichever  applies. 


Un  des  symboles  suivants  apparaîtra  sur  la 
dernière  image  de  chaque  microfiche,  selon  le 
cas:  le  symbole  — ►  signifie  "A  SUIVRE ',  le 
symbole  y  signifie  "FIN". 


Maps,  plates,  charte,  etc.,  may  be  filmed  at 
différent  réduction  ratios.  Those  too  large  to  be 
entirely  included  in  one  exposure  ara  filmed 
beginning  in  the  upper  left  hand  corner,  left  to 
right  and  top  to  bottom,  as  many  framas  as 
raquired.  The  followlng  diagrams  iiiustrate  the 
method: 


Les  cartes,  planches,  tableaux,  etc.,  peuvent  être 
filmés  i  des  taux  de  réduction  différents. 
Lorsque  le  document  est  trop  grand  pour  être 
reproduit  en  un  seul  cliché,  il  est  filmé  à  partir 
de  l'angle  supérieur  gauche,  de  gauche  à  droite, 
et  de  haut  en  bas,  an  prenant  le  nombre 
d'imrges  nécessaire.  Les  diagrammes  suivants 
illustrent  la  méthode. 


1 

2 

3 

32X 


1 

2 

3 

4 

5 

6 

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AVANT  PROPOS. 


Le  deuxième  jour  d*avril  dernier^  entre  8  e^  9  heures  du  maiitty 
Anselme  Charron,  cultivateur  et  commerçant  de  la  paroisse  de  St. 
Charles,  'partit  pour  se  rendre  à  St.  Hyacinthe  Oii  Vappelaient  queU 
ques  affaires.  Il  devait  revenir  chez  lui  le  même  jour.  Au  bout 
dhme  semaine,  cependant,  non  seulement  il  n'était  pas  de  retour ^ 
mais  on  ignorait  complètement  ce  qu'il  était  devenu.  Vital  Charron^ 
frère  d'Anselme,  inquiet  sur  le  sort  de  ce  dernier  et  ne  pouvant  s'eX' 
pliquer  une  aussi  longue  absence,  partit,  le  8  avril,  pour  aller  à  sa 
recherche.  Arrivé  à  St.  Hyacinthe,  on,  P  informa  que  son  frère  rHa- 
vûit  pas  été  vu  dans  cette  ville,  depuis  la  soirée  du  2  avril  qu'il  avait 
passée  en  compagnie  d'un  nommé  Jean-Baptiste  Beauregard. 

Avec  l'aide  d  quelques  amis,  il  prit  de  nouvelles  informa' ions 
qui  eurent  pour  effet  défaire  naître  de  graves  soupçons  sur  Jean- 
Baptiste  Beauregard,  individu  jouissant  déjà  cPune  mauvaise  répu- 
tation. Le  même  jour,  8  avril,  le  chapeau  d'Anselme  Charron  fut 
trouvé  sur  la  grève  de  la  rivière  Yamaska,  à  St.  Barnabe,  c  est-à- 
dire,  à  deux  lieues  et  demie  de  St.  Hyacinthe.  Naturellement,  cette  dé- 
couverte fit  croire  que  Charron  s'était  noyé,  ou  que,  .s*îZ  avait  été  tué, 
son  corps  avait  été  jeté  à  Peau.  On  commença  des  recherches  dans 
la  rivière,  mais  elles  furent  longtemps  sans  résultats. 

Ce  n'est  que  le  5  mai  dernier,  plus  d'un  mois  après  la  disparition 
de  Charron,  que  son  cadavre  fut  repêché  près  du  collège  de  St.  Hya- 
cinthe, à  environ  dix-huit  arpents  du  pont  Birau.  Des  médecins 
constatèrent  dans  une  enquête  faite  sur  le  cadavre,  que  le  défunt  ne 
s'était  pa8  noyé  ou  n'avait  pas  été  noyé  ;  qu'il  ne  s'était  pas  tué 
non  plus  en  tombant  dans  Peau,  qu'il  avait  succombé  par  une 
mort  très  prompte  causée  par  une  commotion  du  cerveau  produi- 
te par  des  coups.  Ces  faits  ajoutés  à  une  foule  de  circonstances 
augmentèrent  encore  les  forts  soupçons  qui  pesaient  déjà  sur  Beau- 
regard,  ïlfut  écroué  dans  la  prison  de  Montréal  pour  y  attendre  son 
procès  qui  eut  lieu  à  la  dernière  session  de  la  Cour  du  Banc  de  la 
Reine,  et  se  termina,  comme  on  le  sait,  par  la  condamnation  à  mort 
du  prisonnier. 

Jamais,  à  la  connaissance  de  Thonoràhle  Juge  qui  présidait, 
procès  criminel  n'occupa  aussi  longtemps  une  Cour  de  Justice. 
Les  débats  durèrent  huit  jours  consécutifs,  à  partir  du  vendredi 
matin,  7  octobre,  jusqu'au  samedi  soir,  Ifidu  mMme  mois.  Pendant 


AVANT  PROPOS. 


tout  ce  temps,  V attention  publique  fut  vivement  excitée  et  la  srlle 
d'audience  fut  continuellement  remplie  par  une  foule  de  spectateurs 
avides  de  voir  et  d'entendre.  Tous  suivaient  avec  une  anxiété  pro- 
fonde  le  développement  et  les  péripéties  de  ce  drame  dont  ils  auraient 
voulu  hâter  le  dénouement 

Si  nous  publions  aujourdhui  ce  pamphlet^  ce  n'est  certainement 
pas  dans  V intention  de  satisfaire  une  vaine  curiosité^  en  mettant 
sous  les  yeux  du  public  les  détails  du  crime  commis  par  le  malheu- 
reux condamné.  Nous  avons  cru  faire  une  œuvre  utile.  Uhabileté 
extraordinaire  déployée  dans  ce  procès,  tant  par  V avocat  de  la  cou- 
ronne  que  par  les  avocats  de  la  défense,  P admirable  enchaîneTnent 
de  la  preuve  faite  contre  le  prisonnier,  enfin  la  charge  si  savante  et 
si  bien  raisonnée  de  son  Honneur  h  Juge  Aylwin,  en  font,  sans 
contredit,  une  des  causes  les  plus  célèbres  qui  aient  été  plaidées  en 
Canada  jusqu'à  ce  jour. 

En  donnant  un  rapport  de  ce  procès,  nous  fournissons  donc  un 
document  précieux  à  tous  ceux  qui  se  livrent  à  l'étude  du  droit. 
Nous  pouvons  ajouter  de  plus  que  le  public  en  général  retirera  des 
avantages  de  la  lecture  de  ce  rappm't,  car  il  y  trouvera  d'excellents 
enseignements  et  un  terrible  exemple  des  suites  funestes  de  Vintempé- 
rance.  En  effet,  si  Charron,  aulieu  de  s'amuser  à  boire,  s'était  te- 
nu sobre  psiulant  toute  la  journée  du  2  Avril,  sa  famille  n'aurait 
pas  aujourd'hui  à  pleurer  sa  mort,  et  la  justice  ne  serait  pas  dans  la 
triste  nécessité  de  punir  un  grand  coupable  par  le  dernier  des  châ- 
timents.— A  la  suite  de  ces  quelques  explications  que  naus  avons 
cru  nécessaire,  nous  pensons  qu'on  ne  lira  pas  sans  intérêt,  le  petit 
portrait  suivant  de  Beauregard,  que  nous  extrayons  d'un  journal 
français  de  cette  ville  : 

"  C'est  un  homme  brun,  à  la  stature  puissante,  à  la  tête  large- 
*^  ment  développée.  Chacun  de  ses  traits  est  fortement  accentué. 
"  Ses  yeux,  très  vifs,  sont  surmontés  d'épais  sourcils,  dont  les  mou- 
"  vements  donnent  à  son  regard  une  expression  farouche.  Une  é- 
"  paisse  barbe  noire  lui  forme  un  collier  qui  s'étend  d'une  oreille  à 
"  Vautre  en  cachant  complètement  le  menton.  Le  reste  de  la  figure 
"  a  été  soigneusement  rasé.  Il  a  plus  d'embonpoint  que  la  généra- 
"  lité  de  hommes. 


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PROCES 


DE 


I-  BTE.  BEAMCÂIUI 

CONVAINCU  DU  MEURTRE 

FANSELME  CHARRON.' 


COUR  DU  Mm  DE  LA  REINEf 

^.TERME   CRIMINEL. 
PRESIDENCE  DE  S.  H.  M.  IiE  JUGE  ÂTLWOT. 

Vendredi,  7  Octobre,  1859. 

Jean-Baptiste  Beauregard,  incarcéré  sous  prévention  de 
meurtre^  est  appelé  à  la  Barre, 

M.  JOHNSON  agit  comme  Avocat  de  -a  Couronne  et  MM. 
DRUMMOND,  CARTER  et  CHURCH,  sont  chargés  de  la 
défense. 

Les  Jurés  suivants  sont  assermentés  : — Julien  Miron^  Lambert 
DesnoyerSi  Pierre  Grenier^  William  Andrews,  Alexis  Jouherty 
Jean  Été.  Dubonville,  Edouard  Lefelvre,  Vital  Demers,  Nico- 
las   Claude,  Barthélémy  Groulx,  Patrick  Bower,  Jos.  Dépatis, 

Cinquante  quatre  témoins  sont  appelés  de  la  part  de  la  couronne  ; 
il  leur  est  défendu  par  la  Cour  d'entrer  dans  la  chambre  d'audien- 
ce durant  le  procès.  La  même  injonction  est  faite  aux  témoins  de 
la  défense,  qui  sont  au  nombre  de  dix. 

L"^  avocat  delà  couronne  s'' adressant  aux  jurés,  donne  un  court 
aperçu  de  la  cause  et  le  premier   témoin  est  appelé. 

PRUDENT  PALARDY.— Je  demeure  à  la  Présentation. 
Je  connaissais  bien  le  défunt  Anselme  Charron,  depuis  trente 
deux  ans.  J'ai  vu  son  cadavre  en  mai  dernier,  dans  la  rivière 
Yamaska,  et  j'étais  présent  à  l'enquête  tenue  à  St.  H  yacinthe. 
Le  défunt  était  un  cultivateur  à  son  aise  ;  il  possédait    un  mou 


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Hn,  et  était  &gé  do  quarante  et  quelques  rnmées.  Le  deux  avrî. 
dernier,  j'ai  vu  Charron  sur  le  marché  de  St.  Hyacinthe,  mais  je 
ne  lui  ai  pas  parlé.  Le  cadavre  du  défunt  a  été  trouvé  dans  la 
rivière,  en  ma  présence,  près  du  rivage,  le  5  Mai  dernier. — Je  jure 
que  ce  corps  trouvé,  et  sur  lequel  une  enquête  a  eu  lieu,  était 
celui  d'Anselme  Charron.  J'ai  remarqué  qu'il  avait  une  bles- 
sure au  menton  et  une  autre,  entre  les  deux  yeux. 

Interrogé  par  M.  Carter  : — Lorsque  le  cadavre  a  été  trouvé,  il 
avait  la  fi<?ure  en  bas  ;  il  ne  flottait  pas  ;  celui  qui  l'a  trouvé  l'a- 
vait accroché  par  le  bras.  J'ai  reconnu  le  défunt  de  suite 
enl  loi'  v<l^aikJt^è  derrière  ^  de  la  tête,  et  je  n'ai  plûB  en  de  do^te 
■ur  Son  lifcntité,  après  lui  avoir  examiné  la  fi|fure.  rJ'cst  vers  une 
làeureetidènaie  où  âtax  heures  de  Taprès-midi,  le  2  afvril  dernier, 
qire  j'ai  vu  Charfon  sur  le  marché  de  St.  Hyacinthe.  <*** 

PIERRE  CADORET,— âgé  de  78  ans,  cultivateur  de  St.- 
Hyacinthe. — C'est  moi  qui  ai  trouvé  le  défunt  dans  la  rivière 
Yamaska.  J'étais  occupé  à  faire  de  la  clôture,  lorsque  j'ai  aperçu 
quelque  chose  dans  un  remoux  ;  j'ai  vu  que  c'était  un  corps,  et  je 
l'ai  amené  au  rivage  ;  j'ai  jeté  quelque  chose  dessus,  puis  je  suis 
allé  chercher  la  police.     Je  n'ai  pas  reconnu  le  cadavre. 

Par  M.  Carter. — J'ai  trouvé  le  corps  du  défunt,  près  du  Col- 
lège de  St.  Hyacinthe,  à  dix-huit  arpents  du  Pont  Biron  et  à  60 
pieds  du  rivage  ;  il  était  courbé  et  avait  la  figure  en  bas.  Ce 
sont  MM.   Page  et  Fontaine  qui  l'ont  retiré  de  l'eau 

NARCISSE  HEBERT, —de  St.  Charles  et  beau  frère  du 
défunt.  Ce  dernier  était  un  homme  robuste  et  jouissant  d'une 
bonne  santé  ;  il  était  à  l'aise. — J'ai  vu  le  corps  à  l'eau,  devant 
la  porte  de  M.  Cadoret,  et  à  l'enquête  du  coroner.  Je  l'ai  par- 
faitement bien  reconnu.  Après  l'avoir  retiré  de  l'eau,  il  a  été 
conduit  au  villag*  ie  St.  Hyacinthe,  où  l'enquête  a  eu  lieu.  Sa 
figure  étant  lavée,  j'ai  remarqué  qu'il  avait  une  blessure  sur  le 
menton  et  une  entre  les  deux  yeux. 

'  ~  Par  M.  Carter. — Il  y  avait  plusieurs  personnes  sur  le  rivage 
lorsque  je  suis  arrivé  ;  le  cadavre  n'était  pas  retiré  de  l'eau.  En 
voyant  la  figure  de  Charron,  je  l'ai  parfaitement  reconnu.  Il 
n'avait  que  les  deux  blessures  dont  je  viens  de  parler,  à  la  figure. 
La  peau  du  ft-ont  était  enlevée  comme  par  de  l'eau  bouillante. 
11  avait  les  doigts  un  peu  crochis.  Le  défunt  était  de  moyenne 
taille,  et  il  aurait  été  de  même  grandeur  une  fois  noyé,  s'il  n'a- 
vait pas  été  plié. 

LOUIS  CHARRON,  ---âgé  de  13  ans,  neveu  du  défunt.  Je 
restais  avec  mon  oncle  à  St.  Charles,  le  2  Avril  dernier.  Ce 
jour  là  mon  oncle  est  parti  pour  aller  à  St.  Hyacinthe.  C'est  la 
dernière  fois  que  je  l'ai  vu.  Il  se  rendait  là  par  affiiires,  pour  y 
retirer  de  l'argent.  Je  suis  resté  à  la  maison,  avec  mon  oncle 
Vital,  frère  du  défunt.  Quand  mon  oncle  Anselme  est  parti,  il 
a  pris  deux  rouleaux  de  billets  de  banque,  et  les  a  mis  dans  ses 
poches  de  veste,  un  rouleau  dans  chaque  poche.  Ces  rouleaux 
de  papier  étaient  gros  comme  mon  poignet.-i-Mon  oncle  est  par- 


i 


BBAUREOARD. 


Iix  avri. 
mais  je 
dans  la 
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rouvê,  il 
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« 


tî  en  charrette  vers  neuf  heures  :  il  m*a  dit  en  partant  d'avoir 
Wen  soin  de  la  maison,  qu'il  reviendrait  le  soir. — Je  ne  sais  pus 
lire. — Le  défunt  gardait  son  argent  dans  la  valise  où  il  a  pris  les 
rouleaux  de  papier.  C'est  le  samedi,  2  avril,  qu'il  a  laissé  la 
maison. 

Par  M.  Carter — Le  défunt  est  parti  vers  huit  heures  pour 
St.  Hyacinthe  : — je  n'étais  pas  seul  dans  la  maison  ;  il  y  avait 
aussi  un  autre  ménage,  la  famille  de  Vital  Charron,  composée 
de  trois  enfants  plus  jeunes  que  moi,  du  père  et  de  la  mère. 
Mon  oncle  était  dans  sa  chambre,  quand  il  a  ouvert  la  valise  où  il 
mettait  son  argent.-~Dos  deux  rouleaux  qu'il  a  mis  dans  ses  po- 
ches, il  en  a  regardé  un. — J'ai  examiné  ces  rouleaux  ;  mon  oncle 
ne  les  montrait  par  ce  que  je  connaissais  peu  les  billets  de  ban- 
que. Je  connais  la  différence  entre  un  billet  d'une  piastre,  et  un 
de  deux. — Mon  oncle  avait  des  billets  de  toutes  façons  dans  ses 
rouleaux. — (On  montre  au  témoin  un  billet  de  la  banque  de  la  Ci- 
té ;  il  dit  que'e'est  un  billet  de  la  Banque^de  Montréal  Un  autre 
billet  de  la  Banque  du  Haut-Canada  lui  étant  exhibé,  il  dit  que  ce 
doit  être  un  billet  des  Etats.  On  lui  montre  un  cinq  piastreis, 
qu'il  dit  être  un  deux  piastres.) 

Par  M.  Johnson.— -Je  connais  peu  l'argent. — Je  ne  pourrais 
pas  bien  voir  la  différence  entre  les  billeis  de  Montréal  et  des 
Etats-Unis. 

VITAL  CHARRON,~est  frère  du  défunt  et  restait  avec  lu 
à  St.  Charles.  J'étais  là  le  2  avril  au  matin.  Ce  jour  là,  monî 
frère  est  parti  pour  St.  Hyacinthe  entre  huit  et  neuf  heures,  en 
voiture.  Il  m'avait  dit  qu'il  avait  quelques  affaires,  et  qu'il  de- 
vait retirer  de  l'ai'gent.  Mon  frère  vendait  des  moulins;  je  ne 
«ais  s'il  en  a  vendus  à  St.  Hyacinthe. — A  son  départ,  je  n'étais 
pas  à  la  maison,  étant  parti  plus  k  bonne  heure  pour  aller  tra- 
vailler.— L'argent  du  défunt  était  dans  sa  valise,  qui  était  à  clef. 
Cette  valise  avait  un  pied  et  demi  de  long  et  était  couverte  en 
cuir. — Il  n'y  avait  que  mon  frère  qui  la  visitfût.  Le  eorps  du  dé- 
funt n'a  été  trouvé  que  la  5êine  semaine  après  le  2  Avril. — J'ai 
vu  le  corps  chez  M.  Etienne  Lussierjje  l'ai  bien  reconnu. — De- 
puis la  mort  de  mon  frère,  nous  avons  transporté  la  valise  chez 
le  notaire  Leblanc,  le  premier  dimanche  d'Avril,  avîmt  l'enquête. 
Lorsqu'elle  a  été  ouverte,  j'étais  présent  ;  il  y  avait  dedans  $88 
ou  $@9. 

LUDGER  PAGE.— Je  suis  chef  de  police  à  St.  Hyacinthe. 
Le  2  avril,  je  passais  devant  l'auberge  de  Làflamme,  avec  4  hom- 
mes de  police,  parmi  lesquels  se  trouvaient  Fontaine  et  Guer- 
non.  Il  y  avait  chez  Laflamme,  MM.  Auguste  1. éclaire,  Nazaire 
Civalier,  M.  Gultté,  J.  B.  Paillon,  Octave  Maurice  et  Félix  Robi- 
taille.  J'entendis  du  bruit  dans  la  maison  ;  je  vis  que  c'était  une 
chicane  qui  s'y  était  élevée  ;  j'entrai  et  je  vis,  si  je  me  rappelle 
bien,  le  défunt  Charron  avec  le  prisonnier,  assis  au  pied  de  l'es- 
calier; un  peu  plus  loin  se  trouvait  M.  Guitté  avec  Madame  La- 
U^mme,   Etant  sorti  de  la  maison,  je  rencontrai  Fontaine  et 


6 


PROCfes 


•■  ? 


M 


Gnemon  qnolqne!!  in<«tants  fir>r^.  Forttfline  mo  dît:— "  PHoré, 
HiNHire'.'-inl eL  (/hjirroa  st^n  vont,  et  Cimrroii  e-it  h'ww  -n  iraîh." — 
Je  rcMUai  cUoz  ii.diiiiJi.iii;  à  cIlmix  ou  trois  reprises.  VtM's  dix 
houres,  j'ai  revu  IJe:uireuf  ir»!  ;  il  revontiit  (l.ins  l.i  me  (^asLMide,  et 
d  ms  la  direction  au  pont  Biron.  Il  a  rencontré  les  lionimes  do 
police  Fontaine  '.'t  Giiernon  et  est  arrivé  à  moi  en  se  frottant  les 
mains.  Ensiiito  il  est  entré  chez  Laflimnie  où  je  lui  ai  vu  pren- 
dre un  c  uk  puis  jo  no  l'ai  plus  revu  ce  soir-là.  Le  5  Mai  dernier, 
je  fais tis  des  lechorclies  dans  la  flame  du  moulin,  pour  trouver  lo 
corps  do  <Jliirroii,  lorsqu'on  est  venu  me  dire  de  ne  plus  chercher, 
que  le  corps  é' lit  retrou\é.  Je  me  rendis  surleslieux,  et  je  retirai 
le  oïdivre  de  j'otm — J'avais  l»ien  connu  (charron  et  quand  je  le 
sor.is  de  l'eau,  je  n'eus  p  is  de  peine  à  le  reconuiiître.  Le  défunt 
n'avait  p  is  de  chapeau  ;  il  avait  un  surtout  ji^ris,  un  pantalon  gris 
et  un  autre  noir,  une  veste  noire,  une  cmvate  remplie  de  simgj 
deux  chemises,  et  des  bottes.  J'ai  gardé  soigneusement  quel- 
ques uns  de  ces  objets.  Je  produis  ici  un  mouchoir,  une  montre 
en  argent  et  une  clef  en  or;  l'heure  marquée  par  la  montre  n'a 
pas  été  changée.  La  montre  marque  11  heures  moins  13  minu- 
tes. Je  produis  aussi  des  argents  que  j'ai  trouvés  sur  le  défunt, 
savoir:  $12  en  billets  de  Banque,  $11  en  trente  sous,  une  piastre 
en  quinze  sous,  une  cent  et  onze  sous,  formant  $24  et  12  sous. 
Je  produis  un  chapeau  que  j'ai  pris  chez  M.  Désilets.— l^e  lende- 
main du  jour  où  le  cor  s  a  été  retrouvé,  une  enquête  a  eu  lieu. 
Charron  uv.iir  41  ou  42  ans. — Il  y  a  un  rapide  près  du  pont  ;  ce 
rapide  est  formé  par  des  cailloux,  mais  ces  cailloux  ne  sont  pas 
bien  haut.  En  bas  du  pont,  il  y  a  des  dames  faites  pour  retenir 
l'eau. 

M.  DA.\vsr>'»,  horloger,  examine  la  montre  et  remarque  que, 
lorsqu'ttlk  .arrêtée,  à  11  heures  moins  13  minutes,  la  chaîne 
n'était  pas  i\...aue  au  bout. 

FÉLIX  FO  TAINK.— Je  demeure  à  St.  Hyacinthe  depuis  8 
ans;  j'y  suis  homme  de  police.  Charron  venait  à  St.  Hyacinthe 
tous  les  samedis;  on  le  disait  riche.  J'ai  vu  le  défunt  pour  la 
dernière  fois,  le  2  avril.  Je  pense  l'avoir  vu  deux  fois  dans  la 
journée,  l^a  première  fois,  il  sortait  de  chez  Ducharme;  il  cham- 
hran'aU  ;  il  était  bien  en  train.  La  seconde  fois,  je  l'ai  vu  sortir 
de  chez  Laflamme  ;  c'était  vers  lO^h.  ou  11  heures.  Il  était  en- 
core bien  ivre  ;  le  prisonnier  raccompagnait  et  paraissait  à  jeun. 
Quand  ils  sont  passés  tous  les  deux  près  de  moi,  j'ai  demandé 
au  prisonnier  :  "  Beauregard,  où  vas-tu  avec  Charron  ?"  Il  ne  m'a 
pas  répondu  ;  il  tenait  Charron  par  le  bras  et  il  se  dirigeait  du 
côté  du  pont  Biron.  Une  minute  après,  je  dis  à  Page  : — Je  viens 
de  voir  passer  Beauregard  et  Charron  ;  Charron  est  bien  en  train  ; 
la  tête  lui  traînait  jusqu'à  terre." — Beauregard  marchait  bien 
droit  et  il  allait  vite.  Page  m'a  dit:  "  C'est  bon,  Beauregard  l'a- 
mène chez  lui." — 16  ou  20  minutes  après,  je  vis  le  prisonnier  ve- 
nir vers  nous  tout  essoufflé  et  en  se  frottant  les  mains.  Il  venait 
dupent  Biron,  même  direction  que  celle  dans  laquelle  il  était  allé. 


Ti 


BEAURGOARD. 


rahi." — 
ïiivs,  dix 
^eiide,  et 
nmcs  do 
ttjint  les 
vu  pren- 

I  dernier, 
ouver  le 
;!ierclier, 
je  retirai 
md  je  le 
e  défunt 
lion  gris 
de  siin^, 
mt  quel- 
î  montre 
mtre  n'a 
[3  roinu» 
î  défunt, 
e  piastre 
12  sous. 
■e  lende- 

eu  lieu, 
pont  ;  ce 
sont  pas 
•  retenir 

que  que, 
ti  chaîne 

depuis  8 
yacinthe 
pour  la 
3  dans  la 
il  cham- 
vu  sortir 
étsiit  en- 
t  à  Jeun. 
iemandê 

II  ne  m'a 
igeait  du 
-Je  viens 
?n  train  ; 
lait  bien 
sgard  l'a- 
nnier  ve- 
11  venait 
îtait  allô. 


(Il  rftv<»nait  «enl.  Alor««  jp  lui  donnndti  : — "  Qu'ns-tn  fnit  de  c« 
■»  puivr.^  riiîirroi)?' — lime  ré|it.iidi:  :  ••  Il  i^-thiiT):  lu^  s(ms  pas 
inquiet,  Pontaine  :  il  (^st  assez  l)i*'n,  qu'il  s'en  v;»  comme  un  chapeau 
qui  va  sur  l'eau." — J'ai  pensé  que  le  prisonnier  voulait  faire 
un  badin-jffe.  Tout  en  parlant  ainsi,  nous  avions  fait  quelques 
pas.  le  prisonnier  et  moi.  Je  ne  pense  pris  que  le  prisonnier  au- 
rait eu  le  temps  d'aller  ciiez  lui  et  de  revenir  en  15  minutes,  car  il 
demeure  de  l'autre  cAté  de  la  rivière  h  un  arpent,  au  moins,  du 
pont.  îiO  défunt  ne  devait  pas  pnsser  le  pont  pour  se  rendre  chez 
lui,  mais  c'était  la  route  du  prisonnier  pour  se  rendre  chez  lui. — 
Depuis  cette  époque,  je  n'ai  pas  eu  de  conversation  avec  le  pri- 
sonnier. Mais  avant  ces  faits,  le  prisonnier  m'a  dit, — "  Si  j'avais 
eu  de  rargent,  je  n'aurais  pas'demandé  une  licence  de  tempéran- 
ce, mais  je  n'avais  pas  assez  d'argent  pour  avoir  une  licence  pour 
des  boissons  fortes."  C'était  le  vendredi,  la  veille  du  2  avril,  qu'il 
me  disait  cela. 

Par  M.  Carter. — J'ai  rôdé  avec  les  autres  hommes  de  police, 
aux  environs  de  chez  Laflamme,  pendant  3  ou  4  heures.     Je  n'ai 

Î)as  vu  d'autre  personne  que  le  prisonnier  et  le  défunt,  allant  dans 
a  direction  du  pont.  Ce  soir  là,  il  faisait  un  peu  noir,  mais  on 
pouvait  reconnaître  les  gens  à  60  pieds.  De  chez  Laflamme  au 
pont,  il  peut  y  avoir  cinq  ou  six  arpents.  Quand  le  prisonnier  et 
Charron  sont  passés  près  de  nous,  nous  les  avons  suivis  un  demi- 
arpent  ;  nous  n'avons  pas  été  plus  loin,  le  chef  de  police  nous 
ayant  dit  de  ne  pas  nous  éloigner  de  chez  Laflamme.  Il  arrive 
Bouvent  au  prisonnier  de  se  frotter  les  mains,  en  parlant. 
.  PIERRE  GUERNON.— Jesuis  homme  de  police  à  St.  Hya- 
cinthe. Je  connais  très  bien  le  prisonnier  et  je  connaissais  bien 
Charron.  J'ai  passé  la  soirée  du  2  avril  avec  Félix  Fontaine.  (Le 
témoin  corrobore  le  témoignage  précédent  jusqu'ici.)  Après  que 
nous  eûmes  perdu  de  vue  Beauregard  et  Charron  qui  s'en  allaient 
du  côté  du  pont,  nous  sommes  allés  chez  Laflamme  ;  nous  y  avons 
vu  un  nommé  Morin  qui  était  ivre  et  qui  demandait  Beauregard. 
Je  l'ai  conduit  à  la  stîition  de  police,  sur  l'ordre  de  M.  Page  ;  cela 
m'a  pris  environ  un  quart  d'heure  ;  revenu  à  mon  poste,  j'ai  re- 
trouvé Fontaine.  Aussitôt  le  prisonnier  est  arrivé  à  nous  en  se 
frottant  les  mains  ;  il  nous  a  dit  : — ^"  Est-il  tard  ?" — ^"  Dix  heures  et 
^emie,  onze  heures  "  lui  fut-il  répondu.  "  Il  est  temps  d'aller 
|)rendre  un  coup  "  répliqua  le  prisonnier.  Il  était  revenu  du 
Sjpôté  du  pont,  seul.  Il  n'avait  pas  eu  le  temps  d'aller  chez  lui,  et 
l'ai  été  surpris  de  le  voir  arriver  si  vite.  Fontaine  lui  a  demandé 
î©ù  il  avait  rais  Charron,  et  il  répondit  qu'il  était  bien,  de  ne  pas 
litre  en  peine.  Puis  il  s'est  dirigé  du  côté  de  chez  Laflamme  avec 
fontaine.  Il  avait  l'air  pressé  et  semblait  vouloir  se  débarrasser 
lie  nous.  Le  samedi  suivant,  M.  Lussier  m*a  demandé  des  nou- 
,f  elles  de  Charron  ;  je  lui  ai  répondu  :  "  S'il  n'est  pas  chez  lui,  il 
l^aut  le  chercher  dans  la  rivière." 

i   Par  M.  Carter. — Quand  le  prisonnier  est  sorti  de  chez   Ia- 
lamme,  je  l'ai  vu  sortir  ;  j'étais  à  environ  80  pieds  de  chez  La- 


s 


PROCÈS 


flamme.  D'autres  personnes  peuvent  ôtrc  sorties  de  chez  La. 
fliimme.  J'ai  suivi  le  prisonnier  et  Charron  à  quelque  distance. 
Lu  nuit  était  îiasez  sombre,  mais  elle  était  parfois  éclairée  par  des 
signaux  ou  tirants.  Je  pouvais  reconnaître  une  personne  à  80 
pieds.  Nous  avons  demeuré  près  de  chez  I^iiHamme  jusque  vers 
minuit.  C'est  peut  être  do  moi  seulement  que  le  prisonnier  vou- 
lait se  débarrasser.  Il  y  avait  encore  du  monde  chez  Laflarome 
quand  le  prisonnier  y  est  retourné. 

NAZAIRE  CIVÀLIER— de  St.  Hyacinthe.  Je  suis  allé,  le 
2  avril  au  soir  chez  Laflamme.  J'ai  connu  Charron,  et  je  l'ai  vu 
là.  11  a  fait  venir  une  traite,  et  j'ai  pris  un  verre  avec  lui  ;  le  pri- 
sonnier et  un  autre  en  ont  aussi  pris  avec  nous,  entre  dix  et  onze 
heures.  Ensuite  le  prisonnier  et  le  défunt  sont  sortis  ensemble. 
Je  n'ai  point  revu  ce  dernier,  et  je  ne  me  suis  pas  aperçu  qu'il  eût 
do  l'argent  sur  lui.  Beauregard  est  revenu  chez  Laflamme,  un 
quart  d'heure  après  en  être  sorti  avec  Charron.  Alors  il  m'a  de- 
mandé si  les  personnes  qui  avaient  entendu  du  bruit  étaient  par- 
ties. Nous  avons  pris  une  traite  ensemble,  le  prisonnier  et  moi, 
c'est  un  nommé  Poulin  qui  a  payé.  Avant  ce  temps,  Beaure- 
gard  tenait  une  auberge  sans  licence.  Le  lundi,  le  4  ami,  il  m'a 
dit,  chez  lui,  qu'il  allait  au  village  afin  d'obtenir  une  licence,  pour 
vendre  de  la  boisson  forte.  Il  m'a  dit  qu'il  n'avait  pas  eu  les 
moyen  d'en  prendre  une  plus  tôt,  il  a  ajouté  qu'il  avait  trouvé  des 
amis,  qui  lui  avaient  procuré  les  moyens  d'avoir  cette  licenca. 

Par  M.  Carter. -^Lo  soir  en  question,  je  suis  entré  chez  Lîu 
flamme  une  fois,  au  commencement  de  la  veillée,  et  une  autre 
fois  à  dix  heures.  Il  y  avait  là  d'au'res  personnes.  Je  connais 
Joseph  LusigTian,  et  je  sais  qu'il  est  en  prison.  Je  ne  me  rap- 
pelle pas  l'avoir  vu  chez  Laflamme,  ce  soir  là  ;  on  m'a  dit  qu'il  y  é- 
tait.  Il  fesait  noir,  mais  je  ne  puis  dire  à  quelle  distance  on  pouvait 
reconnaître  un  homme.  Au  meilleur  de  ma  connaissance.  Beau. 
regard  n'a  pas  été  plus  d'un  quart  d'heure  absent. 

LEON  DUCHARME.— Je  demeure  à  St.  Hyacinthe  et  je 
m'y  trouvais  le  2  avril. — Je  tiens  une  auberge. — Je  connais  le 
prisonnier  depuis  10  à  15  ans  :  je  connaissais  aussi  le  défunt. — 
Le  2  avril,  j'ai  vu  le  prisonnier  deux  fois^  ttnefotH  en  conipagnie 
du  défunt.  Ils  ont  pris  un  coup  snsemble  ;  je  crois  que  c'est 
Charron  qui  a  payé. — Le  dimanche  matin,  je  rencontrai  de  nou- 
veau le  prisonnier  vers  6  ou  7  heures.—"  As-tu  eu  connaissance 
de  quelque  chose  hier  soir  ?  "  Hier  soir,  lui  ai-je  répondu,  il  y  a- 
vait  qaelqu'un  chez  nous  ;  vers  11  heures,  nous  avons  entendu 
du  bruit  ;  étant  sortis,  nous  avons  aperçu  plusieurs  personnes 
sortant  de  chez  Laflamme.  "  Le  prisonnier  me  dit  alors  :  "  Ce  n'est 
pas  de  cela  que  je  veux  parler  ;  il  y  a  des  gens  qui  disent  avoir 
entendu  crier  au  meutres  dans  la  direction  du  pont  Biron.  "  Je 
n'ai  pas  entendu  parler  de  cela,  lui  ai-je  répondu. 

Lorsque  cette  conversation  eut  lieu  entre  moi  et  le  prisonnier, 
un  nommé  Guertin,  qui  est  mort  depuis,  se  trouvait  avec  noua 
Le  prisonnier  lui  demanda  ;  "  Ce  n'est  pas  toi  qui  a  cri^  sur  h 


pont  ? 
«ftiouta 
répond 
^ard.— 
«'était 
Honnici 
'du  moî 
•qu'il  hi 
'    Le  \ 

<{U\  V01 

préeédi 
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luette  1 
■tompér 
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^'aubei 
tous,  Il 
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uvait  ei 
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4  LOt 
avec  m 
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■Biron. 
•on  pèî 
|nan, 
«ont 
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i^harro 
éhapeai 
$n  je  r 
•èenu  1 
«eure 
fuite  d 
^lice, 
tant; 


BEArREOARD.  W 

e  chez  La.,  pont?" — Von,r(^pon(îît  Ciiortin.  "  AMu  roncontrA  quoiqu'un, 
le  distance,  laiouta  le  prisonninr,  toujours  (^n  s'adrcssnnt  à  (îucrtin. — Non, 
irée  par  des  répondit  encore  ce  dernier.  "  Giiertin  était  le  voisin  de  Beaure» 
paonne  à  80  ^rard. — Celui-ei  dit  avoir  entendu  siffler  et  demanda  à  Guertin  si 
usque  vers  «'était  lui  qui  sifflait.  Guertin  répondit  que  non.  Alors  le  pri- 
onnier  vou-  «onnier  lui  dit  : — Commpje  débarquais  de  sur  h  Pont,  du  r/ité 
;  Laflarome    •Ju  mmilin,  je  crois  que  c'e^l  toi  qui  embarquais  "     Il  voulait  dira 

•qu'il  laissait  le  pont  en  g-.içrnant  le  villn(]fe. 
suis  allé,  le  ,  Le  vendredi,  1er  avril,  un  avait  accordé  des  certificats  à  ceux 
et  je  l*ai  vu  qui  voulaient  avoir  des  licences.  Dans  le  cours  de  la  semaine 
•  lui  ;  le  pri-  précédente,  le  prisonnier  m'avait  dit  qu'il  n'avait  pas  d'arpjent 
5  dix  et  onze  jpour  obtenir  une  licence  pour  vendre  des  boissons  enivrantes, 
s  ensemble,  luette  licence  coûtait  ^1^62  tandisqu'une  licence  pour  boissons  de 
■Qu  qu'il  eût  iompérance  ne  coûtait  que  $20.  Le  lundi  nuivant,  je  vis  le  pri- 
aflarame,  un  uonnier  ;  il  me  dit  : — Vous  siiurez  que  je  vais  prendre  une  licence 
rs  il  m'a  dé-  ^'auberge. — Pourquoi  ne  l'as  tu  pas  prise  en  même  temps  que 
étaient  par-  tous,  lui  ai-je  dit .'— '"  C'est  qu'alors  je  n'en  avais  pas  les  moyene 
nier  et  moi,  et  que  maintenant,  je  les  ai,  me  répondit  le  prisonnier,  sans 
ps,  Beaure-  nommer  qui  lui  avait  fourni  cet  argent,  ou,  cruelle  somme  il 
avTil,  il  m'a  uvait  eu.  " 

licence,  pour  g    Par  M.  Drummond. — Le  prisonnier  avait  dit  qu'il  y  avait  des 

pas  eu    les  -gens  qui  lui  procureraient  de  l'argent.    Je  demeuî-e  prv^.-  du  mar- 

t  trouvé  des  fché  à  un  arpent  et  demi  de  chez  Laflamme. — Quand  Chan  on  est 

e  licence.       sdisparu,  il  n'y  avait  plus  de  irlace  dans  la  rivière  Yamaska,  dont  le 

:ré  chez  La-  ]|it,  prés  du  pont  Biron,  est  formé  de  g-alais  et  de  roches    nicrQes, 

ptune  autre  ->    EDMOND   CHAGNON.-— Je  demeure  à  St.  Hyacinthe  où  je 

Je  connais  me  trouvais,  le   2  Avril,  engagé  chez    M.    Laflamme.      Le  soir 

ne  me  rap-  %n  question,  il  y  eut   chicane  entre  Paillon  et  Lue   Soly.    Plu» 

dit  qu'il  y  é'  tieurs  personnes  s'étaient  rassemblées;   le  prisonnier  et  le  dé- 

e  on  pouvait  funt  étaient  du  nombre. 

sance,  Beau»  i.   Par  M.  Drummond. — Pendant  la  soirée  en  question,  j'ai  re^té 

presque  continuellement  chez  Laflamme. 
inthe  et  je  4  LOUIS  FONTAINE.— -Le  2  avril,  au  soir,  je  me  trouvais 
e  connais  le  gvec  mon  père  (témoin  déjà  entendu)  et  trois  autres  personnes 
e  défunt.--  4hrès  de  chez  Laflamme. — Entre  10  et  11  heures,  j'ai  vu  le  dé- 
n  compagnie  ^f^nt  Charron  et  le  prisonnier  se  dirigeant  ensemble  vers  le  pont 
is  que  c'est  -ïliron.  (  Le  témoin  corrobore  pour  cette  partie  la  déposition  de 
itrai  de  nou-  ton  père.) — J'ai  vu  ensuite  le  prisonnier  en  compagnie  de  Lusi» 
connaissance  #nan,  tous  deux  venant  dans  la  direction  du  pont  Biron.  Ils  se 
ondu,  il  y  a-  ^ont  laissés  près  de  chez  M.  Cadoret.  Beau  regard  est  alors 
îns  entendu  4|renu  nous  rejoindre.  Mon  père  lui  a  demandé  : — Où  as  tu  mis 
s  personnes  Charron  ? — Beauregard  répondit  :   "  //  est  bien  ;  il  va  comme  un 

depuis  le  moment 

moment  où  il  est 

chez  lui  ;  il  de» 

Jieure  de  l'autre  côté  du  pont  Biron  à  un  arpent  environ. — A  la 
uite  de  la  conversation  qu'eut  le  prisonnier  avec  les  hommes  de 
t  avec  noua  ij^lice,  il  est  entré  chez  Laflamme  ou  il  a  payé  une  traite  en  di- 
.  crié   sur  le  iMint  ;   "  iVaw<j  allons  boire  ^  la  san^é  de  celui  qui  va  comme  un 

è 


M 


10 


PROCÈS 


)ipe. 


thav^u  sur  Tc^u.^^  Ensin'to,  le  prÎFonmVr  est  sorti  :  jV'taîs  alors  jp^^i^  ' 
chez  Lîiflrtinm»'.     Lorsque  la  traite  a  cto  payée,  il  y  avait  à  peu  F     ,^^ 
près  dix   personnes  dans  la  maison  ;  je  ne  me  rappelle  pas  les 
nrim^  de  ces  personnes,  mais  je  sais  que  c'est  M.  Laflamme  quia 
servi  la  traite. — Dans  ce  moment  là,  Beanregard  n'était  pas  ivre; 
il  était  nn  peu  en  irnin. — Q'iand   la   traite  eAt   été   payée,  je  g" 
m'en  suis  retourné  chez  rroi  :  je  demeure  à  6  arpents  de  chez  La-  ■CU 
flamme. — Le   lundi,  je  suis  parti  pour  les  Etats-Unis  ou  j'allais  lîîj"  ' 
faire  les  semences;   avant  mon  départ,  je  n'ai  pas  entendu  par- ^ ^"f 
1er  de  la  disparition  de  Charron.  Bon  d( 

Par  M.  Drumniond.  — Le  soir  du  2  avril,  je  me  trouvais  dans^f^  , 
la  rue  avec  mon  père,  Guernon,  un  nommé  Tétreau.  et  au  meilleui  t^<^"  <^' 
de  ma  mémoire  M.  Page. — Nous  avons  tous  suivi  de  près  Char-  JP^rti  ( 
ron  et  Beauregard  quand  ils  allaient  du  côté  du  pont.  — J'étais  iP^}^} 
chez  Laflamme  à  environ  dix  pieds  de  la  barre,  quand  Beaure-  «fe.  « 
gard  a  payé  la  traite  dont  j'ai  déjà  parlé.  Je  suis  resté  un  quart  P^'.  " 
d'heure  chez  Laflamme  après  que  le  prisonnier  y  fut  revenu  ;  je  J??^^' 
fumais  ma  pipe.  Je  n'ai  pas  bu  un  seul  verre  durant  la  veillée.  jI^*  " 
Quand  la  traite  a  été  payé,  je  n'ai  vu  que  Laflamme  dans  h  £p^^ 
barre  ;  le  commis  Edmond  Chagnon  était  absent.  — C'est  après  *  f> 
que  Bcauregard  eût  payé  la  traite  que  je  l'ai  vu  avec  Lusi-  ^1"®"^'^ 
gnan.  J'étais  alors  au  coin  chez  M.  Leclerc.  Beauregard  et  t.  ^^ 
liUsignan  venaient  enspmble  et  ils  se  sont  séparés  au  coin  che2  s^^ , ,  . 
M.  H  ébert.  — Ce  soir  là,  il  faisait  assez  clair  pour  voir  à  cenl  #"^^1^ 
pieds  On  pouvait  distinguer  un  homme  de  chez  M.  Leclerc  iP^*"^® 
jusqu'au  pont  ;  il  peut  y  avoir  trois  ou  quatre  arpents  de  chez  5 1 
M,  Leclerc  au  pont,  mais  la  rue  est  en  droite  ligne.  — Je  suis  à  jf|^**P®" 
St.  Hyacinthe  depuis  7  ou  8  ans.  J'ai  demeuré  trois  mois  oti  ^  P^ 
trois  mois  et  demi  dans  les  Etats-Unis  ;  environ  quinze  jours  a  ^^ 
après  mon  départ,  j'p.i  entendu  dire  que  M.  Beauregard  étaii  if®  °  ^ 
pris.  ï^  J^.' 

Par  s.  H.  Le  juge  Aylwin.  — Le  prisonnier  était  chez   La-  j^y**^' 
flamme  quand  je  l'ai  vu  pour  la  dernière  fois.  — Je  n'ai   pas   vii  d^  !? 
Lusignan  chez  Laflamme  ce  soir  là.  — C'est  après  que  le  prison-  ^^' 
nier  eût  quitté  Lusignan,  qu'il  a  payé  la  traite: — J'étais  à  envi-  ,         , 
ron  cinquante  pieds  de  Beauregard  et  de   Lusignan  quand  ils  sf  1"  P^ 
sont  laissés  •  namm 

MADAME  VITAL  CHARRON.— (Julie  Fontaine.)— Je  de-  1^^^^''  ^! 
demeure  à  St.  Charles  et  j'y  restais  au  commencement  d'Avri  ?^^J^ 
dernier.     Le  défunt  Anselme  Charron  demeurait  chez  nous.— 
J'ai  vu  le  défunt  pour  la  dernière   fois,  le  2  Avril. — îl  a  passt 
dans  le  côté  de  la  maison  où  je  reste  avec   ma  famille.    Outrf 
mes  trois  enfants,  il  y  avait  aussi  deux  de  mes  neveux^  dans  l 
maison. — Anselme  Charron  est  parti  pour  St.  Hyacinthe  en  cha 
rette  vers  8   ou  9  heures. .    A.     M. — Il  portait  ce  jour  là  uii( 
bougrine  d'étoffe  grise,  des  culottes  d'un  gris  noir,  une  veste  d( 
drap  noir,  un  mouchoir  autour  du  cou,  une  chemise  blanche  rayéf 
towgCj  en  guiliaUmey  ifii  chapeau  de  laîné  ïiôir^  des  -grandes  ff 
botteg  noires.    Il  était  nu  mains  quand  il  est  parti  ;  il  tenait  sî  è 


occ 
lin 
nson 


BEAUREGARD. 


11 


%)ipe. — (Le  chef  de  police  P.igé  produit  le  chapeau  que  le  térncîn 

iVtais  Rlor»»  P^^^^  reconnaître.) — Je  ne  reconnaîtrais  pas  les  objets  qui  ont  été 

V  avait  à  neu  f  ^trouvés  sur  le  défunt.     Ce  dernier  avait  une  valise  dont  lui 


jpelle  pas  les 
iflamme  qui  a 


eul  gardait  la  clef. — Le  cheval  et  la  charette  du  défunt  ont  été 
amenés  à  St.  Charles,  le  10  avril;  c'est  mon  mari  qui  est  allé 
'tait  pas  ivre  ;  ^^®  chercher  à  St.  Hyacinthe. — Le  défurt,  à  son  départ  de  St. 
té  oavée  iç  JCharles,  le  2  avril,  m'a  dit  qu'il  reviendrait  de  suite.  Deux  jours 
s  de  chez  La-  fiW^^  son  départ,  on  ne  pouvait  s'imaginer  ce  qu'il  pouvait  faire. 

«;«  ««  î'oiioîo  Mon  mari  est  parti,  le  8  avril,  pour  aller  le  chercher. — Le  corps 
nis  ou  .1  allais  f:,         .       _,t^  >.>     ,   *^    ,  .  .  K 

entendu  par-  ^^"sd^i^G  Charron  a  ete  retrouvé  presque  cmq  semâmes  après 

^'     fion  départ, 
trouvais  dans  i*  ^^^  ^'  Carter. — La  porte   de  la  chambre  d'Anselme  Char- 

,^♦  o.i  moiiilii»  .^on  était  fermée  quand  il  s'est  habillé  ; — il  était  seul  lorsqu'il  est 
Bt  au  mPiileutT    x- j  u      i:         n      *  v,  n  •        * 

ie  près  Char-  P^^^^  "^  ^^  chambre.    Il  est  venu  chez  nous  allumer  sa  pipe  et 

QP(  J'étais  f^  '"^  ^  P"*  ^"  temps. 

land  Beaure-      GABRIEL  RENAUD. — Le  2  avril  dernier,  je  demeurais  à 

resté  un  quart  ^^'  B"'*"'^^^,  à  trois  lieues  de  St.  Hyacinthe. — Le  8  du  même 

ut  revenu  *  ie  P^^^^f  enchâssant  les  rats  musqués,  le  long  de  la  rivière  Yamaska, 

ant  la  veillée  j'^^  trouvé  un  chapeau  noir,  de  laine  ;  je  l'ai  lavé  et  emporté 

nme   dans   la  £j^^^   ™®^  >  J®   '"'^  ^^   ^^^    ^*"®    petite  boucle    de  ferblanc. — 

—C'est  aorès  éP^  montre   le  chapaau  au  témoin  qui  dit  le  reconnaître). — J'ai 

avec   liOsi-  5^ouvé  le  chapeau  sur  la  grève  à  deux  pieds  et  demi  de   l'eau  ; 

{eaureffard   el  F  *^^*  ^^^^^  ""®  boucle  de  ruban. — C'est  à  deux  lieues  et  demie 

cmn  chez  ^^  ^^'  Hyacinthe,  que  j'ai  trouvé  le  chapeau. — La  grève,  en  cet 

voir    à  cenl  |^"<^^*^^*'  ^^^^  ""  pC"  V^^^  haute  que  l'eau.     La  glace  était  alors 

M    Leclerc  '|^^^^^®  »  i^  y  ^^'^^^  encore,  cependant,  quelques  glaçons  sur  la  rive. 

nts    de  chez  s    /'ctr  M.  Drummond. — Il  y  a  des  ponts  entre  l'endroit  où  le 

T    g^jg  «  ^^îhapeau  a  été  trouvé  et  St.  Hyacinthe. — Lorsque  j'ai   trouvé  le 

rAia   mnU  nii  ^^bapcau,  la  glace  était  partie  depuis  quelques  jours. 

quinze  iours  '^    ANTOINE  JOLY.— .Te  demeure  à  St.  Barnabe  et  j'y  restais 

ureo-ard   étai'  ïï^  ^  ^^^^^  dernier. — Je  n'ai  pas  vu  trouver  le  chapeau,  mais  j'ai 

^  '     vu  venir  Gabriel  Renaud  portant  le  cliapeau.     Etant  allé  à  St.- 

tait  chez    La-  Py^^i^th^,  j'ai  entendu  parler  de  la  mort  de  Charron,  et,  à  cet- 

n'ai   PIS   vu  è^  occasion,  j'ai  parlé  du  chapeau  trouvé.     Aussitôt  le  frère  du 

1^  ««:^«„  çéfunt  est  parti  pour  aller  cliercherle  chapeau. — Je  connais  le 

que  le  pnson-  r  .        •       ^  •     *        •      •  •  .       i       /^u  n 

Pétais  à  env'-  JP'''sonnier  et  je  connaissais  aussi  Anselme  Charron,  pour  lavoir 

„„j  •!„  „"  ^u  plusieurs  fois.  Le  2  avril,  i'ai  rencontré  le  défunt  chez  M.  La- 

n  quand  Ils  se  *    ^       \  o*  tj      -  h.        "i  •*   •         •  -j-     t        • 

^  flamme,  à  ^^t  Hyacinthe  ;  c  était,  je  crois»,  vers  midi.    Le  prison- 

.      V j    j     ipier  était  avec  Charron  et  tous  deux  parlaient  ensemble. — Beau- 

ement  d'Avri  i^^^^^  *^^  donna  la  main,  et  me   demanda  de  prendre  quelque 
^hose,  ajoutant  que  son  ami  Charron  paierait  la  traite,  car  il 
tait  plein  de  fonds. — En  disant  ces  mots,  le  prisonnier  me  te- 
ait  par  la  main  et  tenait  le  défunt  p.^r  le  bras,  essayant  de  nous 
ntraîner  dans  la  barre  ;  mais  je  ne  voulais  pas  entrer  et  le  de- 
nt ne  s'en  souciait  pas  non  plus.  —  Je  crois  que  le  corps  de 
harron  a  été  retro'né  le  5  mai.     J'ai  vu  le  cadavre  comme   on 
i  sortait  de  l'eau,  et  j'ai  reconnu  que  c'était  le  corps  d'Anselme 
harron. 


chez  nous.— 
[. — Il  a  passt 
mille.  Outr( 
eveux^  dans  li 
lîinthe  en  cha 
e  jour  là  un( 
,  une  veste  de 


de"^-^ndes  t  ■'**"'  ^'  I^nimmond. — Je  n'ai  pas  l)u  avec  Beauregard  et  Char- 
l\  ;  il  tenait  sî  ^ 


1 


t.! 


ton  et  je  ne  les  ai  pas  vu  boire,  mais  Beauregatd  cherchait  à 
entraîner  Charron.  Ça  ne  m'a  pas  étonné,  car  ça  se  voit  tous  les 
jours  dans  les  aubergfes. 

VITAL  CHARRON.— Je  suis  le  frère  unique  du  défunt—Le 
samedi  qui  a  suivi  celui  du  2  avril,  je  suis  parti  pour  aller  à  là. 
recherche  de  mon  frère.  M.  Joly  (le  témoin  précédent)  m'a  in- 
formé, à  St.  Hyacinthe,  qu'un  jeune  homme  de  St.  Barnabe  avait 
trouvé  un  chapeau .  Je  suis  allé  à  St.  Bafnabé  chercher 
le  chapeau.  Je  reconnaîtrais  le  jeune  homtne  qui  a  trouvé 
le  chapeau. — (On  fait  venir  le  jeune  homme  que  le  témoin  re- 
connaît).— Dès  que  je  fus  en  possession  du  chapeau,  je  le  remis 
au  bureau  de  police,  à  8t.  Hyacinthe  — Quand  mon  frère  est 
parti,  le  matin,  son  chapeau  n'avait  pas  la  boucle  blanche  .qui  s'y 
trouve  maintenant. 

ADOLPHE  DÉSn.ETS.— Je  suis  iîls  du  Shérif  Désilets  et 
en  môme  temps,  son  député  — Je  me  rappelle  que,  dans  le  mois 
d'avril  dernier,  on  m'a  rerais  un  chapeau.  C'est  à  l'office  du 
Shérif  que  le  chapeau  a  été  déposé  par  M.  Page. — (Le  témoin 
reconnaît  le  chapeau)  — Le  chapeau  a  été  apporté  seul;  ce  n'est 
que  plus  tard,  après  que  le  corps  eût  été  retrouvé,  qu'on  a  appor- 
té d'autres  effets. — J'étais  présent  lorsque  les  effets  ont  été  trou- 
vés sur  le  corps  du  défunt. — (Au  moyen  d'une  liste  qu'il  a  pré- 
parée,  le  témoin  énumère  et  identifie  tous  les  effets  mentionnés 
et  produits  par  Page)  -^Les  billet.«»  de  banque  étaient  dans  la  po- 
che droite  de  la  veste  du  défunt.  Je  crois  que  les  comptes  et 
les  enveloppes  de  lettres  étaient  dans  la  poche  gauche  de  son 
pantalon.  La  monnaie  était  dans  la  poche  droite  du  pantalon  ; 
une  partie  se  trouvait  dans  une  bourse.  La  montre  était  dans 
la  poche   gauche  de  la  veste 

JOS.  EUSÉBE  LEBLANC,  N.  P.— Je  ré.side  à  St.  Charles  et 
je  connaissais  bien  le  défunt  Anselme  Charron  ;  je  le  voyais  sou- 
vent ; — je  l'ai  vu  peu  avant  sa  disparition. — Le  défunt  était  cul- 
tivateur et  commerçant  ,*  c'était  un  homme  en  moyens. — Après 
la  mort  d'Anselme  Charron,  j'ai  fait  nommer  un  tuteur  au  mineur 
Pierre  Charron. — Le  10  Avril,  une  valise  appartenant  au  défunt 
a  été  apportée  chez  moi,  et  n'ayant  pas  de  clef,  je  l'ai  ouverte  en 
îréspuce  de  quatre  témoins.  La  clef  trouvée  sur  le  cadavre  et 
)roduite  par  l'otîicier  de  police,  ouvre  parfaitement  bien  cette  va- 
lse. Elle  contenait,  tant  en  monnaie  qu'en  billets  de  banque, 
$88.50,  une  montre  en  or,  et  divers  billets  et  obligations.  J'ai 
fait  un  procès  verbal  de  l'ouverture  de  la  valise  et  de  son  conte- 
nu ;  cette  valise  est  toujours  demeurée  depuis  en  ma  possession. 
Je  n'ai  pas  vu  le  corps  après  qu'il  eût  été  retrouvé. — (Le  témoin 
reconnaît  une  obligation  en  faveur  du  défunt  par  Eustache 
Beauregard  et  Vital  Beaurej^ard.) 

Par  M.  Drummond. — J'ignore  s'il  existe  aucun  degré  de  pa- 
renté entre  le  prisonnier  et  les  nommés  Eustache  et  Vital  Beau- 
regard 

PIERRE  LUC  JQLY.— liç  2  avril»  entre  midi  et  deux  heures, 


ied 

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étai( 

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moi, 
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papu 
autre 
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lait.- 
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chez 
tioni 


I 


fieAdABOAfifi. 


19 


i  cherchait  à  ^  défunt  est  venu  chez  moi   pour  acheter  des  moulins  à  battre. 

voit  tous  les  g^je  devais  le  rejoindre  chez  M.  Laflamme — Les  personnes  qui 
étaient  chez  Guertin,  étaient  Beauregard,  Octave  Maurice,  Au» 
guste  Lefebvfe,  et  Dansereau.  Ils  mangeaient  un  steak.  Char- 
ton  a  demandé  un  verre  à  M.  Guertin  qui  tenait  la  barre. 
Guertin  lui  répondit  :  "  Vous  en  avez  assez."  Beaureg^rd  dit 
alors  :  "  Si  Charron  en  a  assez,  nous  nVn  avons  pas  assez  nous 
liutres." — Entre  dix  heures  et  un  qnart  et  dix  heures  et  demiey 

i*aî  vu  Benuregard  et  Charron  entrer  chez  Laflamme.  J'étais 
Qoî-raéme  chez  Lafl:imme.-^I1  v  avait  eu  une  difficulté  dans  la 
i,  je  le  remis  inaison  entre  moi  qui  avais  été  attaqué  et  un  autre.  II  y  avait 
ion  frère  est  flu  bruit  à  propos  de  cette  difficulté  quand  Beauregard  e«t  entré 
fchez  Laflamme,-^  Après  que  Beauregard  et  Charron  furent  partis, 
je  ne  les  ai  pas  revus  ce  soir  là.  Je  suis  parti  de  chez  Laflamme 
vers  onze  heures  et  vingt  ou  onze  heures  et  demie.  Charron  et 
Beauregard  étaient  partis  avant  moi.-^Ce  jour  là,  j'ai  fait  des  af- 
faires avec  le  défunt  Charron. 

Par  M.  Drummond-"-Nous  nous  étions  entendus,  Charron  et 
moi,  pour  nous  rencontrer  le  soir,  vers  7  ou  8  heures. — Lorsque 
Beauregard  et  Charron  sont  entrés  chez  Laflamtoe,  je  m'y  trou- 
vais pour  la  seconde  fois. 

ROBERT  ERVING,— Je  demeure  â  St.  Hyacinthe,  et  j'y  étais 
le  2  avril  dernier.  J'ai  connu  le  défunt  que  j'ai  vu,  la  dernière 
fois,  vers  deux  heures  de  l'après  midi,  au  jour  que  je  viens  de 
mentionner.  Pendant  cet  après-midi,  il  m'a  donné  $44.  Il  y 
atait  $30  en  billets  du  Canada,  $51  en  argent  dur,  et  deux  cinq 
u  pantalon  ;  piastres  en  billets  de  Ban(;|ue  des  Etats-Unis.  11  n'a  compte 
B  était  dans  que  cet  argent  devant  moi  ;  je  ne  puis  pas  dire  s'il  en  avait  d'au- 
tre, et  il  l'a  pris  dans  sa  poclie  de  veste,  je  ne  sais  laquelle — Le 
soir,  il  est  revenu  prendre  le  thé  chez  moi,  vers  sept  heures  et 
demie — Je  tiens  hôtel. — En  partant,  il  m'a  dit  qu'il  allait  au  pe- 
tit ranffi  environ  vers  7^  heures.— -J'ai  vu  le  cadavre  sur  le  rivage 
et  je  l^i  bien  reconnu  pour  celui  de  Charron. 

Par  M.  Drummond. — Je  ne  sais  pas,  au  juste,  sur  quelle  jcue 
étaient  les  égratignures  que  j'ai  vues  sur  le  visage  du  défunt;  je 

Sensé  qu'elles  auraient  pu  être  faites  par  les  gravois  qu'il  y  a 
ans  la  rivière. 

PIERRE  PALARDY.— J'ai  connu  le  défunt,  et  l'ai  vu  le  2 
avril  dernier,  à  St.  Hyacinthe,  deux  fois,  dans  l'après-midi.  J'ai 
acheté  de  lui  un  moulin,  que  j'ai  payé  1,500  francs  ou  $250  ;  sur 
ce  montant,  je  lui  ai  payé  $25  ;  au  meilleur  de  ma  connaissance, 
$16  en  billets  de  banque,  et  le  reste  entrente  sous. — L'argent  de 
papier  consistait  en  un  billet  de  $5,  un  ou  deux  de  $2,  et  les 
autres  de  $1. — Quand  j'ai  vu  Charron,  pour  la  première  fois, 
c'était  chez  Laflamme  ;  le  prisonnier  était  à  ses  genoux  et  lui  par- 
lait.— Je  lui  ai  alors  demandé  si  c'était  le  bon  temps  pour  lui 
donner  de  l'argent  ;  il  m'a  dit  que  oui. — Nous  sommes  sortis,  et 
chez  M.  Préfontaine,  je  lui  ai  remis  la  somme  que  j'ai  déjà  men- 
tionnéo.    Lorsque  je  lui   ai  donné    cette  somme,   U  a  tiré 


défunt. — Le 
)ur  aller  à  la 
dent)  m'a  m- 
îamabé  avait 
ibé  chercher 
qui  a  trouvé 
e  témoin  re- 


anche qui  s'y 

if  Dôsilets  et 
dans  le  mois 
à  l'office  du 
—(Le  témoin 
eul;  ce  n'est 
lU'on  a  appor- 
ont  été  trou- 
3  qu'il  a  pré- 
s  mentionnés 
at  dans  la  po- 
s  comptes  et 
luche  de  son 


re 


t 


11 


Charles  et 
voyais  sou- 
nt  était  cul- 
ens. — Après 
r  au  mineur 
au  défunt 
ouverte  en 
cadavre  et 
ien  cette  va- 
de  banque, 
itions.  J'ai 
I  son  conte- 
possession. 
-(Le  témoin 
Eust<aehe 

Bgré  de  pa- 
Vital  Beau- 

@yx  heures, 


14 


PROCÈS 


11 


■1 


dé  sa  poche  de  veste  droite,  plusieurs  billets  de  Banque,  au- 
tour  desquels  il  a  roulé  ceux  que  je  lui  donnais,  et  remis  le 
tout  dans  la  même  poche  de  veste. — Quand  il  a  tiré  l'arg-ent  de  sa 
poche,  il  en  av«it  la  main  pleine.  Après  que  je  l'eus  payé,  nous 
sommes  partis  quatre,  pour  aller  prendre  un  verre  de  bière  chez 
Laflamme  ;  c'est  Charron  qui  a  payé  ;  après  quoi,  il  est  parti,  vers 
4  heures. 

Par  M.  Drummond. — Je  suis  certain  que  c*était  de  l'argent 
de  papier  que  le  défunt  avait  dans  la  main  ;  je  ne  sais  pas  lire, 
maisje  puis  distinguer  une  piastre  d'un  deux  piastres. 

MICHEL  GUERTIN.--Je  suis  hôtellier  à  St.  Hyacinthe.— Je 
connais  le  prisonnier  qui  est  venu  chez  moi,  vers  huit  heures  du 
soir,  avec  le  défunt,  un  nommé  Maurice  et  une  autre  per- 
sonne du  nom  de  Dansereau  ;  ils  m'ont  demandé  un  steak. — En- 
suite, Charron  et  Dansereau  ont  fait  venir  des  huîtres  ;  ils  m'ont 
donné  chacun  30  sous,  et  je  leur  ai  fait  quatre  soupes  aux  huî- 
très.  îls  m'ont  demandé  de  la  boisson,  je  leur  ai  dit  qu'il  y  en 
avait  un  qui  en  avait  trop  — Ils  ont  fous  prU^  à  part  le  défunt. 
Maurice  est  sorti  le  premier,  Beauregard  et  Charron  ensuite. — Il 
était  alors  9^  heures. — Je  revenais  de  reconduire  des  femmes, 
quand,  passant  devant  la  maison  de  Laflamme,  vers  lO^  heures, 
j'iii  enti  ndu  du  bruit  ;  je  suis  entré  ;  et  j'ai  vu  le  défunt  dans  l'es- 
calier, la  femme  de  Laflamme  et  M.  Guitté  ;  c'est  là  que  j'ai  vu 
Charron  pour  la  dernière  fois.  -   ^      • 

Par  M.  Carter. — Je  sais  où.  demeurent  MM.  Hébert  et  Cado- 
ret.  De  chez  eux  à  la  maison  de  Laflamme,  il  peut  y  avoir  200 
pieds.  Du  coin  de  chez  M.  Leclerc  à  la  demeure  de  Laflamme, 
il  y  a  80  pieds. — La  nuit  en  question  était  noire.  —  De  chez  La- 
flamme au  pont  Biron,  il  y  a  pour  le  moins  4  arpents. 

OCTAVE  MAURICE.— Je  connaissais  bien  le  défunt  Char- 
ron. Le  deux  avril  dernier  au  soir,  j'étais  avec  lui  chez  Michel 
Guertin.  Lefebvre  et  Dansereau  étaient  avec  nous — Nous  nous 
sommes  mis  à  table  vers  9h.  ou  9^h.  J'aperçus  alors  le  prisonnier 
qui  était  ù  un  bout  de  la  table;  je  ne  sais  pas  comment  il  se  trou- 
vait là.  Après  avoir  pris  notre  souper,  je  demandai  au  défunt  un 
30  sous  à  emprunter.  Il  me  répondit:  "  Je  n'ai  pas  de  30  sous, 
mais  je  vais  te  prêter  une  piastre,"  et  il  m'en  remit  une.  Il  y  avait 
deux  chandelles  sur  la  table  où  nous  étions. 

NARCISSE  ST.  GERMAIN.— Je  demeure  à  St.  Hyacinthe- 
Je  connaissais  le  défunt  Charron.  Le  2  avril,  le  prisonnier  est 
entré  chez  moi  vers  six  heures  et  demie  ou  sept  heures  du  soir. 
Il  m'annonça  que  des  Irlandais  avaient  fait  du  bruit  dans  la  vil- 
le et  qu'ils  avaient  été  pris  "  On  veut  aussi,  dit-il,  prendre 
un  Canadien,  mais  le  Canadien  n'est  pas  si  aisé  à  prendre  ;  "  ce 
disant,  il  donna  un  coup  do  rrarce.tte  sur  la  tible.  Je  n'ai  pas  vu 
la  i'nrcHle,  jnai«  ma  fomme  l'a  vue.  Alors.  j'«i  dit  au  prisonnior; 
**  Tu  es  un  peu  en  train.,  tu  ferais  mieux  de  t'en  aller  chez  vous, 
car  on  pourrait  te  mettre  dedans  à  la  place  du  Canadien  que  tu 


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y  avoir  200 
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chez  Michel 
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it  il  se  Iroii- 
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de  30  sous, 
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pendre  :  "  ce 

n'«i  pas  vu 

prisonnier; 
'  chez  vous, 
dien  que  tu 


BEAURKGARD. 


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veux  défendre.  "  Je  voulais  alors  l'empêcher  de  se  rendre  en 
ville,  mais  il  ne  m'a  pas  écouté. 

Le  prisonnier  avait  l'habitude,  quand  il  se  trouvait  en  train^  de 
porter  sa  garcelte  dans  sa  poche.  Avant  de  partir,  le  prisonnier 
m'a  demandé  d'aller  chercher  mon  père  pour  jouer  aux  cartes. 
Gomme  je  n'y  allais  pas,  il  s'en  est  allé  en  se  dirigeant  du  côté 
du  marché  ;  c'est  dans  cette  direction  que  se  trouve  l'auberge  de 
Ijaflamme.  Le  prisonnier,  avant  de  partir,  m'avait  demandé  si  je 
voulais  aller  avec  lui  aux  cabanes  à  sucre,  où  nous  serions,  disait- 
il,  rendus  à,  minuit.    Je  n'ai  pas  revu  le  prisonnier  ce  soir-là. 

^jC  lendemain,  le  dimanche,  le  prisonnier  a  voulu  me  l^ire 
éveiller,  m'a  dit  ma  femme.  Beauregard  serait  ensuite  revenu 
chez  moi  une  seconde  fois,  puis  une  troisième.  Cette  fois,  je  l'ai 
vu.  Je  lui  dejcnandai  quel  avait  été  le  succès  de  sa  veillée  ;  il  m'a 
répondu  qu'il  était  allé  manger  un  steak  avec  Maurice,  Danse- 
reau  et  Charron.  Je  lui  ai  demandé  quel  était  ce  Charron.  11  me 
répondit  :  "  C'est  un  Charron  de  St.  Charles  ;  il  vend  des  mou- 
lins." Beauregard  m'a  invité  à  aller  chez  lui,  et  j'y  suis  allé. 
Là  le  prisonnier  dit  à  sa  femme  :  "  Ce  n'est  pas  Guertin  qui  a 
crié,  au  meurtre^  cette  nuit  ;  je  le  lui  ai  demandé,  et  il  m'a  dit  que 
ce  n'était  pas  lui.  "  J'ai  demandé  au  prisonnier  qui  lui  avait  dit 
qu'on  avait  crié  au  meurtre.  Le  prisonnier  m'a  dit  que  c'étaient 
des  nommés  Charron.  Ces  Charron  restent  à  St.  Hyacinthe,  de 
l'autre  côté  de  la  rivière.  En  sortant  de  chez  Beauregard,  la 
première  personne  que  j'ai  rencontrée  a  été  un  de  ces  nommés 
Charron.  Je  demeure  à  75  pieds  du  pont  environ.  J'avais  passé 
la  veillée  du  samedi  chez  Murchessault.  Ce  monsieur  demeure 
sur  le  bord  de  la  rivière.  Je  suis  revenu  de  chez  Marchessault 
vers  onze  heures  et  troi-i  quarts,  et  j'ai  passé  au  bout  du  pont. 

Dans  la  veillée,  vers  dix  heures  et  3  quarts,  j'ai  entendu  deux 
cris  de  détresse  ;  quand  le  premier  cri  a  été  entendu,  mon  père 
a  dit  "  Qui  c^esl  que  ça  ?"  Aussitôt,  on  a  ouvert  la  porte  et  on  a 
entendu  un  second  cri.  Ces  cris  n'étaient  pas  distincts,  mais  on 
voyait  que  c'était  la  voix  d'un  homme  en  pdne.  Ces  cris  venaient 
du  pont.  On  entendit  aussi  l'aboiement  des  chiens  dans  cette 
direction.  On  se  remit  ensuite  à  jouer  aux  cartes,  et,  après  une 
dizaine  de  minutes,  je  m'en  retournai  chez  moi.  Mon  père  et 
mon  frère  demeurent  chez  un  M.  Girard  près  du  pont,  et  du  côté 
Nord.     Ce  M.  Girard  a  un  chien. 

Par  M.  Drummond. — Marchessault  demeure  en  haut  du  pont. 
Pour  me  '"••idre  chez  moi,  j'ai  descendu  la  côte  qui  mène  au  pont; 
ma  demeure  est  à  environ  80  pieds  du  pont.  Beauregard  m'avait 
dit,  le  samedi  soir,  qu'il  viendrait  me  chercher  à  minuit  pour  aller 
rejoindre  ses  parents  à  la  sucrerie.  Je  n'ai  pas  été  surpris  de  voir 
Beauregard  chez  moi,  le  dimanche  matin,  de  bonne  heure  ;  il  était 
entendu  entre  nous  que  nous  irions  à  la  chasse,  de  bpnne  heure, 
ce  matin-là.  Nous  avions  l'habitude  de  chasser,,  soit  dans  le^do- 
maine,  soit  sur  le  bord  de  la  rivière,  dans  les  rapides  vis-à-vis  de 
la  ville. 

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JOSEPH  ST.  GERMAIN,  père.—Je  demeure  à  St.  Hyacin- 
the, près  da  pont  Biron.  Le  2  avril  dernier,  j'ai  passé  la  veillée 
chez  Thomas  Marchessault.  Je  suis  parti  avec  mon  fils,  vers  une 
heure.  Durant  la  veillée,  vers  dix  heures  et  demie,  j'ai  entendu 
un  cri  pitoyable  ;  alors  j'ai  dit  â  ceux  qui  se  trouvaient  avec  moi: 
**  Qui  c'est  que  ce  cri  là  ?  Ecoutons  aonc."  Et  nous  avons  en- 
tendu un  second  cri,  mais  plus  faible  que  le  premier.  Ces  cris 
venaient  du  bout  nord  du  pont.  De  chez  Marchessault  au  pont, 
en  ligne  droite,  il  peut  y  avoir  environ  deux  arpents  et  demi. 
Les  cris  que  j'ai  entendus  étaient  certainement  ceux  d'un  homme, 
mais  je  n'ai  pas  distingué  les  mots.  J'ai  aussi  entendu  japper  un 
chien  dan&  la  direction  du  pont.  Trois  semaines  avant  cette  épo- 
que, j'avais  vendu  une  terre  et  le  prisonnier  me  dit  alors  :  "  Père, 
ne  rôdez  pas  trop  avec  votre  argent  ;  pour  moi,  je  tuerais  un 
homme  comme  je  tuerais  un  rat,  pour  avoir  de  l'argent.  "  Je  lui 
répondis,  en  le  regardant  ;  "  Tu  es  bien  assez  crapaud  pour  le 
faire."  Il  me  répliqua  :  "  Vous  n'avez  qu'une  mort  à  mourir, 
père."  et  j'ajoutai  :  "  Tu  serais  bien  trompé  si  tu  me  tuais  ;  je 
n'ai  jamais  plus  de  deux  piastres  quand  je  sors." 

Par  M.  DrummoTid. — Qrand  j'ai  entendu  ces  deux  cris,  il  y 
avait  avec  moi,  chez  Marchessault,  M.  Girard  dit  Lazonne,  Joseph 
Marchessault,  et  Frs.  Viau.  Quand  je  suis  arrivé  che^.  moi, 
après  la  veillée,  il  était  une  heure,  et  j'étais  parti  un  des  premiers. 
J'ai  tenu  cette  conversation  avec  le  prisonnier,  chez  mon  fils, 
Narcisse  St.  Germain  ;  c'était  au  commencement  de  mai.  Je  vo- 
yais le  prisonnier,  et  je  jouais  souvent  aux  cartes  avec  lui.  Il 
était  ami  avec  mon  fils.  Lorsque  le  prisonnier  m'a  dit  ce  que 
j'ai  l'apporté,  j'ai  eu  peur.  Après  cette  conversation,  j'ai  loué  an 
beau-frère  du  prisonnier,  une  maison  que  le  prisonnier  devait  oc- 
cuper. J'ai  aussi  signé  une  requête  recommandant  le  prisonnier 
comme  étant  qualifié  pour  tenir  une  auberge  de  tempérance. 
Après  que  les  cris  eurent  été  entendus,  je  suis  resté  avec  les  au- 
tres un  peu  plus  de  deux  heures  chez  Marchessault. 

DENISE  DANSEREAU.— Je  demeure  maintenant  à  Ver- 
chères.— Le  2  avril  dernier,  je  restais  à  St.  Hyacinthe,  dans  une 
maison  qui  se  trouve  à  40  ou  60  pieds  du  pont,  du  côté  nord. 
Cette  maison  est  bâtie  sur  la  grande  rue.  Le  soir  du  2  avril, 
j'étais  chez  moi,  et  mon  mari,  Michel  Girard  était  allé  veiller. 
Louis  St.  Germain  se  trouvait  avec  moi.  Je  me  suis  couchée  vers 
10^.  h.  A  10  h.  85  minutes,  à  notre  horloge,  la  porte  de  la  n.ai- 
son  a  été  défoncée.  En  ce  moment,  je  ne  dormais  pas  encore  ; 
en  entendant  le  bruit,  je  me  suis  levée,  et  je  me  suis  aperçue  que 
la  porte  avait  été  enfoncée  ;  elle  était  toute  grande  ouverte,  quoi- 
que je  l'eusse  fermée  à  la  clef;  les  vis  avaient  été  arrachées  de  la 
serrure.  Je  n'ai  entendu  qu'un  seul  coup  qui  m'a  paru  être  un 
coup  de  pied,  j'ai  allumé  une  chandelle,  et  je  suis  allée  voir 
l'heure  ;  on  a  ensuite  réparé  la  porte,  ce  qui  a  pris  huit  ou  neuf 
minutes.  Alors  j'ai  entendu  plaindre^  ainsi  que  Louis  St.  Ger- 
main.   Je  suis  <}ertaîne  que  lea^ris  que  j'ai  entenduâtétaieut.  les 


BEAUEKGARO. 


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It.  Hyacîn- 
la  veillée 
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avec  moi: 

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Ces  cris 
It  au  pont, 
et  demi, 
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japper  un 
t  cette  épo- 
rs  :  "  Père, 
tuerais  un 
it.  "  Je  lui 
id  pour  le 

à  mourir, 
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X  cris,  il  y 
ne,  Joseph 
che^  moi, 
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mon  fils, 
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ec  lui.  Il 
dit  ce  que 
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devait  oc- 
prisonnier 
mpérance. 
^ec  les  au- 

it  à  Ver- 
I  dans  une 
3Ôté  nord, 
lu  2  avril, 
lé  veiller, 
ichée  vers 
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8  encore; 
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lées  de  la 
u  être  un 
ftllée  voir 
it  ou  neuf 
St.  Ger- 
'taient.les 


cris  d'une  personne  ;  ces  cris  venaient  du  côté  du  sud,  à  une  dis- 
tance d'environ  60  pieds  de  la  maison.  (Le  témoin  se  trou- 
vant indisposé,  le  Dr.  Beaubien  déclare  sous  serment,  qu'il  ne 
peut  continuer  sa  déposition  pour  le  moment  ) 

LOUIS  ST.  GERMAIN.— Le  2  avril  dernier,  je  demeurais  à 
St.  Hyacinthe,  chez  Michel  Girard  o\i  j'étais  en  service.  La  mai- 
son de  Gimrd  est  à  environ  60  pieds  du  pont.  J'ai  passé  la  veil- 
lée chez  Girard.  Il  y  avait  aussi  dans  la  maison  Mme.  Girard  et  sa 
servante.  Ce  soir  là,  le  magasin  a  été  fermé  à  8f  h.  et  M.  Gi- 
rard est  parti  avec  son  commis.  A  9i  h.  ou  9f  h.  je  suis  allé  me 
coucher  ;  je  dormais  quand  la  porte  a  été  défoncée.  Eveillé  par 
le  bruit,  je  me  suis  levé  et  je  suis  allé  voir  ;  j'ai  trouvé  la  porte 
défoncée.  J'ai  regardé  dehors,  mais  je  n'ai  rien  vu.  J'ai  fermé 
la  porte  avec  des  morceaux  de  bois.  Un  homme  qui  s'est  nom- 
mé Kennelly  ou  Connolly  est  venu  me  demander  une  chandelle. 
J'ai  ensuite  entendu  trois  cris  dans  la  direction  du  pont.  C'étaient 
des  cris  de  détresse.  J'étais  alors  sur  le  perron,  derrière  la  mai- 
son. J'ai  voulu  sortir,  mais  Mme.  Girard  qui  avait  peur  m^en  a 
empêché.  Le  chien  jappait  beaucoup  en  se  tournant  du  côté  de 
la  rivière.  Je  suis  allé  ensuite  à  la  porte  de  devant  ;  en  ce  mo- 
ment, j'ai  entendu  marcher  une  personne,  et  aussitôt  après,  une 
autre.  Ces  personnes  n'allaient  pas  dans  la  même  direction.  Le 
chien  qui  était  alors  sorti  revenait  en  jappant.  J'ai  demandé  à 
Mme.  Girard,  quelle  heure  il  était  ;  je  pense  qu'elle  m'a  répondu  : 
"10  h.  et  11  minutes."  Les  cris  venaient  du  côté  du  pont,  à 
cent  pieds  environ  de  la  maison.  Les  cris  étaient  de  la  même 
voix.  Ce  soir  là,  le  temps  étijit  clair  ;  il  y  avait  des  étoiles.  On 
pouvait  voir  un  homme  à  une  distance  de  150  ou  160  pieds. 

Par  M.  Carter. — Je  me  suis  rendu  à  la  porte  avant  que  la 
chandelle  fût  allumée.  Après  que  le  coup  qui  a  défoncé  la  porte 
eût  été  donné,  je  n'ai  pas  employé  plus  d'une  minute  pour  me 
rendre  à  la  porte.  Arrivé  à  la  porte,  j'ai  mis  la  tête  dehors  pour 
voir.  C'est  pendant  que  je  fermais  la  porte  qu'on  m'a  demandé 
une  chandelle.  La  personne  qui  s'est  nommée  Connolly  parais- 
sait contrefaire  sa  voix.  Je  refusai  de  donner  une  chandelle  ; 
alors,  j'ai  remarqué  que  la  personne  qui  me  l'avait  demandée  s'en 
allait.  Le  pont  n'est  pas  entourré  ;  il  y  a  des  gardes-fous.  Du 
perron  de  la  porte  de  derrière,  des  bâtisses  et  une  clôture  de  12 
pieds,  empêchent  de  voir  le  pont  ;  mais  on  peut  voir  le  moulin  qui 
se  trouve  au  côté.  Je  crois  qu'il  était  minuit  moins  un  quart 
quand  Girard  est  arrivé. 

DENISE  DANSEREAU.~(Ce  témoin  est  appelé  pour  la  se- 
conde fois).  Les  cris  paraissaient  venir  de  dessus  le  pont.  Lors- 
que Louis  St  Germain  est  allé  à  la  porte  de  derrière,  je  suis  allée 
avec  lui. 

Par  M.  Carter — .Lorsque  la  porte  eût  été  enfoncée,  j'ai  enten- 
du la  voix  d'une  personne  qui  voulait  entrer.  Cette  personne 
contrefaisait  sa  voix.    Je  ne  l'ai  pas  reconnue. 

MICHEL  GIRARD.-^Je  demeuraisà  St.  HyacintJie  le  2  avril 


18 


pirocÈs 


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dernier.  Ce  jour  là,  j*ai  passé  la  veillée  chez  M.  Thomas  Marches- 
sault.  Pendant  que  j'étais  à  parler  avec  deux  autres  personnes, 
des  cris  ont  été  entendus.  On  a  ouvert  k  porte.  J'ai  alors  en- 
tendu les  aboiements  d'un  chien  et  je  crois  que  c'étaient  les  aboie- 
ments de  mon  chien.  11  passait  minuit,  quand  je  suis  sorti  de 
chez  Marchessault  pour  retourner  chez  moi.  Chez  moi,  on  m'a 
raconté  ce  qui  s'y  était  passé.  J'ai  été  surpris  de  voir  que  ma 
porte  avait  été  défoncée. — Le  8  avril,  après  la  messe,  je  parlais 
avec  quelqu'un,  à  ma  porte,  lorsque  je  vis  passer  Beauregard.  Je 
l'arrêtai  et  je  lui  dis  que  ma  porte  avait  été  enfoncée  la  veille  et 
que  je  ne  pensais  pas  avoir  des  ennemis  assez  méchants  pour  le 
faire.  Beauregard  me  répondit  que  ce  ne  devait  pas  être  des  gens 
sobres  qui  avaient  fait  le  coup.  "  Quant  à  moi,  ajouta-t-il,  je  pense 
que  ce  sont  des  personnes  ivres  qui  ont  commis  cette  faute."  Le 
lundi,  il  y  avait  encan  chez  Mme.  Dumaine  qui  demeure  de  l'au- 
tre côté  ae  la  rivière  ;  je  m'y  rendis  et  de  là  j'allai  voir  le  prison- 
nier chez  lui,  pour  lui  demander  cinq  piastres  et  trente  sous  qu'il 
me  devait.  Le  prisonnier  me  dit  que,  dans  le  moment,  il  ne  pou- 
vait me  rembourser  cette  somme,  son  intention  étant  d'acheter 
une  licence  pour  vendre  des  boissons  fortes.  Il  me  dit  aussi  qu'il 
avait  juste  la  somme  nécessaire  à  cet  achat,  qu'elle  lui  avait 
été  prêtée  par  un  ami,  et  qu'il  me  payerait  ce  qu'il  me  devait  dès 
qu'il  aurait  gagné  un  peu  d'argent. 

Par  M.  Druramond.-La  distance  entre  ma  demeure  et  celle  de 
Marchessault  est  de  6  à  7  arpents. — Entre  nos  deux  maisons,  il  y 
.aune  dfa/ne.— C'est  en  arrivant,  la  nuit,  que  j'ai  trouvé  la  porte  de 
ma  maison  enfoncée  ;  aucun  châssis  n'avait  été  brisé.  Je  parlai  de 
cet  incident  à  St.  Germain  qui  me  dit  qu'une  personne  s'appelant 
Connolly  était  venue  demander  une  chandelle,  mais  il  ne  pensait 
pas  que  c'était  lui  qui  avait  enfoncé  la  porte. — Je  ne  fus  pas 
étonné  en  entendant  le  prisonnier  me  dire  que  c'était  probable- 
ment des  personnes  ivres  qui  avaient  enfoncé  la  porte  de  ma 
maison.  Lorsque  Beauregard  me  dit  cela,  je  pense  que  M.  St. 
Germ:iin,  père,  et  quelques  autres,  étaient  avec  moi. 

J.  B.  CHARROM. — Je  demeure  à  St.  Hyacinthe  à  un  demi  ar- 
pent du  pont.  Le  2  avril,  au  soir,  j'étais  chez  moi  ;  je  jouais  aux 
cartes  avt'c  ma  femme  et  mon  neveu.  Vers  dix  ou  onze  heu- 
res, jVntvMuîis  au  dehors  deux  ou  trois  cris  ;  je  demandai  à  ma 
femme  si  le  fi'U  était  en  ville  ou  si  quelqu'un  se  battait.  Je  suis 
sorti  et  j'ai  entendu  deux  forts  cris  "  au  meurtre  !  au  meurtre  ! 
Mon  voisin  étant  aussi  sur  sîx  porte,  je  lui  demandai  ce  que  c'é- 
tait ;  il  me  répondit  que  l'on  se  battait.  J'aurais  désiré  aller  voir 
ce  qui  se  passait,  m  lis  j'ét.iis  nu-pieds.  Nous  reprîmes  notre  par- 
tie de  cartes  interrompue.  Les  cris  que  j'avais  entendus  venaient 
dans  la  direction  du  pont  Biron.  Je  n'ai  pas  reconnu  la  voix  de 
celui  qui  a  crié. 

Par  M.  Carter. — Mon  neveu  s'appelle  Xavier  Charron.  11  s'est 
écoulé  2  ou  3  minutes  entre  chaque  cri.  La  distance  de  chez  moi 
au  bout  dii  poiit  est  d'environ  4  cil  ô  arpents. 


^ler, 
ton 
le  r 
renii 
ires. 
Il  me 
mvec 


BEAtTREOARD. 


19 


is  Marches- 
personnes, 
ai  alors  en- 
it  les  aboie- 
is  sorti  de 
noi,  on  m*a 
oir  que  ma 
B,  je  parlais 
regard.  Je 
la  veille  et 
nts  pour  le 
re  des  gens 
-il,  je  pense 
faute.*'  Le 
ire  de  l'au- 
r  le  prison- 
)  sous  qu'il 
,  il  nepou- 
t  d'acheter 
aussi  qu'il 
le  lui  avilit 
devait  dès 

et  celle  de 
laisons,  il  y 
la  porte  de 
e  parlai  de 
s'appelant 
ne  pensait 
Qe  fus  pas 
probable- 
)rte  de  ma 
ue  M.  St. 

»  demiur- 
jouais  aux 
onze  heu- 
ndai  à  ma 
;.  Je  suis 
i  meurtre  ! 
■e  que  c'é- 
aller  voir 
notre  par- 
3  venaient 
la  voix  de 

>n.  11  s'est 
chez  moi 


NOËL  LUSSIER.— Je  demeure  à  St.  Charles.  Le  9  avril  der- 

ier,  je  suis  allé  à  St.  Hyacinthe  où  j'appris  en  arrivant  que  Char- 

on  était  disparu.     D'après  les  informations  que  j'avais  prises,  je 

e  rendis  avec  le  chef  de  police  Page  à  l'hôtel  Guertin  où  je  fis 

enir  le   prisonnier  et  où  nous  mangeâmes  un  steak  aux  hui- 

res.  Je  demandai  à  Beauregard  ce  qu'il  avait  fait  de  Charron  : 

Il  me  répondit  qu'il  ne  l'avait  pas  vu   depuis   qu'il  avait  mangé 

^vec  lui  dans  ce  même  hôtel.     Je  lui  demandai  alors  s'il  était 

%oûî  ce  soir  là,  car  la  police  m'avait  dit  l'avoir    rencontré  avec 

Charron,  après  qu'il  eût  mangé  avec  lui  dans  l'hôtel.    Le  prison- 

jiier  me  répondit  qu'il  n'avait  pas  été  ivre  lorsqu'il  s'était  trouvé 

|ivec  Charron.     Je  lui  dis  alors  quïl  n'avait  pas  dit  la  vérité,  car 

tn  homme  de  police  m'avait  dit  l'avoir  rencontré  avec  Charron, 

vers  les  dix  heures,  bras  dessus  bras  dessous,  et  que  je  ne  pen- 

jsais  pas  que  Fontaine  m'eût  conté  des  mensonges.     Le  prison- 

*  ier  continua  à  nier  ce  que  je  lui  disais.  Je  fis  alors  entrer  Fon- 

aine  qui  dit  au  prisonnier  qu'il  l'avait  rencontré  avec  Charron  se 

irigeant  tous  deux  vers  le  pont,  et  que  quand,  lui.   Fontaine, 

jp,vait  demandé  au  prisonnier  où  il  allût,  ce  dernier  n'avait  rien 

épondu.  Je  dis  alors  au  prisonnier  :  "  Voyons,  Beauregard,  qu'as- 

u  fait  de  Charron  ?"    Le  lendemain  de  cet  entretien  avec  le  pri- 

onnier,  je  visitai  le  pont  Biron,  et  je  m'aperçus  qu'il  y  avait,  entre 

la  2me  et  la  3me  arcade,  5  ou  5^  pieds  d'eau.     Lorsque  l'eau  est 

haute,  il  y  a  là  un  fort  rapide.    En  descendant  le  courant,  on 

trouve  une  dame  en  bas  du  pont.    L'eau  passait  sur  cette  ciame 

Il  une  hauteur  de  deux  pieds  et  demi  environ.    Je  me  suis  rendu 

compte  du  fil  de  l'eau  en  jetant  un  morceau  de  bois  entre  la  2me 

et  la  3me  arcade  du  pont  ;  le  morceau  de  bois  a  gagné  le  large 

du  côté  du  sud.  Le  corps  du  défunt,  lancé  du  pont,  pouvait  fort 

bien  aller  en  pleine  rivière  jusque  chez  M.  Cadoret.  Un  peu  avant 

que  le  cadavre  fut  retrouvé,  on  avait  ouvert  les  pelles  du  moulin 

qui  se  trouve  au-dessus  du  pont,  afin  de  faire  lever  le  corps,  que 

l'on  croyait  dans  les  rapides. 

Par  M.  Drummond. — Le  prisonnier  m'a  dit  qu'il  n'avait  pas  vu 
Charron  depuis  qu'ils  avaient  mangé  des  huîtres  ensemble,  chez 
Guertin,  vers  huit  heures,  le  soir. — J'ai  commencé  à  saîner  pour 
trouver  le  corps  de  Charron  le  10  avril,  et  j'ai  continué  les  jours 
suivants. 

GEORGE  FRED.  AUSTIN.— Arpenteur.— J'étais  à  St.  Hya- 
cinthe le  2  avril  dernier. — Je  connais  bien  la  rivière  dans  les  envi- 
rons du  pont  Biron,  j'en  ai  même  dressé  deux  plans.  La  disttmce; 
de  la  rue  Cascade  au  côté  Sud,  est  d'environ  800  pieds.  Le  pont, 
est  en  bois,  lia  hauteur  du  pont,  à  partir  de  l'eau,  est  d'environ 
onze  pieds;  sa  largeur  est  de  22  pieds. — J'étais  à  St.  Hyacinthe, 
lorsqu'on  a  fait  des  recherches  pour  retrouver  Charron. — Depuis 
le  jour  du  meurtre,  on  a  posé  un  nouveau  portage  au  pont;  à  part 
cela,  il  est  le  même.  5Si  on  laissait  passer  l'eau  entre  la  seconde 
et  la  troisième  arcade,  le  courant  pourrait  certainement  entraîner 
un  cadav*'e  jusque  chea  Cadoçet.    , 


20 


PROCÈS 


Par  M.  Carter. — Je  ne  pense  pas  qu'un  homme  puinse  passer 
à  travers  les  gardes-corps,  en  traversant  le  pont  Biron.  Sur  ce 
pont,  il  y  a  des  madriers,  qui  sont  plus  longs  les  uns  que  les  au- 
tres; il  y  a  deux  endroits  où  les  madriers  ne  vont  pas  jusqu'au 
garde-corps.  Au  meilleur  de  ma  connaissance,  je  «uis  passé,  le  2 
avril,  sur  ce  pont,  vers  onze  heures  moins  dix  ;  j'ai  rencontré  un 
homme  qui  allait  du  côté  nord  de  la  rivière  ;  il  était  près  de  la  hui- 
tième arcade,  à  compter  du  côté  sud. 

Par  M.  Johnson. — Je  ne  puis  pas  dire  quel  était  cet  homme, 
mais  j'ai  pensé  que  c'était  le  prisonnier.  J'étais  avec  ma  femme; 
elle  en  a  eu  peur;  elle  trouvait  qu'il  avait  mauvaise  mine. 
J'  Par  la  Cour. — Les  trous  dont  j'ai  parlé,  qui  sont  formés  par 
les  madriers  qui  ne  vont  pas  just^u'au  garde-corps,  ne  sont  pas 
assez  grands  pour  qu'un  homme  puisse  passer  à  travers. 

JEAN  TURCOTTE— Je  suis  meunier  au  moulin  de  M.  Des- 
saulles. — Le  jour  que  le  corps  a  été  trouvé,  j'avais  ouvert  les  peU 
les,  pour  faire  échapper  l'eau  ;  je  pense  que  c'est  cela  qui  a  eu 
l'effet  de  faire  lever  le  corps.  Une  personne  tombée  à  l'eau  sous 
la  8me  arcade,  aurait  été  conduite,  là  où  on  a  trouvé  Charron. 

MADAMhi  DESMARAI^.  (Rosalie  Tétreau).— Je  suis  restée 
13  jours  à  St. ,  Hyaeïnthe,  chez  Ducharme,  aubergiste,  vers  le  2 
avril.  .J'ai  vu  le  prisonnier  chez  Ducharme,  le  lundi  matin  quia 
suivi  le  2  avril.  Ce  jour-là,  le  2  avril,  j'ai  vu  Beauregard  deman- 
der de  la  boisson  à  crédit  à  M.  Ducharme.  Il  a  dit  à  ce  dernier 
qu'il  aurait  de  l'argent  pour  le  payer,  le  jour  même,  d'une  person- 
ne qui  en  avait  beaucoup  ;  qu'il  eu  aurait  même  pour  avoir  sa 
licence.  Le  soir  de  ce  jour-là,  j'ai  remarqué  que  le  prisonnier 
avait  une  petite  corde  au  poignet,  tenant  à  quelque  chose  qu'il 
avait  dans  son  surtout.  Le  lundi  matin,  il  est  revenu  demander 
de  la  boisson,  disant  que  cette  fois  il  avait  de  l'argent,  pour  la 
payer,  et  même  pour  payer  sa  licence  ;  et  il  a  fait  venir  une  traite 
de  huit  verres. — Il  y  avait  là  un  M.  Guertin. — Le  prisonnier  lui 
a  dit  :  "  Je  t'ai  rencontré  samedi  sur  le  pont,  à  onze  heures  ;  m'as- 
tu  reconnu?"  Guertin  a  répondu  :  "  Peut-être."  Le  prisonnier  a 
repris  :  "  As-tu  été  pogné  sur  le  pont,  et  est-ce  toi  qui  a  crié  au 
meurtre  ?"  Guertin  a  répliqué  :  "  J'ai  été  pogné  un  autre  jour, 
mais  non  pas  samedi"  Beauregard  a  ajouté  :  "Comme  je  reve- 
nais sur  le  pont,  rendu  au  bout,  du  côté  de  la  ville,  je  crois  avoir 
entendu  crier  au  meurtre  ;  ce  sont  peutrêtre  mes  oreilles  qui  ont 
fait  cela." 

Par  M.  Drùmmond. — La  conversation  que  j'ai  rapportée  plus 
haut,  a  eu  lieu  vers  huit  heures  et  demie,  le  lundi  matin.  Dans 
ce  moment,  Guertin  était  en  train. 

SARSFIELD  N.  NAG LE.— J'étais  à  St.  Hyacinthe,  dana 
une  maison  située  au  bout  du  pont,  au  Sud,  le  2  avril  dernier. — 
Entre  dix  et  onze  heures  du  soir,  je  suis  sorti  de  la  maison  ;  j'ai 
entendu  des  cris  venant  du  pont  ;  j'ai  regardé  et  j'ai  aperçu  un 
objet  que  je  n'ai  pu  distinguer  ;  le  bruit  que  j'ai  entendu  m'a 
fUi  croire  qu'il  y  avait  un^  voiture  auplusierrs  personnes^  sur  le 


BEAVRBOÂRD. 


SI 


e  puisgo  passer 
Biron.  Sur  c« 
ma  que  les  au- 
t  pas  jusqu'au 
suis  passé,  le  2 
li  rencontré  un 
près  de  la  hui- 

it  cet  homme, 
Bc  ma  femme  ; 
e  mine, 
nt  formés  par 
J,  ne  sont  pas 
avers. 

lin  de  M.  Des- 
)uvert  les  pel. 
cela  qui  a  eu 
c  à  Teau  sous 
j  Charron. 
Je  suis  restée 
ste,  vers  le  2 
ii  matin  qui  a 
égard  deman- 
à  ce  dernier 
l'une  person- 
ne ur  avoir  sa 
e  prisonnier 
e  chose  qu'il 
lu  demander 
?ent,  pour  la 
lir  une  traite 
•risonnier  lui 
eures  ;  m'as- 
prisonnier  a 
iui  a  crié  au 
autre  jour, 
nmeje  reve- 
8  crois  avoir 
ailles  qui  ont 

►portée  plus 
atin.    Dans 

inthe,  dans 
l  dernier. — 
naison  ;  j'ai 
aperçu  un  jî 
ntendu  m'a 
nnes^  sur  le 


ont. — Ces  cris  me  paraissaient  venir  d'une  personne  en  dé- 
rease.  Lorsque  j'ai  été  sur  le  pont,  Tobjet  en  question  gagnait 
u  côté  de  la  ville. — Le  lendemain  matin,  dimanche,  j'ai  vu,  vers  4 
eures,  le  prisonnier  à.  l'autre  bout  du  pont,  tenant  quelque  cho- 
ie. Une  heure  phis  tard,  j'ai  encore  vu  Bcauregard,  vers  le  mi- 
ieu  du  pont. — L'objet  qu'il  tenait  dans  la  main  pouvait  être  un 
4rusil. 

F.  X.  CHARRON— J'étais  chez  mon  oncle,  à  St  Hyacinthe, 
Jje  soir  du  2  avril  dernier.  Nous  étions  à  jouer  aux  cartes.  Entre 
^ix  et  onze  heures,  j'ai  entendu  trois  cris;  nous  sommes  sortis, 
et  j'ai  entendu  crier  deux  fois  :  mi  meurtre  !  au  meurtre  !  ces  cris 
«yenaient  du  pont,  du  côte  du  village. — Le  lendemain  qui  était 
lin  dimanche,  je  suis  allé  vers  l'endroit  d'où  étaient  venus  les  cris. 
J'ai  vu  une  tache  de  sang  sur  le  petit  pont,  celui  qui  communi- 
jque  du  pont  Biron  au  moulin  de  M.  Dessaulles. 
.  Par  M.  Drummond. — La  tache  de  sang  que  j'ai  vue  était 
plutôt  près  du  pont  Biron,  que  près  du  moulin. — Je  n'ai  pas  vu 
pe  san^  sur  le  grand  pont. 

JULIEN  MIMËAU. — Ma  maison  est  située  sur  la  rue  Casca- 
de et  fait  face  au  pont. — J'étais  chez  moi,  dans  la  soirée  du  2 
pvril,  et  jo  me  suis  couché  vers  10  heures.  Le  dimanche,  8  avril, 
je  suis  sorti  de  ma  chambre  vers  5  heures  du  matin. — Je  me 
fiuis  rendu  à  ma  porte  de  sortie. — J'ai  aperçu  Beauregardaucoin 
du  pont  ;  quand  il  m'a  vu,  il  s'est  mis  à  marcher  allant  à  peu 
prèsjusqu'aux  trofs  quarts  du  pont  et  revenant  ensuite. — Il  a  fait 
trois  voyages  comme  cela  en  regardant  sur  le  pont  et  à  côlé 
du  pont  ;  une  fois  il  s'est  penché  pour  voir  en  bas  du  pont. 
Dans  ce  temps,  il  faisait  assez  clair  pour  voir  de  l'autre  côté  de  la 
rivière. — Le  prisonnier  avait  un  fusil  à  la  main. — Je  ne  sache 
pas  qu'il  y  ait  du  gibier  dans  cette  partie  de  la  rivière. — Le  8 
avril,  j'ai  vu  une  tache  de  sang  sur  le  pont  Biron  à  la  deu- 
xième arcade  à  peu  près. — \  la  troisième?  arcade,  il  y  avait  une 
-barre  du  garde-corps  qui  était  partie.  C'est  le  8,  que  j'ai  fait 
cette  dernière  remarque.  Le  dimanche  matin,  3  avril,  j'ai  vu 
aussi,  après  quatre  heures,  Lusignan  aller  sur  le  pont. 

NARCISSE  HOBITAILLE.— J'étais  ù,  St.Hyacinthe  le  2  avril 
dernier. — Pendant  la  veillée,  je  suis  allé  chez  Guertin  et  chez 
Laflamme.  Il  était  9h.  moins  15m.  quand  je  suis  allé  chez  La- 
flamme  avec  M.Guitté,  propriétaire  du  Courrier  de  St.  Hyacinthe, 
Il  était  ll^h.  quand  je  suis  parti  de  chez  Laflamme.  J'y  ai  vu  le  pri- 
sonnier et  Charron.  Je  ne  les  ai  pas  observés  particulièrement  ; 
vers  9h.  ils  étaient  tous  deux  dans  la  barre.  Je  ne  sais  pas 
quand  ils  sont  partis.  Je  ne  pense  pas  qu'ils  fussent  encore 
chez  Laflamme  quand  je  suis  parti  à  ll^h.;  au  moins,  je  ne  les  ai 
pas  aperçus. — Je  les  ai  vus  plusieurs  fois  durant  la  veillée,  pen- 
dant que  j'étais  là. —  Je  ne  les  ai  pas  vu  boire. 

Par  M.  Carter. — J'ignore  à  quelle  heure  ils  sont  entrés  et  s'ils 
sont  entrés  ensemble,-T-Je  ne  les  ai  pas  vus  chez  Guertin  — Je 
GQnoais  Félix  Fontaine,  homme  de  police  et  témoin  déjà  en- 


22 


C  f^À 


PROCÈS 


«  r.. 


tendu. — Je  ne    pourrais  dire    quel  est    le   caractère  de  cet 
homme. 

JOSEPH  CHATEL.— Je  demeurais  à  St.  Hyacinthe,  le  2 
avril  dernier. — Le  dimanche  matin,  8  avril,  je  passais  sur  le  pont 
Birun,  et  j'ai  été  surpria  de  voir  du  sang  sur  le  pont,  ù  90  pieds 
do  rembarquement  près  de  la  troisième  arcade.  Le  sang  était 
frais;  j'étais  seul  et  jem\>n  allais  alors  à  Téglise  pour  la 
basse  messe.  Le  sang  était  répandu  par  placards  de  distance 
en  distance.  J'ai  vu  une  pierre  ronde,  grosse  comme  le  poing, 
prés  de  ce  sang.  En  voyant  cette  pierre,  j'ai  pensé  que  le  meur- 
tre  avait  été  commis  avec  cette  pierre. 

Par  M.  Carter. — Il  était  bien  facile  aux  personnes  qui 
passaient  sur  le  pont  de  voir  ce  sang.  Au  bout  de  huit  jours,  le 
sang  était  efface. — J'ai  vu  ce  sang  tout  le  jour  dont  j'ai  parlé. 

NELSON  HUGUES.— Je  suis  de  St.  Hyacinthe  et  je  connais 
le  prisonnier.  Le  2  avril  dernier,  je  passais  sur  le  Pont  Biron 
avec  un  nommé  Simard  ;  le  prisonnier  nous  rejoignit  et  comme 
on  parlait  d'un  irlandais  qui  avait  été  pris  par  la  police,  la  veille, 
le  prisonnier  a  tiré  une  garcette  de'sa  poche,  et  en  donnant  un 
coup  sur  le  pont,  il  dit  :  "  S'il  en  venait  un  pour  me  prendre  je  lui 
ferais  ça." — Cette  garcette  était  formée  d'un  bout  de  câble  au  bout 
duquel  il  y  avait  quelque  chose  de  dur  et  qui  frappait  bien  fort. 
,  FABIEN  MIME  AU— est  de  nouveau  appelé  dans  la  boîte  des 
témoins. 

Par  M.  Drummond. — J'avais  oublié  de  dire,  à  propos  des  trois 
voyages  que  le  prisonnier  a  faits  sur  le  pont  Biron,  qu'il  était 
allé  sur  le  petit  pont  qui  communique  du  grand  pont  au  moulin 
et  qu'il  s'y  était  arrêté  à  peu  près  une  minute  et  demie,  près  de 
l'endroit  où  j'ai  remarqué  cette  tache  de  sang,  le  mardi  5  avril 
dernier. 

DENISE  DANSEREAU— est  rappelée. 

Par  M.  Carter. — J'ai  mis  7  ou  8  minutes  pour  n7e  rendre  de  ma 
chambre  à  la  porte  lorsque  celle-ci  a  été  défoncée.  Je  m'en  suis 
allée  ensuite,  dans  la  salle  à  diner  qui  est  sur  le  derrière  de  la 
maison. 

JOSEPH  LUSIGNAN. — Je  suis  en  ce  moment  prisonnier  à 
Montréal.  Je  demeurais  à  St.  Hyacinthe,  le  2  avril  dernier.  Je 
connaissais  le  prisonnier  depuis  une  dizaine  d'années.  Le  jour  en 
question,  j'ai  vu  le  prisonnier  plusieurs  fois  ;  entr'autres,  sur  le 
marché  de  St.  Hyacinthe  vers  2  h.  après  raidi. — Je  suis  alléchez 
Laflamme,  dans  la  veillée  vers  dix  heures  ;  avant  d'y  aller  je  n'a- 
vais pas  pa''lé  au  prisonnier.  Quand  je  suis  entré  chez  Lnflamme 
il  y  avait  là  MM.  Paillon,  Maurice,  Robitaille,  L'heureux,  Civa- 
lier,  Quitté,  Soly,  Charron  et  le  prisonnier,  On  a  éteint  la  chan- 
delle deux  ou  trois  fois.  J'ai  vu  le  prisonnier  tenant  Charron  par 
le  bras  ;  il  voulait  l'amener  coucher  chez  lui  ;  une  couple  de  lois 
le  prisonnier  a  dit  au  témoin  :  "  Viens  chez  moi,  tu  seras  bien." 
Ite^prjfwnnier  aj»US8,ijlemandé..â.  Charroa  de  .r<urgeût  à-emproin- 
tér/disant  que  c'était  pour  payer  sa  licence;  il  s'est  retourné  vers 


ui 
J' 
m 
A 


BKAUREOARD. 


2S 


ctère  de  cet 

i'ncinthe,  le  2 
is  sur  le  pont 
lit,  à  90  pieds 
iC  sang  était 
lise  pour  la 
■  de  distance 
ime  le  poing, 
que  le  lueur- 

'sonnes  qui 
huit  jours,  le 
ont  j'ai  parlé, 
et  je  connais 
e  Pont  Biron 
nit  et  comme 
ilice,  la  veille, 
Q  donnant  un 
prendre  je  lui 
câble  au  bout 
lit  bien  fort. 
s  la  boîte  des 

pos  des  trois 
on,  qu'il  était 
nt  au  moulin 
emie,  près  de 
mardi  5  avril 


rendre  de  ma 
Je  m'en  suis 
errière  de  la 

prisonnier  à 

dernier.    Je 

Le  jour  en 

lutres,  sur  le 

uis  allé  chez 

aller  je  n'a- 

3Z  Lnflamme 

ureux,  Civa- 

eint  la  chan- 

Charronpar 

uple  de  fois 

seras  bien." 

ià.€inpr.un- 

stourné  vers 


moi  en  disant  :  "  De  l'argent,  de  force  ou  autrement,  j'en  aurai 
toujours  ban  ;"  Il  m'a  demandé  30  sous  et  je  lui  ai  dit  que  je  n'en 
avais  pas.  Alors  il  a  demandé  ù  Charron  :  "  Qui  paie  la  traite 
de  nous  deux  ?"  I^e  défunt  a  dit  :  "  C  est  moi,"  et  il  a  tiré  un  30 
sous  de  sa  p^tche.  M.  liuflamme  a  amené  4  verres,  un  pour  moi, 
un  pour  M.  Civalier,  un  pour  Charron  et  un  pour  le  prisonnier. 
J'ai  remarqué  que  Beaurcgard  portjiit  une  garcslte;  il  nous  la 
montra  en  disant  :  "  C'est  avec  cela  que  je  mouche  "  les  hommes. 
Alors  je  suis  sorti  de  chez  Latlamme  par  la  porte  de  cour,  et  je 
me  suis  rendu  vis-à-vis  de  chez  M.  Barnes,  à  un  arpent  de  chez 
Laflamme,  dans  la  direction  opposée  au  pont  Biron.  Ensuite,  je 
suis  retourné  sur  mes  pas  dans  la  rue  Cascade,  et  j'ai  passé  de- 
vant chez  Laflamme.  J'ai  vu  Beauregard  et  Charron  allant  du 
côté  du  pont  ;  je  lus  ai  suivis  à  50  pieds  de  distance.  Le  prisonnier 
tenait  Charron  par  le  bras  gauche  ;  vis-à-vis  la  maison  de  feu  M. 
Brunelle,  Charron  est  tombé;  le  prisonnier  l'a  relevé  brusque- 
ment. Ensuite,  ils  ont  pris  le  pont,  allant  du  côté  du  sud.  J'ai  tra- 
versé le  petit  pont  '>t  je  me  suis  accoté  sur  le  moulin  de  M.  Des- 
saulles.  Vers  la  deuxième  ou  la  troisième  arcade,  je  les  ai  vus 
s'arrêter;  le  prisonnier  a  levé  la  main  sur  Charron  ;  alors  Char- 
ron a  crié  :  "  Tue  moi  pjis  !  Tue  moi  pas  !"  et  il  a  écrasé.  Dans 
ce  n»  ornent,  j'ai  entendu  un  chien  japper  près  d'eux.  J'ai  traversé 
le  pont  et  je  me  suis  accoté  sur  la  maison  de  feu  M.  Brunelle. 
J'ai  vu  le  prisonnier  peser  sur  Charron,  pendant  environ  2  minu- 
tes, le  prendre  et  le  jeter  à  l'eau.  Le  prisonnier  est  alors  venu 
vers  moi  et  il  m'a  reconna.  Il  m'a  dit:  '•  Est-ce  toi,  Lusignan?* 
"  Oui,"  ai-je  répondu,  "  bien  que  trop  pour  ton  malheur,"  "  îSi  tu 
as  le  malheur  d'en  parler  "  m'a  dit  le  prisonnier,  "je  t'en  ferai  au- 
tant.'* Il  m'a  dit  cela  3  ou  4  fois.  J'ai  dit  au  prisonnier  :  "  Beau- 
regard,  je  ne  te  déclarerai  pas."  Alors  il  me  dit  :  '•  Si  je  ne  te 
connaissais  pas  pour  un  homme  pas  bavard,  je  ne  te  laisserais 
pas."  Nous  avons  ensuite  marché  un  bout  ensemble,  le  prison- 
nier et  moi.  Beauregard  m'a  donné  dix  chelins  en  30  sous.  Je  ne 
voulais  pas  prendre  ces  30  sous,  mais  le  prisonnier  m'a  dit  :  "  Si 
tu  ne  les  prends  pas,  tu  mourras  comme  je  viens  de  faire."  J'ai 
pris  son  argent  par  crainte.  Arrivés  à  la  maison  de  (^adoret,  nous 
nous  sommes  séparés  et  je  n'ai  ptis  vu  quelle  direction  a  prise  le 
prisonnier  ;  je  ne  l'ai  revu  que  le  lendemain,  vers  six  heures  et 
demie,  à  la  maison  de  M.  Uogue.  J'ai  demandé  à  la  fille  de  me 
verser  un  coup,  et  j'en  ai  offert  un  au  prisonnier.  Nous  avons 
pris  un  coup  ensemble  ;  c'est  moi  qui  ai  payé.  Nous  étions  pour 
sortir  de  l'auberge,  mais  Beauregard  m'a  retenu  par  le  brus  et 
m*a  montré  des  rouleaux  d'argent.  Parmi  cet  ar/jfent,  j"ai  vu  un 
dix  piastres  en  or.  Il  m'a  semblé  que  le  prisonnier  avait  £20  ou 
25  ;  il  médit:  "J'en  ai  de  reste  pour  payer  ma  licence,  s'ils  me 
l'accordent."  Puis,  nous  nous  sommes  laissés.  Le  mardi  ou  le 
mercredi  de  la  semaine  suivante,  j'ai  rencontré  le  prisonnier  chez 
un  M.  Benoit;  il  me  dit:  "Fuis  le  mort,  ou  bien  lu  mourras  "et 
je  œ  l'ai  plus  revu  qu*au  bout  de  huit  jours,  quand  il  a  été  pris. 


ft 


A. 


^ai  dénoncé  le  prisonnier  quand  M.  Délisle  est  venu  à  St.  Hya- 
cinthe. Quelques  jours  avant  le  2  avril,  Beauregard  m'avait  dit 
qu'il   avait  loué  une  maison  pour  tenir  une  auberge,  ajoutant: 

"J'ai  payé  un  gros  prix  ;  j'ai  besoin  de  caresser  quelques  grosse» 
bourses."  il  me  dit  qu'il  en  connuissmt  plusieurs. 

-^'  Par  M.  Carter. — Dans  le  mois  dWril,  je  demeurais  sur  la  rue 
Cascade,  trois  ou  quatre  arpents  plus  bas  que  chez  Laâamm«. 
Quand  je  suis  allé  chez  Laflamme  le  2  avril,  j'arrivais  de  chez 
MoDsaette  le  charretier  où  je  m'étais  rendu  en  sortant  de  chez 
moi.  Il  pouvait  être  dix  heures  quand  je  suis  entré  chez  Laflam- 
me.  On  se  chicanait  dans  cette  maison.  J'y  suis  resté  environ 
une  heure.  C'ost  Félix  Robitaille  qui  a  éteint  la  chandelle.  (  On 
demande  au  témoin  s'il  n'a  pas  dit  devant  le  coroner  qu'il  ne  savait 
pas  qui  avait  éteint  la  chandelle,  et  il  répond,  non.  La  déposi- 
tion prise  devant  le  coroner  est  produite,  et  il  y  est  dit  que  le  té- 
moin ne  sait  pas  qui  avait  éteint  la  chandelle.)  Vous  dites,  main- 
tenant que  c'est  Robitaille  qui  éteignit  la  chandelle,  et  que  Mau- 
rice l'a  allumée  ;  n'avez  vous  pas  dit  dans  votre  déposition  prise 
devant  le  coroner:  "Maurice  éteignit  la  chandelle  et  les  autres 

'  furent  éteintes,  sans  que  je  puisse  dire  par  qui  1"— Je  pense  avoir 
déclaré  cela.  C'est  après  que  les  t'handeïles  furent  éteintes  que 
la  traite  dont  j'ai  parlé  a  été  prise*  Avant  de  m'avancer  pour 
prendre  cette  traite,  j'étais  dans  la  salle.  Autant  que  je  puis  me 
rappeler,  on  n'a  pris  alors  4u'une  traite  de  4  verres.  II  n'y  avait 
pas  d'autres  personnes  dans  la  barre  que  celle  qui  ont  bu.  Je 
n'avais  pas  parlé  de  cette  traite  dans  ma  déposition.  (On  lit  cette 
partie  de  la  déposition  du  témoin  donnée  devant  le  coroner  :  "  La 
traite  fut  bue  par  Beauregard,  Civulier,  Charron,  une  personne 
dont  je  ne  me  rappelle  pas  le  nom,  et  moi.     Nous  avons  bu  du 

,  Whiskey.")  Quand  je  suis  sorti  de  chez  Laflamme  allant  dan» 
une  direction  opposée  au  pont,  j'ai  marché  à  peu  près  une  demi- 
arpent.  ,Te  suis  ensuite  revenu  sur  mes  pas.  (On  lit  cette  partie 
de  la  déposition  du  témoin  devant  le  coroner:  "  Je  suis  allé  dans 
la  direction  de  ma  demeure  à  un  arpent  ou  un  arpent  et  demi  ; 
ma  maison  est  dans  une  direction  opposée  au  pont.")  Quand  j'ai 
vu  Charron  et  le  prisonnier,  ils  étaient  devant  la  maison  de  Bel- 
humeur.  Le  prisonnier  tenait  le  bras  droit  ie  Charron  avec  son 
bras  gauche.  J'étais  du  côté  dumoulin  de  M.  Dessaulles,  quand 
le  prisonnier  et  Charron  ont  pris  le  pont.  (On  lit  cette  partie  de 
la  déposition  devant  le  coroner  :  "  En  arrivant  au  pont,  Beaure- 
gard conduisait  Charron  du  côté  sud;  je  pris  alors  une  place  sur 
l'embarquement  du  pont  ;  j'étais  appuyé  sur  les  gardes-corps^ 
ayant  le  pied  gaucho  sur  le  grand  pont  et  le  pied  droit  sur  le  pe- 
tit pont.")  Je  ne  puis  pas  dire  dans  quelle  position  éttiit  Charron 
quMud  il  a  écrasé.  (On  lit  cette  partie  de  la  déposition  du  témoin  : 
"Au  premier  coup  que  reçut  Char,  on,  il  tomba  la  face  contre 
terre,  et  je  crois  qu'il  était  dans  cette  position  quand  il  reçut  le 
eecond  coup.")  Quand  j'ai  changé  de  place,  je  suis  allé  près  de  la 
ioaaisôn  de  Girturd,  Bdè  tenant  sar-ie  parapet    Je  me  trouais  i 


àSt.  Hya- 

m'avait  cUt 

ajoutant: 

les  grosseft 

3  Hur  la  rue 
Laâanim«. 
ais  de  chez 
ant  de  ehez 
lez  Ladam- 
sté  environ 
idelle.  (On 
l'il  De  savait 
La  déposi- 
it  que  le  té- 
dites,  inain- 
)t  q«e  Mau- 
(sition  prise 
it  les  autres 
pense  avoir 
îteintes  que 
ancer  pour 
î  je  puis  me 
Il  n'y  avait 
int  bu.     Je 
[On  lit  cette 
roner:  "La 
e  personne 
ivons  bu  du 

allant  dans 
s  i.c\e  demi- 
cette  partie 
lis  allé  dans 
nt  et  demi  ; 

Quand  j'ai 
ison  de  Bel- 
on  avec  son 
Lilles,  quand 
te  partie  de 
nt,  Beaure- 
le  place  sur 

ardes-corps, 
it  sur  le  pe- 

îdt  Charron 

du  témoin  : 
face  contre 
d  il  reçut  le 

é  près  de  la 
trouvais  à 


une  quinzaine  de  pieds  du  pont,  et  j'observais  le  prisonnier.  H^ 
avait  eu  une  galerie  à  la.  maison  de  Girard,  mais  il  n'y  en  avait 
plus;  il  n'y  avait  que  quelques  barreaux.  Je  ne  sais  pas  de  quelle 
manière  le  prisonnier  a  pris  Charron  pour  le  jeter  à  Teau.  Après 
que  le  prisonnier  fut  revenu  de  sur  le  pont,  nous  avons  marché 
ensemble  jusque  chez  Cadoret;  j'ai  continué  ensuite  sur  la  rue 
Casc^e  jusque  chez  moi.     Quand  j'eus  quitté  le  prisonnier  je  ne 
me  suis  pas  retourné  en  arrière  et  je  ne  sais  pas  si  le  prisonnier 
est  resté  sur  la  rue   Cascade,  ou  s'il  est  allé  ailleurs.    Je  n'ai  pas 
parlé  à  Beauregard  avant  ce  jour-là.  Si  j'avais  crié,  lorsque  Beau- 
regard  était  sur  le  pont,  il  était  assez  smart  pour  me  rejoindre. 
Les  personnes  qui  se  trouvaient  dans  la  maison  voisine  dormaient 
alors  ;  et  je  n'aurais  pas  pu  appeler  leur  secours  sans  y  aller  co- 
gner^  et  j'avais  peur  de  le  faire.  Je  n'aurais  pas  pu  me  rendre  en 
ville  pour  avertir  la  police  ;  j'aurais  été  obligé  d'aller  assez  loin 
pour  la  chercher,  malgré  que  le  pont  se  trouve  assez  près.     Je 
pense  que  le  prisonnier,  dans  le  moment  où  il  faisait  ce  mauvais 
coup,  avait  un  œil  sur  moi  il  me  voyait,    et  si  je   ra'étjiis   sauvé 
en  criant  au  secours,  j'étais  sûr  de  mourir,  car  Beauregard  m'au- 
rait tué.  La  police  se  trouve  à  deux  arpents  de  chez  Laflamme. 
Je  ne  puis  pas  dire  combien  de  temps  j'aurais  mis  à  courir  de 
là  à  la  police.    Je  restai  près  du  pont  lorsque  le  prisonnier  me 
regarda,  malgré   la  crainte  que  j'avais  de  lui.  Je  cmignais  qu'en 
Le  suivant  pas  Beauregard  qui  est  traître,  il  arrivât  quelque 
chose  à  Charron   qui  était  mon  ami.    Oui,  je   craignais,  et, 
c'est  pourquoi  je  n'ai  pas  parlé  de  cette  affaire  ;  si  je  l'avais  dé- 
claré, je  ne  serais  pas  témoin  ici,  aujourd'hui.    C'est  huit  jours 
après  la  scène  dont  j'ai  été  témoin,  que  beauregard  a  été  pris. 
Une  enquête  a  eu  lieu  devant  les  magistrats,  et  malgré  que  Beau- 
regar»'  .'•it  alors  en  prison,  je  n'osais  pas  en  parler,  car  je  savais 
que  le  prisonnier  ades  associés,  mais  je  ne  les  connais  pas.    Ma 
femme  avait   reçu   un   subpœna  pour  moi,    je  travaillais  alors 
au  troisième  rang,  chez  un  nommé  Laperle.  Je  suis  revenu  chez 
moi,  le  soir  et  je  vis  Vordre.  Je  ne  me  suis  pas  rendu  devant  les 
jug:i  de  pai.v  ;  la  cour  était  finie.  Je  reçu»  deux  subpœna  et  lors- 
que je  reçus  le  dernier  par  Félix  Fontaine,  homme  de  police,  je 
revins  avec  lui  à  St.  Hyacinthe.  J'ai  paru  devant  M.  Dflisle,  et, 
là  j'ai  donné  une  déposition  ;  j'en  ai  donné  une  aussi  devant  le 
coroner.  Le  soir  du  2  avril  ,j'ai  été  coucher  chez  moi;  je  ne  sais 
pas  l'heure  à   laquelle  je  suis  arrivé.    Lorsque  je  suis  allé  chez 
Ducharme,  le  dimanche  matin,  il  était  6  h.  ou  6^  h.  le  prisonnier 
était  là  seul,  assis  sur  un  banc.  La  seule  autre  personne  que  j'aie 
vue  était  une  jeune  demoiselle  qui  est  venue  nous  servir.  Je  ne 
suis  resté  qu'à  peu  près  un  quart  d'heure  dans  l'hôiel  ;  j'en  suis 
parti  seul,  y  laissant  le  prisonnier  que  je  n'ai  pas  revr  cejour-là. 
Dès  que  nous  ei\mes  pris  nos  verres,  la  jeune  fille  nous  a  quittés. 
Lorsque  j'ai  éié   demandé  la  première  fois  pour  donner  une 
déposition,  je  ne  l'ai  pas  fait  aussi  longuement  qu'ici,  parce  que 
j'étais  malade  daus  ce  moment  là.   Jo  ne  puis  pae  dix»  de  quelle 


If 


PROCÈS 


« 


maladie  j'étais  indisposé  ;  je  ne  croîs  pas  d'ailleurs  quMI  soit  né- 
cessaire de  le  dire.  Ce  que  j*ai  déclaré  devant  le  coroner  et  les 
magistrats  est  la  même  chose  que  ma  présente  déposition.  J'é- 
tais malade  alors,  mais  j'avais  bonne  mémoire.  (La  déposition 
donnée  devant  M.  Delisle,  est  produite  par  la  défens'ï.  M.  Delisle 
déclare,  sous  serment,  que  cette  déposition  est  la  même  que  celle 
qu'il  a  reçue  du  témoin.  M.  Delisle  remarque  aussi  que  le  té- 
moin semblait  hésiter  quand  il  a  donné  sa  déposition  devant  le 
Juge  de  Paix,  mais  comme  il  (M.  Delisle)  voyait  que  le  témoin 
en  savait  plus  long,  il  l'a  alors  renvoyé  devant  le  Coroner. 

Par  M.  Carter.-Lorsque  je  suis  allé  chez  Ducharme,  le  diman- 
che matin,  le  prisonnier  m'a  montré  de  l'argent  et  il  ne  m'a  rien 
dit  que  ce  que  j'ai  rapporté.  (On  lit  la  déposition  du  témoin  don- 
née devant  le  magistrat  :  "  En  rencontrant  Beauregard  chez  La- 
flamme  où  il  était  avec  Charron  et  quelques  autres,  le  prisonnier 
m'a  dit  :  "  J'aurai  l'argent  de  Charron  ;  s'il  ne  veut  pas  m*em 
donner, j'ai  unegarcette  et  j'en  aurai  bien  alors.")  Le  lendemain, 
j'ai  revu  le  prisonnier  chez  Ducharme  ;  il  m'a  dit;  "j'ai  mainte- 
nant de  l'argent  pour  ma  licence  ;  j'îii  volé  Charron  hier,  sur  le 
pont  Biron  ;  je  lui  ai  pris  son  argent  et  sa  montre  ;  mais  ayant 
vu  venir  des  hommes  au  service  de  M.  Nagle,  j'ai  jeté  le  corps 
de  Charron  à  l'eau."  Il  me  montm  la  montre  de  «Jharron,  qui 
était  en  argent,  sans  couvercle.  Il  me  dit  aussi  qu'il  avait  un  bil- 
let qu'il  avait  brûlé,  car  il  n'aurait  pu  lui  servir.  Je  ne  suis  pas 
certain  si  le  prisonnier  m'a  dit  que  la  montre  qu'il  avait,  était 
celle  de  Charron.  Je  n'ai  jamais  dit  à  un  nommé  Lucas  qui  se 
trouve  en  prison,  que  j'aimais  à  y  rester,  vu  que  je  gagnais  qua- 
tre chelins  par  jour,  comme  témoin  contre  le  prisonnier.  Lucas 
m'a  dit  ;  "  moi  je  gagne  tant,  "  et  j'ai  répondu,  "  moi  aussi."  De- 
puis que  je  suis  en  prison,  personne  ne  m'a  parlé  de  cette  affaire, 
ni  lu  aucune  déposition  à  ce  sujet.  Aucun  autre  témoin  n'était 
renfermé  avec  moi,  dans  la  prison.  Je  n'ai  dit  à  personne  que  si 
je  disais  telle  et  telle  chose,  je  serais  pendu,  d'autant  plus  que  je 
savais  bien  que  mon  crime  n'était  pas  assez  grand  pour  que  je 
sois  pendu.  On  ne  m'a  promis  ni  pardon,  ni  argent,  pour  ma  fa- 
mille, pendant  que  je  serais  en  p  ison.  Je  n'espère  pas  en  rece- 
voir ;  si  toutefois  j'en  recevais,  je  le  prendrais  ;  mais  j'aimerais 
mieux  m'en  aller  que  de  recevoir  de  l'argent.  Je  ne  me  rappelle 
pas  avoir  vu  un  nommé  Brisson  en  prison  ;  il  en  entre  tant  qu'il 
n'est  pas  facile  de  savoir  leurs  noms  à  tous. 

LUCIE  BEAUREGARD.— Le  2  avril  dernier,  je  demeurais  à 
St.  Hyacinthe. — Je  suis  la  fille  du  prisonnier. — Je  restais  chez 
mon  père. — Lorsque  j»^  me  suis  couchée,  il  était  de  dix  heures  à 
dix  heures  et  demie.  Mon  père  n'était  pas  à  la  maison. — Mon 
père  avait  un  bout  de  câble  qu'il  suspendait  à  la  tête  de  son  lit. 
Ma  mère  a  brûlé  ce  bout  de  câble  après  l'arrestation  de  mon  père. 

Par  M.  Carter. — Le  lendemain  du  2  avnl,  dimanche,  j'ai  vu  le 
bout  de  câble  pendu  à  la  même  plaee.  Je  pense  qu'il  n'y  avait 
t»ag  de  sang  deswiB.  ;; 


iMl  soit  né- 
•oner  et  les 
dtion.  J'é- 
dépositîon 
M.  Delisle 
le  que  celle 
que  le  té- 
n  devant  le 
I  le  témoin 
•roner. 
3,  le  diman- 
le  m'a  rien 
êmoin  don- 
d  chez  La- 
prisonnîer 
pas  m*em 
lendemain, 
'ai  mainte- 
hier,  sur  le 
mais  ayant 
té  le  corps 
harron,  qui 
k^ait  un  bil- 
ne  suis  pas 
avait,  était 
icas  qui  se 
ignais  qua- 
lier.  Lucas 
Lussi."  De- 
îtte  affîiire, 
loin  n'était 
une  que  si 
)lus  que  je 
our  que  je 
our  ma  fa- 
is en  rece- 
j^aimerais 
î  rappelle 
tant  qu'il 

imeurais  à 
estais  chez 
:  heures  à 
on. — Mon 
de  son  lit. 
mon  père. 
,  j*ai  vu  le 
n'y  avait 


BEAURE6ARD.  27 

Par  la  cour, — Je  n*aî  pas  connaissance  que  mon  père  soit  venu 
chez  nous  cette  nuit  là.  Je  couchais  en  haut  et  mou  père  en 
bas.     Mon  pèr^  pouvait  arriver  sans  que  j'en  eus  connaissance. 

PIERRliî  LAFLAMME.— Je  suis  aubergiste  à  St  Hyacinthe. 
Le  2  avril  dernier,  j'avais, Je  soir,  beaucoup  de  monde  chez  moi.  Je 
n'ai  aperçu  le  prisonoier  dans  ma  maison,  que  vers  dix  ou  onze 
heures.  J'ai  vu  aussi  Charron  chez  moi,  ce  soir  là.  Autant  que  je 
puis  me  rappeler,  je  crois  qu  il  était  près  de  9  h,  quanci  Charron  est 
parti  de  chez  moi.  Il  s'en  allait  alors  chez  Guertin  avec  Maurice 
et  quelques  autres. 

Par  M.  Drummond. — ^Entre  10  et  11  heures,  le  prisonnier  n'est 
resté  qu'un  instant  chez  moi.  Il  était  entré  avec  Page  et  Fontai- 
ne. Je  ne  me  rappelle  pas  lui  avoir  rien  servi  avant  ce  moment- 
là.  Il  y  avait  chez  moi,  ce  soir  là,  MM.  Delfosse,  Préfontaine, 
Marchessault,  Maurice,  Quitté  et  quelques  autres  dont  je  ne  me 
rappelle  pas  les  noms. 

LOUIS  SCOTT.— Je  veillais  à  St.  Hyacinthe  chez  M.  Gervai«, 
le  2  avril  dernier  ;  après  la  veillée,  je  suis  allé  me  coucher  chez 
M.  Laflamme;  je  suis  arrivé  là  à  10  h.  J'ai  vu  arriver  le  prison- 
nier, avec  Page  et  Fontaine,  vers  dix  heures  et  quart. 

Par  M.  Drummond. — Je  me  suis  couché  vers  dix  hei^res  et  d&. 
mie,  et  à  cette  heure,  le  prisonnier  était  encore  chez  Laflamme. 

PHILOMENE  MONETTE.— Je  restais  chez  M.  Laflamme, 
le  2  avril  dernier,  j'y  étais  ce  soir  là  et  j'y  ai  vu  le  défunt  verç 
onze  heu  rets 

PHILOMENE  LAFLAMME.— Je  restais  chez  M.  IMamme, 
mon  frère,  le  2  avril  dernier  ;  Je  connaissais  Charron.  Je  ne  m^ 
rappelle  pas  l'avoir  vu,  chez  mon  frère,  ce  soir  là. 

DR.  BEAUBIEN. — Je  demeure  à  Montréal.  Le  5  mai  der- 
nier, j'ai  été  prié  par  le  Coroner  Jones,  de  me  rendre  à  St. 
Hyacinthe,  oti  je  suis  arrivé  après  cinq  heures  de  l'après-midi. 
On  me  conduisit  de  suite  au  côté  nord  de  la  rivière,  prés  de  la 
maison  d'un  nommé  Cadoret  J'y  aperçus  un  cadavre  gisant 
dans  l'eau.  Il  ét^iit  couvert  d'eau,  mais  on  avait  jeté  quelque 
chose  dessus.  Je  demandai  qu'on  le  sortit  de  là  :  on  le  décou- 
vrit.  J'aperçus  alors  qu'il  avait  la  tète  un  peu  en  bas,  tournée 
vers  l'ouest,  et  penchée  sur  la  poitrine  ;  les  bras  un  peu  fléchis, 
portés  en  avant  du  tronc,  se  trouvant  en  contact. — La  fï\ce  ^tait 
couverte  de  vase  un  peu  gluante,  formant  une  espèce  d'enve- 
loppe sur  la  figure,  ce  qui  empêchait  d'en  distinguer  les  traits. 
Je  lavai  la  figure. — L'officier  public  fit  reconnaître  le  corps,  com- 
me étant  celui  du  nommé  Anselme  Charron.  Il  avait  une  con- 
tusion à  la  racine  du  nez,  au  bas  du  front.  L'épiderme  du  front 
s'enlevait  avec  facilité.  Il  y  avait  sur  le  menton  une  blessufo 
péaétrant  jusqu'à  l'os.  Les  bords  de  cette  plaie  étaient  inégaux, 
formés  en  zig-zag,  couverts  de  caillots  de  sang. — Alors,  les  pro- 
cédés furent  suspendus  jusqu'au  lendemain  matin,  où  ils  furent 
continués  chez  un  nommé  Lussier,  en  la  ville  de  St.  Hyacinthe. — 
Le  lendemain,  je  procédai  devant  le  juge.— 'Le  corps  fut  désba* 


i6 


PROCES 


■'.r  iï» 


11 


bilIé.  Je  trouvai  la  cravate  tachée  de  nangf,  surtout  dans  ]en  plîs 
intérieurs. — Lji  figure  était  duns  son  étxit  nature],  mais  il  y  avait 
un  peu  de  gonflement.  Les  yeux  étaient  bien  fermés,  sans  proé- 
minence. La  bouche  était  aussi  fermée. — J'ai  commencé  par 
nettoyer  la  face  complètement  ;  j'ai  ensuite  enlevé  les  che- 
veux, ce  qui  fut  d'autant  plus  facile  qu'ils  tenaient  à  peine. 
La  peau  attachée  aux  cheveux  et  la  face  du  cadavre  était  d'une 
teinte  livide,  et  un  peu  rougeâtre. — J'ai  remarqué  un  enfonce- 
ment derrière  la  tête,  assez  profond  pour  me  faire  croire  que  les 
os  avaient  été  blessés  dans  cette  partie. — ^Une  autre  bles- 
sure à  peu  prés  semblable,  se  trouvait  du  côté  gauche,  au  dessus 
de  l'oreille.  Je  me  suis  convaincu  par  la  suite,  que  les  os  n'a- 
vaient pas  été  touchés.  J'ai  tout  bien  examiné  le  corps,  dnns 
aa  surface.  Sur  le  bras  droit,  près  de  l'épaule,  un  peu  en  de- 
dans et  en  avant,  se  présentait  une  longue  tache  bleuâtre  ;  une 
autre  tache,  de  même  apparence,  se  présentait  sur  le  même  côté, 
au  dessous  du  creux  de  l'aisselle.  A  part  cela,  le  corps  ne  pré- 
sentait aucune  lésion  ou  blessure  quelconque  ;  seulement,  les 
Sarties  sur  lesquelles  le  corps  avait  reposé,  étaient  violacées, 
'ai  examiné  les  os,  avec  le  plus  grand  soin,  surtout  ceux  du  crâ- 
ne. Je  fis  une  incision  d'avant  en  arrière,  et  une  autre  d'une 
oreille  à  l'autre.  J'ai  alors  détaché  la  peau  des  chairs  qui 
tiennent  â  la  tête  ;  elles  étaient  renversées.  Je  découvris  une 
longue  et  large  effusion  de  sang  qui  partait  d'au  dessus  et  en 
aval  de  l'ouverture  externe  de  l'oreille  du  côté  gauche,  se  diri- 
géant  en  bas  et  en  arriére,  en  gagnant  la  base  du  crâne.  Elle 
continuait  du  côté  droit  en  changeant  de  direction,  et  venait 
alors  ascendante,  se  terminant  en  arriére,  un  peu  au  dessous 
de  l'ouverture  extérieure  de  l'oreille  du  côté  droit.  Cfette 
effusion  avait  à  peu  près  un  pouce  et  demi  de  largeur,  et  était, 
dans  toute  son  étendue,  parsemée  de  petits  caillots  de  sang. 
Dans  cette  étendue ,  à  part  cette  effusion,  les  chairs  étaient  com- 
me imbibées  de  sang.  Dans  les  tleux  tempes,  je  découvris  une 
large  effusion  de  chaque  côté,  pénétrant  profondément  dans  les 
chairs  jusqu'à  l'os.  Ces  deux  meurtrissures  étaient  de  même 
nature  que  celles  dont  j'ai  parlé  d'abord.  Les  chairs  étaient 
bien  plus  broyées  qu'elles  ne  l'étaient  en  arrière. 

La  contusion,  à  la  racine  du  nez,  ne  présentait  nucun  caillot 
de  sang.  Le  sang  était  bien  plus  fluide,  et  par  conséquent,  plus 
à  l'état  de  décomposition,  que  celui  dont  je  viens  de  parler.  Le 
crâne  a  été  ensuite  ouvert.  Les  v;àsseaux  qui  se  sont  présen- 
tés, étaient  remplis  de  sang  coagulé.  Cette  enveloppe  extérieu* 
re,  doublée  aussi  par  la  seconde  enveloppe,  a  été  ouverte 
complètement  par  des  coupures,  telles  que  celles  dont  j'ai  par- 
lé pour  la  peau  .  La  substance  du  cerveau  encore  couverte 
d'un  pli  de  la  seconde  enveloppe  et  de  la  troisième,  m'of)rit 
une  apparence  extérieure  très  congestionnée.  En  détnchant  la 
boite  osseuse,  deux  déchirures  mentionnées  dans  ma  déposition, 
ont  été  faites  pendant  l'opération.    Le  cerveau  fut  mis  à  décou- 


ê 


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BEAURAGABD. 


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ne.    Elle 
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dans  les 
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extérieu» 
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chant  la 
position, 
à  décou- 


M. 


0, 

's 


vert  ;  toute  la  surfice  visible  so  montra  extrêmement  gorgée  de, 
sung.  1  .e  cerveau  a  été  si>ni  de  sa  boîte.  En  le  détacbint  de 
cette  partie  qui  s'engage  dans  la  conduite  de  l'échiné,  il  s'est 
montré  une  certaine  quantité  de  sang  mélangée  avec  la  siibstan- 
ce  cért-brale  elle-même,  ('ette  substance  du  cerveau  ne  présen- 
tait aucun  épanchement  ailleurs,  mais  ses  vaisseaux  étaient  par- 
tout remplis  d'une  grande  quantité  de  sang,  et  surtout  la  partie 
la  pins  externe.  En  outre,  cette  substance  de  la  cervelle  était  très 
Minolie  ;  surtout  dans  sa  partie  inférieure,  elle  était  comme  flui- 
de. 11  n'y  avait  aucune  fracture  aux  os  du  crâne.  La  racine  du 
nez  où  se  trouvait  cette  Wesstire  dont  j'ai  parlé,  ne  présentait 
pas  de  fracture,  non  plus. 

Je  coupai  la  mâchoire  inférieure  des  deux  côtés,  et  je  fis  une 
large  ouverture  à  la  jointure  des  deux  côtés,  en  coupant  le%  o» 
des  deux  épaules,  les  deux  incisions  allant  jusqu'au  bas  delà 
poitrine. — La  langue  était  parfaitement  saine.  Le  derrière  des 
fosses  nasales,  et  le  conduit  qui  va  â  l'estomac,  étaient  aussi 
parfaitement  sains. — La  partie  qui  conduit  à  la  respiration  était 
parfaitement  saine  dans  toute  son  étendue,  ne  contenant  pas 
d'écume.  Le  tissu  des  poumons  était  parfiutement  sain.  Le 
cœur  était  sain,  présentant  du  côté  droit,  du  sang  caillé,  asseî 
bien  fonné  et  mou.  La  partie  gauche  du  cœur  était  en  quelque 
sorte  vide,  présentant  un  tout  petit  morceau  de  sang,  légère- 
ment coagulé. — Le  poumon,  dont  je  viens  de  parler,  a  été  plon- 
gé dans  un  sceau  d'eau,  îiccompagné  du  cœur  et  de  la  langue; 
le  tout  flottait  parfaitement.  L'estomac  était  rempli  do  subs- 
tances liquides  et  solides,  c-à-d,  de  portions  de  viandes  dont  la 
nature  était  peu  changée  ;  il  y  avait  aussi  une  odeur  de  liqueurs 
fortes.  Ce  qu'on  appelle  Je  velouté  était  noirâtre,  ce  qui  indi- 
quait que  cette  personne  n'avait  pas  bu,  cette  fois-là,  pour  la 
première  fois — Du  reste,  cette  partie  était  saine.  Les  entrailles 
étaient  à  l'état  de  santé  Le  foie  était  un  peu  gorgé  de  sang,  et 
un  peu  plus  développé  que  d'ordinaire,  au  moins  chez  la 
généralité  des  hommes. — La  vésicule  du  fiel  n'était  pas  beau- 
coup développée  ;  elle  contenait  cependant  une  certaine  quan- 
tité de  bile  liquide.  La  rate  était  saine  aussi,  ainsi  que  le  pan- 
chias,  la  vessie  et  les  reins. 

J'en  suis  venu  â  cette  conclusion,  que  Hndividu  dont  j'ai  exa- 
miné le  corps,  ne  s'est  pas  noyé,  ou  n'a  pas  été  noyé  ;  il  ne  s'est 
pas  tué  non  plus  en  tombant  dans  l'eau, — la  position  des  diflTè- 
rentes  blessures  prouvent  eet  avancé,  que  cette  individu  est 
mort  après  1  infliction  des  blessures  que  j'ai  eu  l'honneur  d'énu- 
mérer  iqull  a  succombé  par  une  mort  très  prompte,  causée  par 
une  commotion  du  cerveau  produite  par  des  coups  ;  que  les  con- 
tusions infligées  sur  la  tête  du  défunt  l'ont  été  par  un  Instiu- 
ment  arrondi  ou  obtus.  Pour  compléter  ma  pensée,  l'individu 
a  du  être  saisi  par  les  cheveux  d'une  main,  et  frappé  de  l'autre 
sur  le  crfine.  La  cravate  que  l'on  me  produit  est  celle  dont  j'ai 
parlé.— La  température  de  l'eau  oïl  a  été  trouvé  le    corpa, 


30 


PROCis 


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poiivnit  le  çonsçirer  loTJ«Ttemps, — D*nf>rè«  l'état  lîti  r^ifînvre^  Il 
e.st  ciitnin  qirii  ;;  été  eonst.uiUiit'iil  immrrgé  tlejiui.s  le  moment 
où,  il  a  été  jéîé  à  Teiiu,  jusqu'à  celui  uîi  il;i  é  é  retrouvé. 

Par  M.  Chu reli.— Les  symptômes  qui  indiquent  la  commo- 
tion, varient  beaucoup  suivant  la  force  de  l'action.  II  y  a  des 
commotions  qui  oeciisionnent  la  mort  immédiate  et  qui  produi» 
sent  wn  broiement .  Dans  le  cas  actuel,  il  n  y  a  pas  eu  de  dé- 
rangement ou  trouble  dans  la  substance  cérébrale;  il  y  a  eu  con- 
gestion, comme  je  Tai  dit. — Le»  signes  qui  se  présentent  chez 
l'individu  survivant,  sont  ceux  de  l'inflammation  et  de  l'irritation 
du  cerveau.  Un  individu  perd  connaissance,  plus  ou  moins  vite, 
selon  la  force  de  la  commotion. — Je  suppose  que  l'individu  perd 
connaissance  bien  souvent  dims  ces  cas-là.  Si  la  personne  en 
meurt,  il  faut  que  la  circulation  s'arrête  immédiatement.  Dans 
le  cas  présent,  je  dis  que  la  mort  a  été  produite  aussitôt  après 
que  les  coups  ont  été  donnés. — Le  sang  coagulé  était  bien  dis- 
tinct. II  s'est  probablement  coagulé,  quand  les  coups  se  sont 
donnés.  Je  pense  que  l'efi'usion  du  sang  a  eu  lieu  pendant  la 
vie  de  l'individu.  Je  crois  que  le  sîing  s'est  coagulé  en  très  peu 
de  temps,  en  une  demie  heure  à  peu  près. — Quand  un  homme 
meurt  par  immersion,  il  meurt  par  asphyxie. — La  cause  de  la 
mort,  dans  ce  cas-ci,  provenait  de  la  cessation  de  l'action  ducer- 
veau.  .;,/„.-/  ■,■,;.  '.,(..,,>  .. 

(Lé  reste  de  Ta  transquestîon  confirme  ce  qui  a  été  émis  par 
M.  Beaubien,  dans  son  examen  en  chef,  ajoutant  de  légers  dé» 
tails  sans  intérêt  pour  nos  lecteurs.) 

DR.  MALHIOT.^Je  demeure  à  St.  Hyacinthe  et  j'y  demeu- 
rais au  commencement  du  mois  de  mai  dernier  — Le  5  mai,  j'ai 
été  demandé  par  le  coroner  Jones,  pour  aider  le  Dr.  Beaubien  à 
faire  l'autopsie  du  cadavre  de  Charron.  (Le  témoin  donne  les 
mêmes  détails  que  ceux  donnés  par  le  Dr.  Beaubien. 

DR.  MAGLOIRETURCOTTE.  —  J'ai  assisté,  le  6  mai 
dernier,  à  l'autopsie  du  cadavre  d'un  nommé  Charron.  (  Son  té- 
moignage  corrobore  les  dépositions  des  JJrs.  Beaubien  et  Mal- 
hiot.) 

Alors  M.  Carter  se  lève  et  adresse  la  parole  au  jury,  en  anglais, 
pendant  environ  quatre  heures. — Cette  adresse  est  suivie  de  celle 
de  Mr.  Drummond. 

C'était  la  sixième  journée  que  les  débats  duraient  ;  Mr.  Drum- 
mond se  leva  pour  adresser  la  parole  aux  jurés, en  français.  Il 
parla  pendant  quatre  heures  ;  son  adresse  fut  calme  et  raison- 
née.  L'avocat  parlait  en  homme  qui  se  sent  chargé  de  la  terrible 
responsabilité  de  la  vie  d'un  de  ses  semblables  à  défendre.  II  y  mit 
tout  le  sang-froid  et  l'habilité  qu'on  pouvait  déployer  en  pareille 
occasion. 

Voici  une  analyse  succincte  de  son  discours. 

Il  fit  voir  toute  l'importance  et  la  grandeur  du  devoir  qu'il 
avait  à  ren>olir,  devoir  dont  la  gravité  n'était  surpassée  que  par 
l'importi»«iee  encore  plus  grande  de  celui  du  jury,    ^  Lorsqu'on 


le 


BEAUREOARD* 


81 


A!» 
Vu 


qu'il 


rppréscnto,  dît  l'ontnir,  la  responsn'bilité  temble  qn^compor- 
>.\'  lU'VOir,  et  i:'H  ooii.-équeni'es  f;il:iles  qui  re.su Iteniient  pour 
faceuié  d'un  jug-ement  mul  fondé,  on  se  sent  porté  à.  av  rappeler 
[t  ù  mettre  en  pratique  cette  divine  maxime  de  l'Evangile .  "  Ne 
igez  pas,  si  vous  ne  voulez  pas  êtrejugé.^"*  Je  n'enteuds  pas  par 
Messieurs,  vous  faire  un  crime  du  jugement  que  vous  pour- 
rez porter;  non,  loin  de  là  ;  je  veux  seulement  vous  montrer  la 
j|ravité  du  devoir  que  vous  avez  à  remplir,  vous  faire  voir^que 
fous  ne  devez  donner  votre  jugement  que  d'après  une  certitude 
|omplôte;  car,  de  la  manière  que  vous  jugerez  votre  semblable, 
fou»  serez  jugés  vous-mêmes;  nelejn'gez  pas  témérairement, 

Îir  si  un  jugement  précipité  de  votre  part  Conduisait  cet  homme 
réchafaud,  tout  en  étant  innocent  du  crime  dont  on  Taccu^e, 
|ous  seriez  responsables  de  sii  mort,  et  on  aurait  droit  de  vous  de- 
laander  compte  de  son  sang." 

On  a  voulu  soulever  toutes  sortes  de  préjugés  contre  l'nccusé  ; 
préjugé  de  l'opinion  publique,  préjugé  de  la  presse  qui  ne  rougit 

fas  de  se  ic>ire  l'organe  de  tous  les  cancans,  et  de  condamner  un 
omme avant  qu'il  ait  donné  un  seul  mot  de  justification,  et  quand 
lit  justice  a  déjà  la  njain  sur  lui.  C'est  un  moyen  peu  honorable 
•t  répudié  par  le  droit  anglais. 

"  L'accusé  à  ta  barre  doit  être  considéré  comme  innocent  tant 
qu'une  preuve  suffisante  du  contraire  n'a  pas  été  faite,  ici,  en  vo- 
ire présence  ;  et  en  ce  moment,  je  suis  heureux  de  le  dire,  en  fa- 
▼eur  de  raccnsé,  la  preuve  de  la  poursuite  est  si  faible,  si  contra- 
dictoire, que  vous  sortirez  de  cette  salle  avec  le  satisfaction 
d'avoir  accompli  une  bonne  œuvre,  en  acquittant  le  prisonnier 
4*une  accusation  mal  fondée. . . .  Je  le  répète  encore  une  fois: 
une  certitude  morale  complète  vous  est  nécessaire  pour  motiver 
an  verdict  de  culpabilité.  Le  moindre  doute  doit  être  au  profit 
de  l'accusé  ;  vous  devez  lui  en  donner  le  bénéfice.  C'est  là  une 
règle  d'équité  naturelle  et  de  droit  public  si  bien  exprimée  dans 
IKJtte  axiome  du  droit  criminel  anglais  :  Il  vaut  mieux  que  quatre 
"tingt  dix  neuf  coupables  échappent  qu^un  seul  innocent  périsse.'''* 
%i  s'il  s'est  jamais  présenté  une  occasion  oh  cet  axiome  dût- 
lltre  appliqué,  c'est  bien  dans  le  cas  présent,  où  non-seulement 
des  doutes  s'élèvent  en  faveur  de  l'accusé,  mais  oti  vous  avez 
Oresqu'une  preuve  de  son  innocence.  "  L'orateur  fait  remarquer 
la  différence  de  position  de  l'accusé  et  du  défunt.  L'accusé  est 
f  n  homme  sans  fortune  et  sans  amis.  Le  défunt  était  riche  ; 
des  amis  nombreux  ont  réussi  à  créer  de  chaudes  sympathies  en 
i||a  faveur  ;  ils  ont  eu  les  moyens  de  faire  de  grandes  recher- 
|ihes  ;ils  sont  parvenus  à  créer  un  préjugé  universel  dans  la  ville 
te  St.  Hyacinthe,  et  l'on  sait  que  les  convictions  se  forment  sou- 
[ent  d'après  les  sympathies.  "  Le  préjugé  est  tellement  générai, 
lit  l'orateur,  que  tout  le  monde,  dans  la  ville  de  St.  Hyacinthe, 
|epuis  l'homme  de  police  jusqu'au  seigneur,  semble  conspirer 
lontre  le  prisonnier  ;  une  foule  de  personnes  dont  l'intelligence 
|!st  obscurcie  par  le  préjugé,  est  avide  du  sang  de  cet  homme-14.** 


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JPBOCJ^i 


r: 


1 
■I 


OniRnafait  une  question  de  pnrtisnns;  on  se. montre  intérc«<fié 
à  la  condamnation  du  prisonnier;  on  luverpeile  les  témoins  nu 
sortir  de  la  boite  ;  on  leur  reproche  de  n'avoir  pus  été  assez  forts 
contre  hiecusé. 

Que  dis-je  !  messieurs,  l'on  a  été  jusqu'à  ^airedes  paris  sur  le 
sang  de  cet  homme,  et,  on  s'appuyait  sur  le  préjugé  général, 
soulevé  contre  lui,  pour  croire  que  votre  verdict  lui  sera  fatal. 
Mais  j'espère,  messieurs,  que  vous  vous  élèverez  au-dessus,  de  ce 
préjugé  et  que  vous  ferez  justice  de  la  réprobation  dont  on  a 
voulu  couvrir  cet  homme,  avant  qu'il  ait  pu  se  défendre;  je 
sais  que  votre  conscience,  éclairée  par  la  vérité  et  la  stricte  véri- 
té, sera  votre  seul  ffuidc.  Je  ne  saurais  tiop  le  répéter:  il 
s'Agit  ici  d'une  chose  grave,  d'une  chose  terrible  ;  il  n'y  a  plus  à 
compter  sur  la  pitié  et  sur  la  miséricorde;  le  temps  de  la  miséri- 
corde est  passé;  les  exécutions  se  multiplient  avec  une  rapdité 
qui  effraie  ;  le  sang  humain  inonde  les  éuhafauds,  et  l'on  voudrait 
parler  de  la  douceur  de  la  justice  !  Non,  messieurs,  c'est  une 
question  de  vie  ou  de  mort.  Ne  dites  pas  :  "  Nous  allons  toujours 
condamner  l'accusé,  mais  nous  le  recommandons  à  la  clémence 
de  la  Cour." 

,  L'Orateur  (sans  doute  dans  l'intérêt  de  son  client)  s'élève  con- 
tre le  droit  que  possède  la  société  sur  la  vie  des  individus.  Il 
proclame  quMl  a  toujours  nié  et  qu'il  nie  encore  le  droit  conféré 
à  quelques  hommes  de  verser  le  sang  de  leurs  semblubles.  Il  dit 
qu'il  aurait  un  grand  nombre  de  considérations  philosophiques  et 
sociales  à  présenter  sur  ce  sujet,  mais  il  les  met  de  côté  pour  ne 
s'occuper  que  des  faits  de  la  cause.  L'Orateur  entre  dans  les  dé- 
tails des  faits,  et  les  explique  dans  un  sens  favorable  à  l'accusé. 
II  dit  que,  sans  le  témoignage  du  nommé  Lusignan,  tout  l'écha- 
faudage des  preuves  de  la  poursuite  s^écroûle.  Mais  on  ne  doit 
pas  admettre  ce  témoignage,  d'abord  parce  que  c'est  celui  d'un 
délateur,  d'un  complice  après  le  fait,  et  surtout  parce  que  c'est 
pelui  d'un  parjure.  La  loi  refuse  complètemeat  ce  témoigna- 
ge. D'ailleurs,  Lusignan  e.st  un  homme  au  serment  duquel  on 
ne  peut  se  fier  ;  il  le  prouvera  par  des  témoins  qui  le  connaissent. 
La  poursuite  pourra  produire  des  témoins  qui  donneront  Lusi- 
gnan comme  digne  de  foi  ;  mais  ces  gens  ne  le  connaissent  pas, 
ils  n'ont  que  peu  de  rapports  avec  lui  ;  ils  sont  au  premier  de- 
gré de  l'échelle  sociale,  et  Lusignan  est  au  dernier.  On  doit 
plutôt  croire  des  gens  qui  ont  vécu  avec  lui  longtemps  et  qui 
le  connaissent  à  fond.  La  preuve  corroboratlve  se  fonde  sur  une 
espèce  de  conspiration  du  prisonnier  contre  le  défunt:  maison 
ne  l'a  presque  pas  vu  dans  la  journée  avec  lui  :  le  soir,  il  n'entre 
pas  avec  lui  chez  Laflamme  ;  il  se  trouve  à  sortir  avec  le  défunt, 
et  parce  qu'il  marche  quelques  instants  avec  lui,  on  conclut  qu'il 
en  était  le  gardien,  comme  si  on  était  le  gardien  d'un  homme, 
pour  avoir  marché  un  quart  d'heure  avec  lui.  Il  n'y  a  que  Lusi- 
gnan, que  personne  n'a  vu  chez  Laflamme,  qui  dit  que  le  prison- 
nier, chez  Laflamme,  a  demandé  à.  Charron  de  venir  coucher  chez 
lui. 


regs 

tro'i 

JéfJ 

|cet 

|genl 

irn'a\ 

lil 


f  * 


BBAUHliOAllD. 


33 


ntre  intérc^fié 
i  témoin •«  au 
té  assez  forts 


Le  second  moyen  de  la  poursuite  se   fonde  sur  ce  que  Benu- 
egrnrd  seul  avait  à  tuer  Charron,  ayant  un  besoin  extrême  de 
roMver  de  l'argent,  et  ayant  dit  qu'il  en  trouverait  bien.  Mais  la 
îdéfense  prouvera  que,  lors  du  meutre,  Beauregard  n'avait  plus 
et  intérêt,  ayant  trouvé  un  associé  qui  devait  lui  prêter  de  hir- 
nt,  et  qui,  même,  lui  en  avait  déjà  donné.    Beaurejrard,  dit-on, 
avait  pas  d'argent  avant  le  2  avril,  et  le  lendemain  de  ce  jour, 
il  en  avilit  beaucoup.     Mais,  il  n'y  a  que  le  complice,  que  le  par- 
ure Lusignan,  qui  lui  ait  vu  de  1-argent,  et  l'on  voit  quil  était 
dans  la  plus  grande  détresse,  n'ayant  pas  pu  payer  6  piastres 
qu'on  lui  demandait  sous  menace  de  poursuite.    On  dira  peut- 
être  quil  avait  intérêt  à  cacher  cet  argent;  alors,  pourquoi  se- 
rait-il allé  montrer  cet  argent  à  Lusignan  et  aurait-il  dit  à  tant  dé 
gens  qu'il  aVait  de  l'argent  ?  mais  cela  s'explique  facilement: 
Beauregard  avait  de  l'argent,  mais  cet  argent,  c'était  celui  quil 
avait    emprunté  d'un  associé,  pour  sa  licence  ;  il  n'en  avait 
pas  d'autre  dont  il  pût  faire  usage,  pour  lui,  pour  sa  famille  que 
les  voisins  étaient  obligés  d'assister.    Ainsi,  l'on  comprend  faci- 
lement les  paroles  du  prisonnier:  "  J'ai  de  l'argent  et  je  n'en  ai 
pas."  L'Orateur  détruit  l'autre  moyen  de  la  poursuite,  appuyé 
sur  les  paroles  mêmes  du  prisonnier.     Ce  dernier  aurait  dit  à 
un  des  témoins  :  "  Ne  sortez  pas  le  soir  avec  votre  argent  ;  on 
pourrait  vous  tuer  ;  pour  moi,  je  tuerais  un   homme  comme  je 
1  •  ±M  tuerais  un  rat,  pour  avoir  de  l'argent."  Mais  le  temps  où  ces 

)sop  nqueset  ï|  paroles  ont  été  dites,  est  une  preuve  que  le  prisonnier  ne  voulait 
-  ^  pour  ne  .|  ^'^.^  qu'un  badinage,  jcar  il  n'est  pas  naturel  qu'un  homme  qui 
IS  médite  un  meurtre,  se  serve  d'un  pareil  langage  devant  des  per- 
ï'^  sonnes  qui  l'inculperaient  ensuite.    L'Orateur  en  vient  aux  paro- 
f  les  que  l'on  reproche  si  fortement  au  prisonnier,  lorsqu'il  répon- 
I  dit  à  un  témoin  qui  lui  demandait  où  il  avait  mis  Beauregard  : 
"  Ne  soyez  pus  inquiets,  dit-il,  il  va  bien,  il  va  comme  un  chapeau 
qui  s'en  va  sur  l'eau." 

"  C'est  à  propos  do  ces  paroles,  dit  l'orateur,  que  Ton  voit 
combien  la  disposition  dans  laquelle  se  trouve  un  témoin  vis-à- 
vis  de  l'accusé,  influe  sur  sa  manière  de  voir  les  choses  et  de  les 
rapporter.  On  a  fait  un  crime  au  prisonnier  de  ces  paroles  qui 
n'étaient,  après  tout,  qu'un  simple  badinage,  comme  le  témoin 
s'est  enfin  résigné  à  le  dire.  Ce  témoin  avait  d'abord  ftnt  une 
montagne  de  ce  simple  badinage.  Il  avait  eu  soin  de  nous  dire 
que  le  prisonnier  était  arrivé  à  lui,  tout  essoufflé,  et  en  se|frottant 
les  mains,  qu'il  avait  l'air  embarrassé  et  voulait  s'éloigner  de  lui  ; 
mais  ensuite,  on  parvient  à  lui  faire  dire,  que  le  prisonnier  a  cou- 
tume de  se  frotter  ainsi  les  mains,  qu'il  n'a  pas  cherché  à  s'en 
aller,  qu'au  contraire,  il  a  continué  à  marcher  avec  lui  (le  témoin), 
jusque  chez  Laflamme;  qu'il  était  tranquille  comme  d'habitude, 
et,  que  lui,  le  témoin,  ne  s'est  douté  de  rien,  et  que  le  pri&onnier 
ne  faisait  qu'un  badinage.  Rien  de  plus  facile  à  expliquer  que 
ces  paroles.  C'est  une  chose  si  peu  importante,  que  je  suis  sur- 
pris qu'on  y  ait  attaché  autant  d'importance.   Le  prisonnier  était 


s  paris  sur  le 
ugé  général, 
lui  sera  fatal, 
•dessus,  de  ce 
on  dont  on  a 
défendre;  je 
i  stricte  vrri- 
!  répéter:  il 
I  n'y  a  plus  à 
de  la  miséri- 
une  rafidité 
l'on  voudrait 
rs,  c'est  une 
Ions  toujours 
la  clémence 

I  s'élève  con- 
ndividus.  Il 
àroit  conféré 
lubies.  Il  dit 


dans  les  dé 
e  à  l'accusé, 
tout  lecha- 
s  on  ne  doit 
t  celui  d'un 
ce  que  c'est 
5  témoigna- 

duquel  on 
[connaissent, 
eront  Lusi- 
aissent  pas, 
premier  de- 
On  doit 
împs  et  qui 
ide  sur  une 
it:  mais  on 
r,  Il  n'entre 

le  défunt, 
Dnclut  qu'il 
n  homme, 
i  que  Lusi- 
3  le  prison- 
ucher  chez 


ëi 


PROCiS 


./.■.lilA 


M»      «■!»*•%' 


ï!«i; 


r\ 


passé  avec  Charron  qui  était  complétemont  ivre  ;  le  témoin  Fon- 
taifie  l'avait  vu  pasHcr.  En  voyant  revenir  Beauregard,  Fontaine 
lui  demande  où  eHt  Chanon,  et  il  répond  :  *'  Ne  sois  pas  inquiet,  il 
est  bien,  il  va  comme  un  chapeau  qui  s'en  va  sur  l'eau." 
Quel  crime,  vraiment,  que  le  prisonnier  ait  fait  cette  réponse  à  un 
homme  de  police  :  "  Ne  soyez  pas  inquiets,  Charron  est  bien;  vous 
n'aurez  pas  à  le  mettre  à  la  police  ;  mais  il  est  bien,  il  va  comme 
un  chapeau  qui  s'en  va  sur  l'eau,"  c'est-à-dire,  il  est  si  en  train 
qu  il  se  balance  comme  un  chapeau  qui  s'en  va  sur  l'eau.  C'est 
une  comparaison  qui  se  présente  naturellement  à  l'esprit,  que  de 
représenter  la  marche  d'un  homme  ivre  comme  le  balancement, 
les  oscillations  d'un  objet  qui  flotte  sur  l'eau.  £tce  sont  ces  pa- 
roles, si  naturelles  et  si  simple:»,  que  la  malveillance  et  le  préjugé 
ont  interprétées  d'une  manière  si  odieuse  et  si  accablante  pour 
l'accusé."  L'orateur  fait  voir  que  la  santé  que  Louis  Fontaine  dit 
avoir  été  proposée  par  le  prisonnier,  en  l'honneur  de  celui  qui  ] 
s'en  allait  comme  un  chapeau  sur  l'eau,  est  une  invention  de  ce 
témoin,  personne  n'ayant  entendu  proposer  une  telle  santé  ;  que 
d'ailleurs,  dans  le  cas  que  Beauregard  eût  été  l'assassin,  il  est 
impossible  de  supposer  que  cet  homme,  encore  fumant  du  sang 
de  sa  victime,  aurait  eu  le  front  de  boire  à  la  santé  de  son  cada- 
vre  ;  c'était  se  dénoncer  clairement,  surtout  si,  comme  on  ledit, 
l'éveil  donné  par  les  cris  de  Cliarron,  eût  obligé  !e  prisonnier  à 
s'enfuir  à  l'approche  de  quelques  personnes. 

On  fait  encore  un  crime  au  prisonnier  d'avoir  eu  une  garcetie 
sur  lui,  ce  soir-là  ;  mois,  lorsqu'on  sait  qu'il  peut  y  avoir  du  bruit 
dans  les  lieux  où  l'on  doit  passer  ;  lorsqu'on  suppose  qu'on  pour- 
ra être  attaqué,  est-ce  un  si  grand  crime  que  d'avoir  une  arme  pour 
se  défendre  ;  Un  homme  riche  pourra  porter  impunément  un  pis- 
tolet sur  lui,  parce  qu'il  a  quelqu'argeut  à  protéger,  et  un  pauvre 
malheureux  qui  croira  sa  vie  exposée,  sera  incriminé,  pour  avoir 
porté,  pour  se  défendre,  une  arme  aussi  commune  qu^une  garcette. 
Et  puis,  si  le  prisonnier  avait  médité  un  crime,  il  n'aurait  pas  mon- 
tré cette  arme  à  tout  le  monde,  comme  il  Ta  fait  Cette  franchise, 
ces  badinages  avec  tout  le  monde,  sont  une  preuve  des  plus  for- 
tes, que  le  prisonnier  n'avait  jamais  eu  l'idée  du  crime  qu'on  lui 
impute,  et  que  des  suppositions  malveillantes,  aidées  par  la  hon- 
teuse délation  d'un  parjure,  sont  les  seules  preuves  qu'on  puisse 
avoir  contre  l'accusé.  ,,  s,}^ 

L'orateur  discute  ensuite  les  témoignages  des  médecins.  Il 
fait  remarquer  qu'il  y  a  contradiction  entre  leurs  avancés  et  leurs 
conclusions,  et  les  faits  de  la  cause.  "Les  anciens  médedins,  dit-il, 
ont  conclu  que  le  défunt  n'était  pas  mort  par  submersion,  mais 
qu'il  avait  été  assommé  avant  d'être  jeté  à  l'eau  ;  qu'il  était  im- 
possible qu'il  se  fut  tué  en  tou'bant  sur  un  corps  qui  se  trouvait 
dans  l'eau,  parce  que,  disent-ils,  on  a  trouvé  du  sang  coagulé  sur 
le  défunt  ;  or,  le  sang  ne  se  coagule  qu'après  un  quart  d'heure  au 
mpins  :  donc,.si  le  défunt. était  tombé  sur  un  coirp^  contqpd^nt  qui^, 
ser  irbtlvait  dans  feaùile  sang'  n'àuiràit'  été  exposé  à  l'aur  que 


3uelq 
onc, 
prend 
faiUil 
comp 
Chari 
Bei 
porte 
te  qu 
jeter 
consol 
rait 

L'î 
méde 
re,  80 
sur  h 
de  l' 
vées  i 
I  sont 
le  prj 
d'un 
faite 
lecac 
L'c 
aux  j 
tout 
doitt 
cence 
marq 
longi 
triom 
Di 
réal, 
faire 
trate 
mens 
tômc 
sesr 
avec 
est  r 
quoi 
du  c 
impi 
ton; 
lait( 
si  le 


1 


BEAURBOAIID. 


a& 


^moin  Fon- 
i,  Fontuine 
8  inquiet,  il 
sur  l«eau." 
iponsti  À  un 
:  bien;  vous 
I  va  comme 
si  en  train 
îiiu.  C'est 
>rit,  que  de 
lancement, 
ont  ces  pa- 
le préjugé 
)lante  pour 
ontaine  dit 
e  celui  qui 
ition  de  ce 
santé  ;  que 
issin,  il  est 
nt  du  sang 
son  cada> 
e  on  le  dit, 
risonnier  à 

e  garceiie 
ir  du  bruit 
iï*on  pour- 
arme  pour 
!nt  un  pis- 
un  pauvre 
3our  avoir 
e  garcette. 
pas  mon- 
franchise, 
plus  for- 
qu'on  lui 
ar  la  hon- 
on  puisse 

ecins.  II 
s  et  leurs 
ins,  dit-il, 
ion,  mais 

était  im- 
j  trouvait 
agulé  sur 
'heure  au 
ïî<%ïLtqui, 

l'aur  que 


Quelques  instants,  et  n'aurait  pas  eu  le  temps  de  se  coaguler  ; 
onc,  ce  n'est  pas  ainsi  que  le  défunt  est  mort.  Mais  si  le  sang 
prend  au  moins  un  qurrt  d'heure  pour  se  coaguler,  comment  se 
faiUil  que  Beauregard  qui  n'a  mis  qu'un  quart  d'heure  pour  ac- 
complir, dit-on,  tout  son  crime,  ait  pu  être  celui  qui  a  assommé 
Charron  et  l'a  ensuite  jeté  à  l'eau. 

Beauregard  aur-iit  dû  mettre  cinq  ou  six  minutes  pour  trans- 
porter un  homme  ivre  sur  le  pont,  et  autant  pour  revenir,  de  sor- 
te qu'il  n'aurait  eu  que  quatre  à  cinq  minutes  pour  le  tuer  et  le 
jeter  à  l'eau.  Alors,  il  faut  conclure  que  ce  n'est  pas  lui  qui  a 
consommé  le  crime,  car  en  trois  ou  quatre  minutes,  le  sang  n'au- 
rait pas  eu  le  temps  de  se  coaguler. 

L'o»rateur  fait  voir  que  ces  contradictions  des  témoignages  des 
médecins  avec  les  faits,  expliquent  un  mystère  qui  sera,  il  l'espè- 
re, soulevé  plus  tard.  On  a  trouvé  une  fosse  fraîchement  remuée 
sur  la  terre  de  Cadoret  près  de  l'endroit  où  on  a  retiré  le  défunt 
de  l'eau.  Cette  fosse  rend  compte  des  mottes  de  terre  trou- 
vées dans  les  habits  du  défunt  ;  cette  terre  trouvée  dans  les  habits 
sont  une  preuve  évidente  que  le  défunt  n'a  pas  été  assassiné  par 
le  prisonnier  comme  on  l'a  dit,  mais  qu'il  a  dû  être  la  viclluîe 
d'un  assassinat  subséquent  ;  c'est  ce  que  prouvent  aussi  la  par- 
faite conservation  du  corps  et  l'odeur  d'alcool  qu'exhalait  encore 
le  cadavre. 

L'orateur  fait  un  résumé  de  sa  défense,  et  termine  en  rappelant 
aux  jurés  la  gravité  de  leur  charge,  l'indépendance  où  ils  sont  de 
tout  contrôle  excepté  de  leur  conscience.  Il  dit  que  le  doute 
doit  toujours  être  au  bénéfice  de  l'accusé.  Il  proteste  de  l'inno- 
cence de  l'accusé,  de  sa  franchise  dans  sa  défense.  Il  fait  re- 
marquer qu'il  n'a  eu  que  quelques  heures  pour  se  préparer  à  cette 
longue  défense,  et  il  se  confie  en  l'intelligence  des  jurés  pour  le 
triomphe  de  sa    cause  et   l'acquittement  du  prisonnier. 

DR.  CRAIG. — Je  suis  médecin  de  l'hôpital  anglais  ,  à  Mont- 
réal, depuis  6  à  6  ans.  Comme  tel,  j'ai  souvent  eu  l'occasion  de 
faire  plusieurs  autopsies  et  analyses  chimiques.  Je  suis  démons* 
trateur  d'anatomie,  et  je  suis,  pendant  six  mois,  à  faire  des  exa- 
mens semblables.  J'ai  entendu  le  Dr.  Beaubien  décrire  les  symp 
tomes  qu'il  a  trouvés  sur  le  cadavre  de  Charron  ;  j'ai  entendu 
ses  raisons,  et  je  ne  peux  pas  dire  que  je  m'accorde  entièrement 
avec  lui.  Je  ne  vois  aucune  marque,  pour  dire  que  l'individu 
est  mort  de  commotion  du  cerveau  ;  il  m'est  difficile  de  dire  de 
quoi  il  est  mort.  Je  ne  puis  dire  qu'il  est  décédé  par  commotion 
du  cerveau  ;  mais  plutôt  d'asphysie.  J'ai  vu  le  mouchoir,  encore 
imprégné  de  sang  ;  il  est  possible  que  ce  sang  soit  venu  du  men- 
ton ;  il  aurait  fallu  quinze  minutes  pour  que  le  sang  qui  cou- 
lait de  cette  blessure,  imprégnât  ainsi  ce  mouchoir.  Je  pense  que 
si  le  cadavre  eût  été  à  l'eau,  quinze  minutes  après  sa  mort,  le  sang 
n'aurait  pas  été  aussi  visible.  J'ai  entendu  le  médecin  donner 
l'état  du  cœur.  Je  dis  que,  danî«  ce  cas,  je  ne  pourrais  jurer  que 
je  ne  me  serais  pas  attendu  à  le  trouver  dans  cet  état»  l'individu 


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étant  mort  par  une  commotion  du  cerveau  ;  je  ne  prétends  pas 
dire  qu'il  ne  s^ent  pas  noyé  ;  les  symptômes^ de  mort,  par  sub* 
mersion,  vurrient  beaucoup.  Dans  le  cas  de  mort  par  submersion, 
les  poumons  ne  sont  pas  toujours  congestionnés. 

Par  M.  Johnson. — Je  disque  le  cadavre  avait  des  symptômes 
d'asphyxie;  mais  qu'il  n'y  avait  pas  de  commotion  du  cerveau. 
Ceux  qui  ont  examine-  le  cadavre  étaient,  plus  que  moi,  en  état  de 
dire  de  quoi  il  est  niort. 

Par  la  Cour.— Je  dis  que  tout  ce  qui  a  é^  remarqué  sur  le  der- 
rière de  la  tête  du  défunt,  par  le  Dr.  Beaubien,  pouvait  être  causé 
par  une  seule  chute,  l^e  sang  pouvait  se  réunir  en  cet  endroit, 
le  cadavre  étant  sur  le  dos.  Ça  pouvait  être  produit  par  des 
coups  de  garcette.  Je  considère  qu'il  n'y  a  pas  de  preuve,  d'a- 
près ce  que  j'ai  entendu,  que  la  mort  a  été  causée  par  la  violence 
seule. 

lie  cerveau  était  dans  une  telle  condition,  qu'on  ne  pouvait  pas 
lui  faire  subir  un  examen  complet,  et  ainsi,  préciser  la  cause 
de  la  mort.  Je  ne  puis  pas  dire  qu'il  y  ait  eu  dans  le  cerveau 
une  maladie  mortelle  ;  cela  se  pourrait,  mais  je  ne  pourrais  pas  le 
jurer  : — Lorsqu'une  personne  a  une  maladie  dans  le  cerveau,  elle 
meurt  en  très  peu  de  temps,  si  on  lui  inflige  des  coups  sur  les 
tempes  ou  sur  le  derrière  de  la  tête.  En  rabsence  de  fractures, 
la  mort  pourrait  encore  être  occasionnée.  Le  crâne  n'étant  pas 
brisé,  il  peut  y  avoir  inflammation  do  cerveau  ou  rupture  d'un 
vaisseau,  causant  l'asphyxie.  Là  où  le  défunt  a  été  frappé,  il  y  a 
des  muscles  qui  auraient  pu  empêcher  l'os  d'être  brisé.  Je  con- 
sidère que  le  cerveau  d'une  personne  doit-être  en  putréfaction, 
quand  le  cadavre  a  été  sous  Teau  pendant  32  jours.  Dans  le 
cas  oti  cette  immersion  serait  faite  dans  le  temps  où  Charron  a 
été  jeté  à  l'eau,  je  ne  pourrais  former  d'opinion. 

DR  CREVIER — Le  deux  avril  dernier,  je  demeurais  à  St.  p 
Hyacinthe.  J'ai  été  assigné  par  la  Couronne,  mais  je  n'ai  pas  f| 
donné  mon  témoignage.  J'ai  vu  le  corps,  avant  qu'il  fut  tiré  de  | 
l'eau,  vers  9  à  heures.  L'autopsie  n'a  été  faite  par  les  médecins 
que  24  heures  après  que  le  cadavre  a  été  trouvé.  Je  dois  faire 
remarquer  que  le  corps  a  toujours  été  à  reau,jusqu'à  ce  qu'il  fût 
transporté  chez  Luasier,  où  on  eut  soin  de  le  couvrir  de  glace. 
Il  n'a  été  découvert  qu'au  moment  de  l'autopsie.  (Le  témoin 
donne  des  détails  sur  la  position  du  cadavre,  semblables  h  ceux 
déjà  donnés,  corrobore  le  témoignage  du  Dr.  Beaubien,  quant  aux 
blessures  sur  le  menton  et  à  la  racine  du  nez  ;  puis  il  ajoute.)  Le 
cadavre  donnait  une  légère  odeur  de  putréfaction.  Des  caillots 
attachés  aux  blessures  ne  se  sont  pas  formés  à  l'eau.  La  contu- 
sion, à  la  racine  du  nez,  pouvait  avoir  été  faite  après  la  mort  de 
ilndividu.  L'action  de  l'eau  conserve  un  cadavre,  mais  de  deux 
cadavres  que  l'on  gardera  pendant  un  même  temps,  celui  qui 
aura  été  exposé  à  l'action  de  l'eau,  puis  ensuit»  à  celle  de  l'air, 
•serait  plus  en  putréfiiction  que  celui  exposé  seulement  à  Vnc- 
4ioa  AA^Yjùt,  Le. corps  n'ii.  été  jeté  à  l'eaa  4u'aprÀa.lft^  CQAga- 


Iffra 


prétends  pas! 

lort,  pnr  «ub- 

submemon, 

i  symptôrues 
du  cerveau. 
)i,  en  état  de 

é  sur  le  dcr- 
it  être  causé 

cet  endroit,  ] 
duit  par  des  •. 

preuve,  d'à- 1 
r  la  violence 

;  pouvait  pas 
er  la  cause 

le  cerveau 
urrais  pas  le 
cerveau,  elle 
ups  sur  les 
le  fractures, 
n'étant  pas 
upture  d'un 
Tappé,  il  y  a 
se.  Je  con- 
putréfaction, 
s.     Dans  le 

Charron  a 

iurais  à  St. 
s  je  n'ai  pas 
1  fut  tiré  de 
es  médecins 
e  dois  faire 
.  ce  qu'il  fût 
ir  de  glace. 
(Le  témoin 
blés  à  ceux 
n,  quant  aux 

ajoute.)  Le 
Des  caillots 
.  La  contu- 

la  mort  de 
is  de  deux 
I,  celui  qui 
lie  de  l'air, 
3nt    à  l'ac- 


Ifltion  du  san^.  Le  san^  pouvait  se  coaguler  sur  la  chemise  do 
défunt,  entre  5  et  10  minutoH.  Pour  que  les  taches  de  sang  fua> 
sent  faites,  il  fallait  que  Tindi  idu  fut  assis  ou  debout. 

Les  blessures  que  j'ai  reuiiii-quées  sur  le  derrière  de  la  té'e, 
ont  été  produites  par  plusieurs  chutes  ou  coups.  La  substance 
cérébrale  était  très  molle,  dans  le  même  état  que  du  fromage 
rafmd,  ayant  encore  assez  de  consistance  pour  ne  pas  s'affaisser 
au  complet.  L'intérieur  du  cerveau  avait  plus  de  consistiince 
que  les  parties  du  dehors.  Les  cheveux  étiiit  impreignés  de  terre 
et  de  vase  ;  il  y  en  avait  aussi  sur  les  habits.  Jl  y  a  de  la  terre 
de  cette  nature,  là  où  le  corps  a  été  trouvé.  11  y  a  aussi  de  la 
terre  argileuse  au  fond  de  la  rivière,  près  du  pont  l'Heureux, 
l'eau  suivant  les  côtes  en  cet  endroit.  La  terre  argileuse  attaché, 
au  cadavre,  pouvait  provenir  de  là.  ,.j 

Par  M.  Johnson.  —  Je  connais  le  fond  de  la  rivière  ;  je  ne  suie 
pas  étonné  qu'on  ait  trouvé  de  la  terre  argileuse  attachée  au 
cadavre.  J'attribue  son  état  de  conservation  à  la  fraieheur  de 
l'eau,  au  moment  où  le  cadavre  a  été  immergé.  Je  suis  de  l'avis 
du  Dr.  Beaubien,  quant  aux  causes  de  la  mort  de  Charron.  —  Si 
le  corps  avait  été  jeté  à  l'ean,  aussitôt  après  que  les  taches  de 
sang  eurent  été  formées  sur  les  habits,  Teau  les  aurait  effacées 
plus  qu'elles  ne  l'étaient, —  J'ai  remarqué,  dans  l'estomac,  des  li- 
gaments présentant  quelque  chose  comme  des  huitres,  non 
encore  décomposées.  Je  dis,  enfin,  que  l'individu  éUint  ivre,  le 
coup  qui  a  causé  la  mort,  a  du  être  moins  fort  qu'il  ne  l'eût 
été,  si  l'individu  avait  été  dans  son  état  normal. 

DR.  HOWARD  : —  Je  suis  professeur  de  clinique  et  de  juris- 
prudence médicale.  Comme  tel,  j'ai  l'habitude  de  donner  des  lec- 
tures sur  l'tiutopsie  des  cadavres.  Ordinairement,  dans  le  cas  de 
mort  par  asphyxie,  le  cerveau  est  congestionné,  mais  pas  tou- 
jours. Le  côté  droit  du  cœur  est  rempli  de  sang.  L'état  que  pré- 
sente le  cadavre  d'un  homme  mort  par  commotion,  est  celui-ci: 
en  général,  le  cerveau  est  dans  son  état  naturel  ;  I-^s  deux  côtés 
du  cœur,  contiennent  la  même  quantité  de  san^,  et  les  poumons 
ne  sont  pas  congestionnés.  Quand  l'individu  meurt  par  asphysie, 
le  cerveau  et  les  poumons  sont  congestionnés.  —  La  ventricule 
gauche  du  cœur  ne  contient  que  peu  de  sang. — Un  poumon  trem- 
pé dans  l'eau,  peut  être  congestionné  et  flotter.  11  peut  y  avoir, 
chez  une  personne  de  47  ans,  une  maladie  dont  le  résultat  serait 
de  ramollir  son  cerveau,  sans  que  la  personne  s'en  aperçut,  et 
qui  causerait  la  mort  subite.  Un  cerveau  qui  aurait  passé  32 
jours  sous  l'eau,  serait  en  décomposition, d'après  mon  opinion. 

Il  est  difficile  de  distinguer  entre  des  blessures  faites  avant  la 
mort  ou  après,  surtout  quand  le  corps  est  resté  longtemps  à 
l'eau  ;  car  en  voyant  que  les  blessures  remarquées  sur  la  tête  du 
défunt,  je  n'aurais  pas  pu  former  une  opinion  sur  la  cause  de  sa 
mort. 

DR  FENWICK.—  Je  pratique  depuis.  1847.  Lorsque  c'est 
4j^  coumôtian  4u  oevveaa  qulii^coaséJa  moitvle  cârvcAU^ie 


38 


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cœur  sont  dans  le  méirie' êtet  que  pendant  la  vie  de  l'individu. 
Dans  un  cas  d'asphyxie,  je  m'attendrais  à  trouver  le  foie  conges- 
tionné. Je  considère  que  le  cerveau  d'une  pei*sonne  qui  aurait 
éié  sous  l'eau  pendant  32  jours,  au  commencement  d'avril,  serait 
dans  un  état  de  décomposition  avancé.  Une  personne  peut  avoir 
une  maladie  du  cerveau  propre  à  le  ramollir,  sans  qu'elle  s'en 
aperçoive  ;  dans  ce  cas,  la  mort  est  nubile. 

Par  la  Cour  :  —  Si  une  personne  attaquée  de  cette  maladie, 
recevait  des  coups  oîL  le  défuht  en  a  reçus,  ça  occasionnerait 
ou  hâterait  sa  mort. 

PIERRE  LAFLAMME .—  (Témoin  déjà  entendu.  ) Je  connais 
Joseph  Lusignan.  il  est  sellier.  Je  ne  l'ai  pas  vu  chez  moi  le  deux 
avril,  et  je  ne  l'ai  jamais  engagé  à  y  venir.  J'ai  servi  plubieurs 
traites  ce  soir-là,  mais  je  n'ai  pas  vu  Lusi^nan. 

Par  M.  Johnson;  —  Je  ne  puis  pas  dire  combien  de  traites 
j'ai  serviaa,  et  il  me  serait  difficile  de  dire  quelles  font  les  per- 
sonnes qui  sont  venues  chez  moi,  ce  soir-là.  —  J'ai  bu  plusieurs 
coups  —  Je  ne  puis  pas  jurer  que  Lusignan  ne  soit  pas  venu 
chez  moi  le  soir  en  question. 

LEON  DUCHARME.--(Témoins  déjà  entendu.  (Lrsignan 
est  venu  chez  moi  quelques  fois.  Je  me  suis  levé  vers  quatre  ou 
cinq  heures,  le  3  avril,  et  j'ai  déjeûné  vers  huit  heures.  Pendant 
ce  temps  je  suis  toujours  resté  dans  ma  barre,  et  je  n'ai  pas  vu 
Lusignan.  Le  soir  du  2  avril,  je  suis  sorti  de  chez  moi  vers 
onze  heures  ;  il  faisait  tellement  noir,  qu'on  ne  pouvait  reconnaîtra 
une  personne  à  quelques  pieds. — Je  n'aimais  pas  que  Lusignan 
vînt  chez  moi  ;  je  lui  a  dit  que  je  n'aimais  pas  à  le  voir,  parcequHl 
ne  payait  pas  et  qu'il  buvait  trop. — Je  me  rappelle  que,  vers  ce 
temps-là,  la  femme  Rosalie  Desmarais  s'est  retirée  chez  moi. 
Elle  est  arrivée  le  deux,  et  le  trois,  elle  s'est  fait  mal  à  un  pied. 
Sa  chambre  était  dans  le  haut  de  la  maison.  Je  crois  qu'elle  y 
a  passé  la  journée  du  dimanche,  le  3.  Je  ne  l'ai  pas  vue  dans  la 
barre,  ce  jour-là. 

Par  la  Couronne. — Je  suis  allé  à  la  messe,  le  dimanche. 
Je  ne  puis  pas  jurer  que  Lusignan  ne  soit  pas  venu  chez  moi 
pendant  que  je  n'y  étais  pas. 

CHARLES  VITAL. — Je  me  rappelle  que.  vendredi  îe  1er 
ami,  il  y  a  eu  séance  du  Conseil,  au  sujet  des  licences  à  accor- 
der. J'ai  eu  une  conversation  avec  le  prisonnier  à  ce  sujet.  Le 
prisonnier  ayant  présenté  une  requête  pot'r  avoir  une  licenoo-  de 
tempérance,  je  lui  ai  dit  :  "  Pourquoi  deraandes-tu  une  licence  de 
tempérance  ;  le  juge  a  per^é  que  tu  voulais  le  tromper."  J'ajou- 
tai ensuite:  "  Faites  une  autre  requête  mon  brave  homme,  si 
vous  obtenez  votre  licence,  pour  vendre  iies  liqueurs  fortes,  je 
vjus  avancerai  $20,  sur  votre  billet,  sans  intérêt.  J'étais  pré- 
sent lorsque  Lusignan  a  donné  sa  déposition  devant  le  magistrat. 
Il  était  près  de  moi  ;  je  lui  ai  dit:  "Vous  sentez  la  boisson; 
vous  êtes  ivre  :  retirez  vous  donc."  Cette  fois,  il  n'était  dans 
la  cour  que  comme  spoctateur,  il  ne  s'est  pas  pi^scaté  pour 


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Je  connais 
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i  de  traites 

jt  les  per- 

]  plusieurs 

pas  venu 

(Lrsîgnan 

quatre  ou 

s.  Pendant 

l'ai  pas  vu 

moi  vers 

econnaîlra 

Lusignan 

|,  parcequHl 

Hfc  vers  ce 

chez  moi. 

î\  un  pied. 

qu'elle  y 

lue  dans  la 

I  dimanche, 
choz  moi 

ledi  !e  1er 
Is  à  accor- 
jujet.  Le 
lieenoo  de 
licence  de 
[•»  .î'ajou- 
^omme,  si 
fortes,  je 
tais  pré- 
lagistrat. 
b()is**on  ; 
itait  dans 
lié  pour 


...    L   ,....?  »„.'.-     BSA0RE6AR0.    '  *f?R^     "r.'^r  "j?s>i   59 

donner  son  témoignage  devant  les  magistrats.    Plus  tard,  il  a 
été  assigné. 


qu 

billet 

sa  licence. 

JOSEPH  St.  germain,  fils— Je  connais  bien  le  pont  Bi- 
ron,  oh  je  passe  souvent  ;  ce  pont  était  en  mauvais  état,  le  2 
avril  ;  on  commençait  à  le  réparer.  Vers  ce  temps,  ai  je  me  rap- 
pelle bien,  plusieurs  gardes-corps  manquaient. 

La  réputation  de  Joseph  Lusignan  est  très  mauvaise.  D'a- 
près ce  que  je  connais,  je  ne  le  croirais  pas  sous  serment 

Par  la  Couronne. — J«  n'ai  jamais  entendu  dire  que  Lusignan 
ait  fait  de  faux  serments.  On  dit  qu'il  tient  une  maison  de  dé- 
bauche, qu'il  garde  les  effets  ou  argent  qu'on  lui  met  entre  les 
mainh.    De  ceci,  je  n'en  connais  rien,  par  moi-mârae. 

CÉLESTIN  PARENT.—J'ai  été  inspecteur  du  revenu  à  St. 
Hyacinthe  ;  je  connais  Lusignan  depuie  15  ans  ;  je  ne  le  croirais 
pas  sous  serment. 

Par  M-  Johnson. — Je  ne  le  croirais  pas,  parce  qu'il  a  dit, 
sous  serment  qu'une  chose  était  fausse,  lorsque  je  savais  qu'elle 
était  vraie. 

FRANÇOIS  TISSIER  :— Je  connais  Lusignan  depuis  nom- 
bre  d'années.  Je  ne  lui  connais  aucune  réputation  bonne  :  du 
moins,  depuis  que  je  le  connais.  Je  ne  le  croirais  pas  sous  ser- 
ment, surtout  dans  une  affaire  où  il  "urait  de  Tintéiét. 

Par  M.  Johnson. — Je  n'ai  pas  connaissîince  qu'il  ait  fait  de 
faux  serments,  mais  pour  moi,  je  ne  le  croirais  pas. 

NARCISSE  LADÉROUTE.--Je  demeure  à  St.  Hyacinthe 
depuis  24  ans  Je  connais  Lusignan  depuis  environ  23,  il  a  la 
réputation  d'être  ivrogne-  Je  ne  le  croirais  pas  sous  serment. 

Par  M.  Johnson. — Dans  une  cause  où  j'étais  demandeur,  Lu- 
signan a  juré  que  l'argent  que  je  réclamais  avait  été  payé,  tandis 
qu'il  ne  1  avait  pas  été. 

ONÉSIME  GÉNÉREUX.  —  Je  sais  que  la  famille  de  Beau- 
regard  a  été  dans  la  détresse  depuis  le  deux  avril  ;  ce  sont  les 
voisins  qui  l'ont  fait  vivre. 

FELIX  ROBITAILLE.—  J'étais  chez  Laflamme,  le  2  avril 
dernier.  Je  suis  resté  dans  la  barre,  pendant  à  peu  près  une  de- 
mie heure;  le  reste  du  temps,  je  l'ai  passé  en  haut,  j'éttusep  bas, 
qw.and  il  y  a  eu  du  bruit  entre  Soly  et  Paillon.  Durant  ce  temps 
Lusignan  n'était  pas  là.  Je  n'ai  pas  éteint  la  chandelle.  Je  con- 
nais Lusignan,  et  je  suis  positif  à  dire  que  Lusignan  n'était  pas 
chez  Laflamme,  lorsque  les  chandelles  ont  été  éteintes. — Je  con- 
nais Fontaine  l'homme  de  police  ;  je  ne  le  croirais  pas  toujours 
sous  serment. — Je  connais  le  caractère  général  de  Lut^ignan  ; 
c'est  un  homme  de  rien  ;  je  ne  le  çroiniis  pas  spiys  serment.  ^. 
''l'âV-M;^îbhii8Ôn.— ta  raison  quî  me  fait  dire  que  je  ne  ci  di- 
rais pas  Lusignan  sous  sermeot,  c'est  qu'il  s'est  contredit,  daos 


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40 


PROCÈS 


les  dépositions  données  devant  le  magistrat  à  St.  Hyacintlie,  et 
devant  le  coroner. — Je  ne  connais  pas  les  autres  dépositions. 

OCTAVE  MAURICiS  déjà  entendu.— Je  ne  sais  pas  s'il  y  a 
eu  des  chandelles  éteintes,  le  soir  du  2  avril,  chez  Laâamme,  du 
moins  pendant  que  j'y  étais  ;  j'y  suis  demeuré  pendant  10  à  12  mi- 
nutes, de  9^  à  10  heures  ;  je  n'v  ai  pas  vu  Lusignan. 
.  NARCISSE  ST.  GERMAIN,  déjà  examiné.— Je  passe  sur  le 
*Pont  Biron,  presque  tous  les  jours  ;  je  sais  que  le  2  avril  dernier, 
entre  la  2e  et  la  3e  arcade,  il  y  avait  un  banc  du  garde-corps 
démanché.  J'ai  toujours  connu  le  prisonnier  pour  un  pauvre 
homme  ;  après  son  arrestation  je  suis  allé  à  la  police,  le  voir.  Il 
m'a  dit  en  pleurant  "Je  n'ai  jamais  été  aussi  mal  qu'à  présent  ; 
je  n'ai  pas  mômo  un  sou,  pour  m'acheter  du  tabic,"  Il  m'a 
chargé  de  vendre  son  fusil,  en  me  disant  :  "  Je  ne  laisse  qu'un 
un  pain  à  ma  famille,  et  encore  c'est  un  pain  qu'on  m'a  donné." 
— J'ai  vendu  son  fusil  quatre  piastres  ;  j'ai  été  lui  porter  l'argent 
et  il  m'a  dit  :  "  Donnes-  moi  seulement  un  écu,  et  porte  le 
reste  à  ma  famille."  Après  le  2  avril,  j'ai  vu  Beauregard  ramaéser 
des  écorces  ;  près  d'un  moulin,  le  meunier  l'a  envoyé. — J*ai  en- 
suite vu  ses  enfants  ramasser  des  écorces. — Le  dimanche  qui  a 
suivi  le  2  avril,  j'ai  joué  aux  cartes  avec  le  prisonnier  ;  il  s'est 
endetté  d'un  louis,  mais  il  n'avait  que  36  sous. 

Par  M.  Johnson  ; — Il  dit  la  même  chose,  relativement  au  pont, 
que  ce  que  l'on  a  déjà  eu  au  commencement  de  l'examen  en  chef. 

Vendredi,  le  14  octobre  1S59. 

On  procède  de  suite  à  l'audition  des  témoins  dont  les 
nomo  suivent,  et  qni  déclarent  que  tout  en  considérant 
que  le  témoin  Lusignan  est  un  ivi0gne,ils  n'hésiteraient 
pas  à  le  croire  sous  serment  : 

L'hon.  Dessaulles,  M.  LecUire,  M.  Starnes,  Dr. 
Malhiot,  MM.  Page  et  Guernon. 

Après  une  seconde  et  courte  adres^se  des  Avo^»ats  de 
la  défense  sur  la  crédibilité  du  témoin   Lusignan, 

M.  JOF  .<fSON  se  lève,  et  au  nom  de  la  couronne,  adresse  la 
parole  au  jury.  Son  discours,  admirable  d'éloquence  ot  de  raisonne- 
ment, fit  une  impression  profonde  sur  tout  l'auditoire.  Il  dit  "  qu'il 
a  été  fait  contre  le  prisonnier  une  preuve  directe  corroborée  par  une 
preuve  de  circonstances  ;  il  montre  avec  force  l'évidence  qui  résul- 
te de  ces  deux  preuves  réunies,  et  prétend  que  le  jury  ne  peut  arri- 
ver à  une  autre  conclusion  que  celle-ci  :  l'infortuné  Charron  est 
tombé  victime  de  la  cupidité  du  prisonnier  à  la  barre.  Les  témoi- 
gnages des  médecins  établissent  clairement  et  positivement  que  '.e 
aétunt  a  été  d'abord  tué,  puis  ensuite,  jeté  à  la  rivière.  Lusigi  a 
fournit  les  détails  du  crime.  Il  a  vu  tuer  Charron,  et  quoiqu'il  ne 
puisse  dire  le  nombre  de  coups  infligés  s'  r  la  tête  du  défunt,  ce 
qu'il  .V  vu  est  suffisant  pour  établir  la  culpabilité  du  prisonnier;  et 
ba  déposition  est  pleinement  corroborée  par  la  preuve  de  circons- 
tances produite.  A  la  véritéj  c'est  un  témoignage  suspect,  mais  étant 
corroboré  comme  il  l'est,  il  a  tout  le  crédit  qu'if  pourrait  iivoir 


11 
c< 


inthe,  et 
liions. 
3  s'il  y  a 
mme,  du 
)  à  12  mi- 
sse sur  le 
il  dernier, 
irde-corps 
n  pauvre 
j  voir.    Il 
k  présent  ; 
c.  '  Il  m'a 
isse  quhin 
»a  donné." 
er  l'argent 
i  porte  le 
d  ramaéser 
s. — J*ai  en- 
iche  qui  a 
sr;  il    s'est 

iiit  au  pont, 
lenenchef. 

e  1S59. 
s  dont  les 
►nsidèrant 
imiteraient 

mes,    Dr. 

Ivo^'ats  de 

^nan, 
.    adresse  la 
de  rai  sonne - 
Il  dit  "  qu'il 
)orée  par  une 
ce  qui  résul- 
le  peut  arri- 
5  Charron  est 
Les  témoi- 
;ment  que  'e 
e.    Lusigi    a 
t  quoiqu'il  ne 
du  défunt,  ce 
Tisonnier;  et 
e  de  circons- 
ct,  mais  étant 
;)ourrait  Jivoir 


BEAUREOARD.  itl 

-~- '•-"'"'■  ■,.i?' 

sans  le  soupçon  de  complicité  qui  est  attaché  au  témoin.  Le  savant 
avocat  exhorte  Je  jury  à  peser  la  terrible  responsabilité  de  sa  charge* 

"  On  a  essayé  "  dit  l'éloquent  orateur  "  à  exciter  vos  sympathies 
en  faveur  du  prisonnier 4  la  barre  ;  et  vraiment,  s'il  fut  jamais  un 
homme  digne  de  pitié,  c'est  ^ien  celui  qui  se  trouve  dans  là.  posi- 
tion du  prisonnier,  chargé  d'un  crime,  le  plus  révoltant,  le  plus  froi- 
dement médité  et  le  plus  cruel  que  l'on  puisse  rencontrer  dans  les 
annales  du  prime. 

"  Mais,  d'un  autre  côté,  ne  doit-on  rien  à  la  mémoire  de  l'infortu- 
née victime  dont  le  sang  crie  vengeance  du  fond  de  la  tombe  où  elle 
est  enfermée  1  Ne  doit-on  rien  aux  intérêts  de  la  société,  à  la  pro- 
tection de  la  vie  publique,  au  châtiment  des  meurtriers  et  à  la  ré- 
pression du  crime. 

''  La  défense  a  essayé  de  vous  faire  croire  que  lej  blessures  et  les 
contusions  qui  ont  été  remarquées  sur  la  tête  et  sur  la  figure  du 
défunt,  étaient  l'effet  des  pierres  qui  se  trouvent  dans  le  lit  de 
la  rivière. 

"  Mais,  messieurs,  seraient-ce  donc  des  pierres  inertes  qui  auraient 
poussé  ce  douloureux  cri  de  détresse  et  d'angoisse.  **  Ne  me  tue  pas, 
ne  me  tue  pas  1"  Est-ce  donc  cela  qui  a  fait  arrêter  la  montre  du 
défunt  justement  à  l'heure  ou  l'on  a  prouvé  que  cet  acte  atroce 
a  été  consommé  1  Sont-ce  es  roches  qui  ont  donné  l'alarme  à  ce 
pauvre  animal,  dont  les  aboiements  ont  été  entendus  par  sept  ou 
huit  témoins,  qui  donna  le  signal  de  la  détresse  en  allant  et  revenant 
du  cc*^^é  de  la  rivière  où  le  cadavre  de  la  victime  avait  été  jeté  1  . . . 
il  '? .  '  ce  les  pierres  qui  auraient  fourni  au  meurtrier,  le  gain  in- 
iiiuif  ae  son  crime,  qui  auraient  donné  au  prisonnier  la  moitié  de 
l'argent  du  malheureux  Charron,  dont  il  a  été  trouvé  en  pos- 
session, d'après  une  preuve  évidence. 

''  Je  le  dissincèrement  ;  plût  à  Dieu  que  cet  homme  eut  été  trouvé 
innocent  du  crime  dont  on  l'accuse  !  Plût  à  Dieu  que  les  jurés 
n'aient  pas  eu  à  remplir  le  pénible  devoir  qu'ils  devront  bientôt 
accomplir  !  J'aurais  été  heureux  de  voir,  dans  la  cause,  l'ombre 
même  d'un  doute  dont  on  eût  pu  donner  le  bénéfice  à  l'accusé  ; 
mais  il  n'y  a  pas  même  l'apparence  d'un  doute,  et  le  seul  verdict 
que  vous  puissiez  rendre,  pour  la  satisfaction  de  votre  conscience, 
est,  malheureusement,  de  déclarer  le  prisonnier  coupable  sous  les 
circonstances  les  plus  aggravantes." 

Le  prisonnier .  dont  la  contenance  avait  extraordinairement  changé 
depuis  le  coH''  '  '  "        "   '      "  * 

hagard  j  so.     > 
à  une  vive  4      ' 
et  sa  figure  rep; 


aoement  du  procès,  devint  à  ce  moment,  pâle  et 
si  inquiet  et  troublé  annonçait  qu'il  était  en  proie 
ji;  Cependant,  il  réussit  à  comprimer  son  trouble 
froideur  habituelle. 


t  jtf, 


Son  honneur  le  Juge  Aylwiu  donna  alors  sa  charge,  après  quoi 
il  fit  la  lecture  de  tous  les  témoignages,  en  français  ei  en  anglais  ; 
ce  qui  occupa  la  Cour  d  "lis  une  heure,  A.  M.,  vendredi,  jusqu'au 
lendemain  à  2  heures  de  i'après-nudi.  Voici  un  résumé  coucis  de 
de  cette  charge. 

Messieurs  du  jury.— Je  dois  maintenant  vous  dire  ce  que  j'ai 
déjà  dit,  r  ;3  cette  cause  a  pris  plus  de  temps  qu'aucune  autre  cause 
criminel'  vîtii  soit  à  ma  connaissance.  Un  grand  nombre  de  té- 
moins ont  cv  i  ei  aminés,  et  une  multitude  de  choses  plus  ou  moins 
relatives  à  U  cause,  ont  été  dites  devant  vous  ;  et  je  concoius  certai- 


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nement  dans  la  remarque  faite  par  M.  Johnson,  que  malgré  le» 
nombreux  témoignages  qni  ont  été  entendus,  les  faits  sont  peu  nom- 
breux. Messieurs,  vous  avez  été  enfermés,  depuis  8  jours,  dans 
c€|lte  cour,  mais  ce  sera  pour  vous  une  consolation  de  penser  qu'il 
est  impossible  de  rendre  à  la  société  un  plus  grand  service  que  de 
s'enquérir  dé  tous  les  foits  qui  se  rattachent  à  une  accusation  d'ho- 
micide. 

Vous  devez  considérer,  messieurs,  qu'en  votre  qualité  de  Jurés, 
vous  avez  un  devoir  à  remplir  à  l'égard  de  lasociété  et  que  vous 
servez  à  la  protectidn  de  ses  membres  aossi  bien  que  de  vous- 
mêitoes.  C'est  un  des  plus  grands  avantages  de  la  société  et  de  la 
Civilisation,  que  de  jouir  de  la  vie  et  de  la  {WTopriété  et  d'être  pro- 
tégé dans  l'exercice  de  ses  droits. 

Vous  êtes  ici  pour  décider  du  sort  d'un  être  humain  :  par  la  loi 
de  ce  pays,  le  plus  riche  comme  le  plus  pauvre  ont  également  le 
droit,  quand  la  vie  y  est  concernée,  aux  mêmes  égards  et  aux  mê- 
mes précautions,— *t  la  loi  ne  met  pas  de  différence  entre  le  jeune 
homme  qui  entre  à  peine  dans  la  vie  et  le  vieillard  à  cheveux  blancs 
qui Vachemine  vers  le  tombeau.  Nous  sommés  obligés  d'appliquer 
la  loi  telle  qu'elle  est:  nous  ne  pouvons  la  changer,  ni  l'altérer. 
Vous  devez  rendre  un  verdict  s*»lon  la  preave,  et  non  sut  aucune 
présomption  de  quelque  nature  «ju'elle  soit. 

La  loi  humaine  dit  que  l'hi  v.ro  qui  est  coupable  du  crime  d'ho- 
micide sera  mis  à  mort.  C\.r  n,  et  nous  devons  l'accepter. 
Ainsi,  aucune  considération  étraài^  'e  À  la  cause  ne  peut  entrer  dans 
l'ensenible  des  faits  qui  vous  sont  soumis,  pour  modifi  r  ou  changer 
votre  verdict.  Je  dois  seulewïent  dire  qu'il  est  temps  que  la  peine 
capitale,  infligée  par  ta  loi,  soit  appliquée  pour  la  protection  de  la 
société  ;  sinon,  nous  pouvons  nous  attendre  &  voir  commettre  des 
meurtres  fréquents,  avec  impunité.  Maintenant,  Messieurs,  je  vais 
vous  relater  les  faits  peu  nombreux  dont  vous  devez  vous  occuper, 
afin  que  vous  puissiez  le  faire  plus  aisément. 

Samedi,  2 avril  dernier,  Anselme  Charron,  riche  cultivateur  delà 
paroisse  de  St.  Charles,  quitte  sa  résidence  pour  venir  à  St.  Hya- 
cinthe. 

Son  neveu  le  vit  mettre  dans  sa  poche  de  veste  deux  rouleaux  de 
billets  de  Banque,  et  le  vit  partir  à  neuf  heures  du  matin  avec  son 
cheval  et  sa  voiture.  Il  est  vu,  pour  la  première  fois,  buvant  dans  une 
auberge.     Mais  avec  qui  1  c'était  avec  le  prisonnier.    Il  est  prouvé 
que,  le  même  jour,  le  défunt  quitta  l'aubci-ge  du  nommé  Ducharme 
et  se  rendit  à  l'hôtel  tenu  par  Guertin  f  et  la  on  trouve  le  prisonnier 
sur  un  sofa  près  du  défunt  et  tous  deux  engagés  dans  une  conversa- 
tion intime.    Un  homme  qui  lui  devait  $25,  le  vit  dans  cette  posi- 
tion.    Le  défunt  reçoit  cette   somme  et  jusqu'à  deux   heures  dans 
l'après-midi,  il  va  d'auberge  en  auberge,  reçoit  $45  d'un  nommé 
Ewing,   puis  il  arrêta  avec   une  de   ses  connaissances    un  ren- 
dez-vous à  l'auberge  de  Laflamme.  pour  conclure  un  achat  de  dix  ou 
douze  moulins  à  battre. — C'était  là  qu'il  allait  d'ordinaire  transiger 
ses  affaires.  A  7^  heures,  on  le  voit  prendre  le  thé  chez  Ewing.    Il 
part  de  là  dans  l'intention,  disait-il,  d'aller  acheter  une  terre  à  un 
mille  e*  demi  de  St.  Hyacinthe.  Cependant  à  8  heures,  il  est  vu  sor- 
tant d'une  auberge  en  compagnie  de  plusieurs  personnes  pour  aller 
chez  Guertiii  prendre  un  steak  et  des  huitres.    Le  prisonnier  est  là. 
Ildemande à- boire «t  chaque  foi*  1« iM|ttut-pai« lul-mèm**  L?^ctt» 


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irs,  dans 
afCT  qu'il 
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e  Jurés, 
lue  vous 
de  vous-    . 
et  de  la 
ètreprop    - 

par  la  loi 
tement  le 
aux  mê- 
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nx  blanc» 
appliquer 
l'altérer, 
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ime  d'ho- 
'accepter. 
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ateur  de  la 
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luier  est  là. 


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BXAÛREOARD. 


43 


se  savait  donc  que  Charron  avait  sur  lui  une  somme  d'argent.    Le 

firisonnieret  le  défunt,  tard  dans  la  soirée,  sont  vus  ensemble  dans 
'auberge  de  Laflamme  ;  s'il  n'est  pas  bien  établi  qu'ils  y  ont  bu,  il 
est  prouvé,  hors  de  tout  doute,  qu'ils  en  sont  sortis  ensemble.  Il  est 
aussi  prouvé  qu'ils  furent  rencontrés  par  deux  hommes  de  police. 
Ceux-ci  ont  vu  le  prisonnier  tenant  le  défunt  par  le  bras  ;  on  lui  de- 
mande où  il  va  i  il  repond  : — "-  Ne  soyez  pas  inquiets,  j'aurai  bien 
soin  de  Charron".  Les  hommes  de  police  stationnés  dans  la  rue  les 
virtfntalors  prendre  tous  deux  la  direction  du  pont  Biron.  La  maison 
du  prisonnier  est  située  à  l'extrémité  de  ce  pont  :  mais  le  pont  ne 
conduit  pas  le  défunt  vpjts  sa  demeure.  On  dit  qu'en  emmenant  le 
défunt  chez  lui  l'accusé  l'empêchait  de  passer  la  nuit  à  la  station  de 
police,  car  Charron  était  iv-».  Mais  le  défunt  a-t-il  profité  de  cet 
acte  de  bienveillance  1  Le  pant  n'était  pas  sur  son  chemin  et  s'il  eût 
été  laissé  à  lui-même,  ou  il  serait  retourné  chez  Laflamme  ou,  il  se- 
rait allé  où  il  avait  laissé  sa  voiture.  Mais  dans  tous  les  cas,  il  au- 
rait évité  le  pont. 

Un  quart  d'heure  après,  le  prisonnier,  chancelant,  haletant,  re- 
vient rapidement,  mais  Charron  n'est  plus  avec  lui  ;  et  comme  il  a 
été  prouvé,  le  prisonnier  n'aui  ait  pas  eu  le  temps  d'aller  jusque  chez 
lui  et  de  revenir  dans  Id  minutes.  Un  des  connétables  lui  demande 
ce  qu'il  avait  fait  de  Charron,  où  il  l'a  laissé.  Que  répond-t-iH— 
"  Il  est  très  bien  :  il  va  comme  un  chapeau  sur  l'eau.  J'en  ai  eu 
bien  soin."  Où  va  le  prisonnier,  après  cela  1  Chez  Laflamme.  Là  il 
demande  une  traite  et  la  paie,  lui  qui  auparavant  n'avait  pas  d'ar- 
gent. Il  reste  là  quelque  temps,  puis  il  se  rend  chez  PouUn  et  y  de- 
meure jusqu'à  ce  que  celui-ci  ferme  sa  porte.  Où  se  rendit  le  pri- 
sonnier, après  cela  ?  Rien  ne  l'indique. 

Maintenant,  je  dois  vous  faire  remarquer  qu'il  n'est  rien  de  plus 
incertain  dans  les  cours  de  justice  que  l'heure  du  crime.  La  montre 
trouvée  sur  le  corps  du  défunt  s'était  arrêtée  à  11  heures  moins  13 
minutes.  Il  n'a  pas  été  prouvé  que  c'était  là  l'heure  précise  de  l'ho- 
micide. Dans  ce  temps,  là  on  jouait  aux  cartes  chez  Marchessault. 
Des  cris  venant  du  pont  furent  entendus.  De  l'autre  côté  de  la  riviè- 
re, quelques  personnes  jouant  aussi  aux  cartes  entendirent  la  même 
chose.  Un  M.  Nagle  a  juré  qu'il  avait  entendu  des  cris,  au  meurtre. 
Il  se  lève  et  court  sur  le  pont  et  croit  y  voir  un  objet  se  mouvant, 
mais  il  n'était  pas  sûr.  Le  prisonnier  avoue  lui-même  avoir  été  sur 
le  pont  cette  nuit  là.  Le  lendemain,  il  demande  à  Guertin  si  ce  n'é- 
tait pas  lui  qu'il  avait  rencontré  sur  le  pont.  Ainsi  vous  avez  une 
preuve  distincte  de  la  présence  du  prisonnier  sur  lo  théâtre  du  cri- 
me. Le  témoin  Âustin  passant  sur  le  pont  a  cru  reconnaître  l'accu- 
sé. Il  est  une  autre  circonstance  qui  le  prouve.  La  porte  de  la  mai- 
son du  coin  du  pont  est  enfoncée.  Le  lendemain,  Girard,  propriétai- 
re de  cette  maison,  voit  le  prisonnier  et  lui  dit  qu'il  était  surpris  de 
voir  que  quelqu'un  lui  en  voulait  assez  pour  enfoncer  sa  porte.  "  On  ! 
dit  le  prisonnier,  cela  n'a  pas  été  fait  exprès, — ce  sont  probable- 
ment quelques  hommes  ivres  qui  ont  fait  cela  en  passant."  Ces  faits 
se  réunissent  pour  démontrer  que,  la  dernière  Ibis/iu'il  a  été  vu,  le 
déflmt  était  ivre,  et  que  l'accu&é  s'était  constitué  son  gardien  ;  le  dé- 
funt a  (Usparu  cette  nuit  là.  Un  mois  après,  son  cadavre  est  trouvé 
portant  des  marques  évidentet^  d^  violence.  Neuf  jours  après  la  dis- 
parition de  Charron,  un  de  ses  amis  vient  à  St.  Hyacinthe  et  appre- 
u«pt  que  Seaufegftid  a«cQi|ipft^ùt  le  défunt,  U.  deriuèr«  fois  qu'il 


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44 


PROCÈS 


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fut  vu,  il  le  fait  venir  et  lu»,  demande  ce  qu'il  est  devenu.  "  Je  ne 
m'en  souviens  pas,"  répcii«iit-iL  L'autre  ajoute  :  "  Un  des  hommes 
de  police  vous  a  vu  avec  Charron  ;  il  vous  a  vu  et  vous  lui  avez  ré- 
pondu." Et  l'ami  du  défunt  fait  venir  cette  homme  de  police  qui  lui 
assure  avoir  vu  le  prisonnier  avec  Charron.  L'ami  se  tourne  alors 
vers  l'accusé  et  lui  demande  ce  qu'il  a  fait  de  Charron,  et  Beaure- 
gard  répond  :  "  J'ai  oublié."  Messieurs,  le  prisonnier  refuse  de 
dire  ce  qu-'il  sait  sur  le  défunt.  Il  dit  :  que  la  poursuite  le  cherche  : 
je  ne  veux  donner  aucune  explication.  Il  est  très  naturel  que  les  as- 
sassins de  nos  jours  suivent  l'exemple  de  Caïn,  le  premier  meurtrier. 
Quand  on  demanda  à  Caïn  ce  qu'il  avait  fait  d'Abel,il  répondit: 
"  Je  ne  suis  pas  le  gardien  de  mon  frère."  Mais  le  prisonnier  lui, 
ne  peut  pas  dire:  ''Je  ne  suis  pas  le  gardien  de  mon  frère,"  car  il  a 
reconnu  avoir  pris  cette  qualité.  Cela  est  prouvé.  Il  a  pris  le  dé- 
funt sous  sa  protection.  Il  l'a  pris  dans  une  maison  qui  aurait  pu 
être  un  asile.  Il  dit  au  gardien  de  la  paix  que  le  défunt  serait  bien 
chez  lui.  Il  ne  l'a  pas  emmené  chez  lui  ;  où  l'a-t-il  mis  1  II  garde  le 
silence  sur  ce  point.  Il  maintient  qu'il  n'est  pas  obligé  de  répondre. 
Mais,  malheureusement  pour  lui,  il  verra  qu'il  doit  parler  et  rendre 
compte  de  la  conduite  qu'il  a  tenue  vis-à-vis  du  défunt.  Quand  il 
garde  un  silence  absolu,  il  élève  contre  lui  une  présomption  de  cul- 
pabilité. 

Maintenant,  messieurs,  quels  étaient  les  motifs  c^ui  poussaient  le 
prisonnier  à  amener  le  défunt  chez  lui  1  Les  voici  : — Le  vendredi 
précédent,  il  y  eut  une  assemblée  du  Conseil  de  ville  de  St.  Hyacin- 
the, pour  accepter  ou  rejeter  les  requêtes  pour  obtention  de  licences 
d'auberges.  Celle  du  prisonnier  fut  rejetée.  Il  disait  que,  s'il  pou- 
vait avoir  de  l'argent,  il  aurait  une  licence.  Le  lundi  suivant,  il  dit 
qu'il  avait  assez  d'argent  pour  en  obtenir  une.  Il  était  donc  plus  in- 
téressé qu'aucune  autre  personne,  à  obtenir  une  somme  d'argent. 
Son  existence  et  celle  de  sa  famille  en  dépendaient.  Il  est  mainte- 
nant démontré  que  le  prisonnier  avait  un  motif  pour  faire  disparaî- 
tre le  défunt. 

Dans  une  autre  occasion,  vous  avez  vu  aussi  son  anxiété  à  cet 
égard.  Un  des  témoins  lui  dit  qu'il  avait  vendu  une  terre  et  que  le 
prix  lui  avait  été  payé.  Le  prisonnier  lui  dit  : — "  Père,  vous  de- 
vez prendre  garde  d'aller  dehors  la  nuit,  cai-  vous  pourriez  être  tué 
et  volé.  Quant  à  moi,  je  ne  sais  pas  ce  que  je  pourrais  faire  pour 
avoir  de  l'argent,"  Telles  sont  les  expressions  elles-mêmes  du  pri- 
sonnier. Loin  de  moi  la  pensée  d'y  attacher  une  trop  grande  impor- 
tance, mais  elles  font  voir  la  détermination  dn  prisonnier  d'obtenir 
de  l'argent  par  un  moyen  ou  par  un  autre.  Maintenant,  messieurs, 
venons-en  à  un  autre  point.  Il  a  été  prouvé  que  le  prisonnier  portait 
d'ordinaire  une  arme  nommée  garcette.  Cet  instrument  est  décrit 
comme  étant  tait  de  cordes  et  assez  pesant  pour  porter  un  terrible 
coup.  Le  prisonnier  a  été  vu,  à  plusieurs  reprises,  avec  cette  arme. 
Le  corps  du  défunt  a  été  trouvé  à  15  ou  18  arpents  du  pont.  Mais 
malgré  l'espace  considérable  de  temps  écoulé  depuis  la  disparition 
de  Charron,  le  cadavre  était,  par  la  volonté  de  la  Providence,  dans 
un  état  de  conservation  étonnant.  Le  témoignage  rnanime  des  mé- 
decins a  prouvé  que  la  mort  du  défaut  avait  été  causée  par  une  com- 
motion du  cerveau  produite  par  des  coups  assénés  sur  la  tête  par 
un  instrument  arrondi  et  obtus.  etjB;  crois  qu'il  est  impossible  d'en 
venir  à  un«  autre  conclusion.   Maintenant  laessieurs,  il  est  une  au- 


i 


nu.  "  Je  ne 
lies  hommes 
Lui  avez  ré- 
olice  qui  lui 
tourne  alors 

et  Beaure- 
er  refuse  de 
le  cherche  : 
il  que  les  as- 
r  meurtrier, 
répondit  : 
isonnier  lui, 
ire,"  car  il  a 
a  pris  le  dé- 
Lii  aurait  pu 

serait  bien 
1  II  garde  le 
de  répondre. 
1er  et  rendre 
Quand  il 
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•Le  vendredi 
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1  est  une  au- 


BEAUJEIEGARD. 


45î 


ire  circonstance.  Le  samedi,  le  prisonnier  va  d'auberge  en  auberge 
sans  pouvoir  payer  pour  de  la  loisson  :  cependant,  le  lundi  suivant, 
il  entre  dans  un  auberge  et  paie  7  verres.  On  n'a  trouvé  sur  le  corps 
du  défunt  que  la  somme  de  $24  et  5J  deniers.  Combien  le  défunt 
avait-il  reçu  d'argent,  ce  jour-là,  sans  compter  la  somme  qu'il  avait 
apportée  de  chez  lui  î  Les  témoins  établissent  la  différence.  Parmi 
les  billets  de  banque  que  Ewing  donna  à  Charron,  il  s'en  trouvait 
deux  d'une  banque  américaine  ;  ces  billets  ont  dispîtfu  complète- 
ment. 

Mais  voici  le  témoignage  de  Lusignan.  Je  dois  dire  qu'il  est  im- 
possible de  baser  un  jugement  sur  un  tel  témoignage,  à  moins  qu'il 
n'y  ait  de  fortes  circonstances  qui  le  corroborent.  Il  est  prouvé  que 
Lusignan  est  un  ivrogne.  Un  certain  nombre  de  témoins  ont  été 
examinés  pour  prouver  qu'ils  ne  le  croiraient  pas  sous  serment  ; — 
mais  je  suis  tenu  de  dire  qu'un  témoin  tel  que  M.  Dessaulles  doit 
aussi  compter  pour  quelque  chose.  Cependant,  messieurs,  la  crédi- 
bilité de  Lusignan  est  laissée  à  votre  propre  jugement.  Lusi- 
gnan assure  que  le  prisonnier  à  la  barre  lui  a  dit  qu'il  avait  ces  deux 
billets  de  banque  en  sa  possession  et  que,  pour  certaines  raisons,  il 
les  avait  brûlés.  Il  dit  aussi  que  l'accusé  lui  a  montré  une  montre 
d'argent  qu'il  disait  appartenir  à  Charron.  Cela  peut  être  ou  ne  pas 
être  vrai. 

C'est  à  vous  qu'il  incombe  de  décider  cela  ;  et  vous  devez  exer- 
cer votre  jugement  sur  les  circonstances  relatées  par  cet  homme. 
Votre  tâche  n'est  pas  au-delà  du  pouvoir  d'un  homme  ordinaire  ; 
vous  n'êtes  pas  appelés  pour  accomplir  une  impossibilité.  L'obli- 
gation que  vous  devez  remplir  est  à  la  hauteur  de  votre  devoir.  Ne 
vous  embarassez  pas  des  incidents  extrinsèques,  tels  que  le  sort  du 
prisonnier,  et  les  souffrances  auxquelles  votre  verdict  peut  vouer  sa 
famille.  De  telles  considérations  ne  doivent  entrer  pour  rien  dans 
votre  décision.  Vous  êtes  juges,  et  vous  ne  devez  vous  guider  que 
sur  les  faits  eux-mêmes.  Vous  avez  aucun  compromis  à  faire  ; 
aucune  indulgence  à  exercer  ;  aucune  faveur  à  accorder  ;  aucune 
autre  chose  à  faire,  si  ce  n'est  votre  devoir.  Vous  devez  protéger 
la  société,  vous  avez  aussi  un  devoir  à  remplir  vis-à-vis  du  défunt. 
S'il  est  vrai  que  cet  homme  avait  devant  lui  la  perspective  d'une 
longue  vie,  et  la  jouissance  d'une  santé  parfaite,  même  après  avoir 
passé  son  temps  dans  la  débauche  et  l'ivrognerie  ;  s'il  est  vrai  que 
cet  homme,  sans  avoir  dans  son  esprit  une  pensée  sérieuse,  a  été 
traîné  sur  le  pont  et  là  assassiné,  la  conduite  que  vous  devez  tenir 
est  évidente.  Si  cet  homme,  sur  le  point  de  quitter  cette  vie  pour 
l'éternité,  n'a  pu  adresser  au  ciel  une  prière,  s'il  ne  lui  a  été  laissé 
que  la  force  machinale  de  crier  "  à  l'aide  "  et  "  au  meurtre,  "  une 
terrible  injustice, — la  plus  grande  dont  on  puisse  se  rendre  coupable, 
a  été  commis  contre  lui.  Priver  cet  homme  de  la  réflexion  et  du 
temps  nécessaire  au  repentir,  le  précipiter  dans  un  état  d'ivresse  et 
d'insensibilité  profonde,  en  présence  de  son  créateur,  c'est  agir 
à  son  égard  avec  la  plus  grande  barbarie.  Les  conséquences  ne 
doivent  pas  être  perdues  de  vue  ;  quant  à  la  décision  finale,  vous 
n'avez  rien  à  y  voir.  Faites  votre  devoir  et  rendez  un  verdict  con- 
forme à  la  preuve.  Si  vous  pensez  que  le  prisonnier  a  causé  la 
mort  du  défunt,  suivez  la  dictée  de  votre  conscience.  Mais  si  vous 
êtes  convaincus  qu'il  n'existe  pas  de  preuves  suffisantes  contre  l'ac- 
cusé, donnez  lui  le  bénéfice  du  doute.    Vous  êtçs  un  jury  qui  ne 


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I 

1 


I 


46 


PROCÈS 


peut  être  supposé  avoir  des  préjugés  dans  cette  cause.  Vous  êtes 
appelés  des  parties  différentes  du  district.  Vous  avez  maintenant 
tous  les  faits  devant  vous,  et,  sans  doute,  vous  agirez  suivant  votre 
conscience  et  votre  jugement. 


Samedi,  15  octobre. 

Présidence  de  Son  Honneur  M.  le  Juge  âtlwin. 

L*Hon.  Juge  Âylwin  continue  à  donner  en  français  la  lecture  des 
témoignages  rendus  en  cette  affaire.  Il  en  fait  ensuite  la  lecture  en 
anglais.  Â  deux  heures  et  demie,  le  jury  se  retire  dans  la  chambre 
des  délibérations,  puis  revient  en  Cour  après  dix  minutes.  Interpellé 
par  le  Greffier  de  la  Couronne,  à  savoirj  s'il  déclare  le  prisonnier 
coupable  ou  non  coupable  du  crime  dont  il  est  accusé,  il  répond  : 
"  COUPABLE." 

M.  Drummond  demande  si  la  Cour  vouditi  suspendre  la  sentence 
jusqu'à  lundi,  afin  de  donner  aux  avocats  du  prisonnier,  le  temps  de 
voir  s'il  ne  serait  pas  possible  d'invoquer,  en  faveur  de  leur  client, 
quelques  uns  des  moyens  auxquels  on  peut  quelquefois  avoir  recours 
en  pareil  cas. 

La  Cour  répond  qu'elle  ne  peut  se  rendre  au  désir  de  cette  appli- 
cation., attendu  qu'aucune  objection  rîlative  à  ces  moyens  n'a  été 
faite  durant  le  procès. 

Le  Greffier  de  la  couronne  demande  au  prisonnier  s'il  n'a  pas 
quelque  chose  à  dire,  pour  que  la  sentence  de  mort  ne  soit  pas  pro- 
noncée. 

Le  prisonnier  s'agenouille  alors,  mains  jointes,  comme  au  temps 
où  l'on  invoquait  le  Bénéfice  du  Clergé,  mais  ne  dit  rien. 

L'hon.  Juge  Âylwin,  s'adressant  au  prisonnier,  dit  : 

Jean  Bte.  Beauregard  : — Le  2  avril  dernier,  vous  vous  êtes 
chargé  d'avoir  soin  d'un  homme,  d'un  de  vos  semblables.  La 
justice  vous  a  demandé  ce  que  vous  aviez  fait  de  cet  homme  et 
vous  n'avez  pas  répondu.  Ce  fait  limite  contre  vous.  Dans  ce 
moment  même,  vous  n'avez  rien  à  dire  contre  le  verdict  qui  vient 
d'être  rendu.  Il  a  été  prouvé  que  le  défunt  est  mort  par  votre 
main,  quand  cet  infortuné  vous  avait  donné  sa  confiance,  sur  une 
promesse  de  votre  part  que  vous  en  auriez  bien  soin,  que  vous 
veilleriez  sur  lui.  Le  verdict  rendu  par  le  Jury  est  tel  que  je 
l'eusse  rendu  moi-même.  Quoiqu'il  n'y  ait  pas  à  douter  que  la  loi 
aura  son  cours,  il  n'est  pas  moins  vrai  que  vo.us  possédez  des 
avantages  que  vous  n'avez  point  voulu  accorder  au  défunt. 
Vous  avez«  au  moins,  le  temps  de  vous  repentir,  ce  qui  lui  a  été 
refusé.  Bientôt,  vous  entrerez  dans  un  autre  monde,  vous  aurez 
à  comparaître  devant  un  autre  tribunal,  mais  vous  pourrez  vous 
y  préparer,  ce  que  n'a  pu  faire  le  défunt.  Vous  l'avez  plongé 
dans  l'éternité,  coupable  de  péchés  dont  il  ne  pouvait,  dans  le 
moment,  se  repentir.  Il  est  à  espérer  que  vous  emploierez  le  temps 
qui  vous  reste  à  vivre,  à  réflécliir  sur  sa  position  et  sur  la  vôtre  ; 
il  vouB  eo  est  accordé  suffisamment  pour  réparer  toutes  vos 


Vous  êtes 
maintenant 
livant  votre 


5  octobre. 

YLWIN. 

a  lecture  des 
a  lecture  en 

la  channbre 
;s.  Interpellé 
le  prisonnier 

il  répond: 

la  sentence 
,1e  temps  de 

leur  client, 
ivoir  recours 

cette  appli- 
feus  n'a  été 

r  s'il  n'a  pas 
loit  pas  pro* 

ne  au  temps 
m. 


is  vous  êtes 
)lables.  La 
)i  homme  et 
8.  Dans  ce 
ict  qui  vient 
rt  par  votre 
nce,  sur  une 
in,  que  vous 
t  tel  que  je 
Br  que  la  loi 
)8sèdez  des 
au  défunt, 
lui  lui  a  été 
,  vous  aurez 
ourrez  vous 
vez  plongé 
t'ait,  dans  le 
rez  le  temps 
ar  la  vôtre  ; 
toutes  vos 


fautes.  Vous  avez  vécu  comme  vivent  un  grand  nombrç  de 
gens  dans  le  Bas-Canadit;  mais  dans  le  cas  actuel,  les  con- 
séquences funestes  de  votre  conduite  doivent  être  attribuées  à 
votre  propre  inclination.  Songez  sérieusement,  en  ce  moment, 
qu'une  prière  adressée  au  Juge  de  toutes  choses  vaut  bien  mieux 
que  toute  autre  considération.  La  religion  h  laquelle  vous  ap- 
partenez, est  prête  à  vous  donner  tous  les  secours  désirables  ;  et, 
en  ceci,  vous  avez  encore  un  autre  avantage  sur  le  défunt.  Pro- 
fitez ,  cette  fois  ci,  au  moins,  des  consolations  que  procure  cette 
religion  ;  vous  avez  grandement  besoin  de  son  ministère.  Le 
jury  qui  vous  a  condamné  et  le  juge  qui  va  prononcer  votre  sen- 
tence, vous  y  engagent  fortement.  Vous  devez  sentir  vous  mê- 
ôae  combien  vous  avez  besoin  de  vous  préparer.  Maintenant,  il 
ne  reste  plus  à  la  Ooar  qu'à  prononcer  la  sentence  de  mort, .  Le 
jugement  de  la  cour  est  que,  pour  le  meurtre  dont  vous  avez  été 
trouvé  coupable,  vous  soyez  transporté  de  la  place  où  vous  êtes 
maintenant,  à  la  prison  commune;  que  Vendredi,  le  16  Décem- 
bre prochain,  sur  la  place  des  exécutions,  vous  soyez  PENDU"  par 
le  col  jusqu'à  ce  que  la  mort  s'en  suive.  Que  Dieu  ait  pitié  de 
votre  âme. 

Un  silence  solennel  a  régné  dans  la  salle,  pendant  que  cette 
sentence  a  é*é  prononcée.  De  temps  en  temps,  le  prisonnier  sem- 
blait faire  de  puissants  efforts  sur  lui-même.  Sesmains  jointes 
«'appuyaient  sur  le  rebord  du  la  boîte.  Ses  yeux  furent  constam- 
ment fixés  sur  le  Juge.  Ses  lèvres  étaient  comprimées. — ^Jusq^'à  la 
fin,  cependant  il  fut  maître  de  sou  émotion. 


MONTKEAL,  le  13  Décembre  1859. 

Voici  le  texte  même  de  l'annonce  qui  a  été  faite  dans 
les  Eglises  catholiques  de  Montréal  dimanche  dernier, 
au  prône  de  toutes  les  messes  solennelles.  On  verra 
en  la  parcourant  avec  quelle  tendre  sollicitude  l'Eglise 
prend  soin  du  pauvre  malheureux,  combien  elle  s'atta- 
che à  sauver  l'âme  qui  ne  recevra  son  jugement  que  de 
la  bouche  même  de  Dieu,  après  que  la  justice  humaine 
aura  passé  sur  son  corps  ;  aussi,  de  quels  bons  sentimens 
elle  s'efforce  de  pénétrer  le  pays  tout  entier  à  la  vue 
d'un  spectacle  aussi  terrible. 

Nous  recommandons  en  même  temps  la  quête  qui 
sera  faite  avant  l'exécution  par  les  bonnes  Sœurs  ;  le 
produit  est  destiné  an  soulagement  de  la  famille  que 
Beauregard  laisse  dans  la  misère.  C'est  une  beUe  oc- 
casion pour  les  catholiques  de  montrer  leur  charité. 

6 


^^,\ijii-- 


i»  «'■*«•  V     * 


mmmm^m 


11 


"  On  recommande  i  vos  ferventes  prières  Jean-Bap 
liste  Beauregard  qui  sera  exécuté,  vendredi  prochain, 
16  du  courant,  à  10  heures  du  matin.  Nous  demande- 
rons pour  cet  infortuné  frère  la  grâce  de  se  préparer  à 
la  mort,  en  vrai  pénitent,  et  pour  tout  le  pays  la  grâce 
de  bien  profiter  de  ce  terrible  exemple. 

"  Le  St.  Sacrement  sera  exposé,  C3  jour  là,  dans  la 
ch» pelle  de  la  Providence,  depuis  la  première  messe 
qui  se  dit  à  six  heures  jusqu^après  la  dernière^  qui  se 
dira  au  moment  de  l'exécution,  savoir,  vers  les  dix 
hennis.  Ceux  qui  n'assisteront  pas  à  l'exécutien,  seront 
avertis  de  prier  avec  instance,  pour  cet  infortuné,  par 
une  des  cloclies  de  la  cathédrale  qui  sonnera  à  neuf 
heures.  Ils  se  souviendront  que  cette  heure  suprême 
est  terrible  ;  et  qu'il  leur  faut  en  conséquence  doubler 
leur  supplications,  auprès  du  Père  des  miséricordes,  en 
faveur  d*un  frère  mu Iheureux,  qui  sera  alors  sur  le  point 
d'être  lancé  dans  ^éternité. 

"  Ceux  qui  se  trouveront  à  l'exécution  en  feront  au- 
tant ;  et  ils  montreront  pir  leur  contenance,  vraiment 
chrétienne,  qu'ils  sont  profondément  afflierés  de  ce  grand 
châtiment,  infligé  à  un  de  leurs  semblables.  Ils  ne 
manqueront  pas  de  recommander  ainsi  son  âme  à  Dieu, 
avant  comme  après  l'exécution,  en  faisant  dévotement 
les  prières  qui  leur  seront  suggérées. 

**  Nous  recommandons  à  tous  les  parents  de  faire  à 
leurs  enfants  d'utiles  leçons  sur  cette  terrible  exécution, 
pour  linir  inspirer  de  bonne  heure,  une  vive  horreur  des 
crimes  qui  mènent  à  l'échafaud.  Use  fera  sur  le  lieu 
même  de  l'exécution,  par  les  Sœurs  de  Charité,  une 
quête  dont  le  produit  sera  appliqué  au  soulagement  de 
l'kmG  de  cet  infortimé  et  au  soutien  de  sa  femme  et  de 
ses  enfants  qu'il  laisse  dans  la  pauvreté,  Sat^edi,  len- 
demain de  l'exécution,  il  sera  chanté  un  service,  pour 
le  repos  de  l'âme  du  défunt,  dans  l'Eglise  de  la  Provi- 
dence vers  les  huit  heures  du  matin." 


fi 


m-Bap- 
'ochain, 
mande- 
bparer  à 

ia  grâce 

dans  la 
i  messe 

qui  se 
les  dix 
,  seront 
iné,  par 

à  neuf 
nprême 
doubler 
rdes,  en 
le  point 

ront  au- 
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Tls  ne 
à  Dieu, 
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)  faire  à 
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eur  des 
le  lieu 
ité,  une 
nenl  de 
le  et  de 
ïdi,  len- 
e,  pour 
t  Provi- 


!.■'■ 


LES  DEIIOTERS  MOMENTS 


DE 


-BTE.  BEAllllEIIAl 


AVEC 


Tous  les  incidents  qui  se  rapportent  à  son 

Exécution. 


<•>  • 


Vendredi,  16  décembre,  la  population  de  Montréal, 
pour  la  seconde  fois  depuis  longtemps,  put  assister  à  la 
représentation  gratis  d\va.  drame  bien  lug;ubre  :  Fappli- 
cation  de  la  peine  de  mort.  Ce  jour-là,  Jean  Baptiste 
Beanregard,  trouvé  coupable  du  meurtre  d'Anselme 
Charron,  aux  dernières  assises  de  la  Cour  du  Banc  de  la 
Reine,  montait  sur  l'échafaud^afin  de  venger  par  son  sup- 
plice la  société  qu'il  avait  outragée  dans  ses  lois  et  servir 
d'exemple  à  ceux  qui  seraient  tentés  de  l'imiter.  En 
vain  on  avait  tenté  d^arracher  ce  malheureux  à  la  mort 
en  envoyant  une  requête  au  digne  gouverneur  de  cette 
province  ;  ]a  justice  de  Son  Excellence  est  inflexible. 

Dès  neuf  heures  de  l'avant-midi,  c'est-à-dire,  une 
heure  avant  le  moment  fixé  pour  l'exécution,  on  voyait 
arriver  par  les  différentes  rues  qui  mènent  à  la  place  de 
la  prison,  un  grand  nombre  de  personnes  de  tout  âge, 
de  tout  sexe  et  de  toute  condition.  Bientôt  l'affluence 
devint  si  grande,  que  les  abords  de  la  prison  furent 
complètement  encombrés,  ainsi  que  les  fenêtres  et  les 
toits  des  maisons  voisines.  Chose  étrange  !  le  sexe  ré- 
puté faible  et  timide  formait  au  moins  la  moitié  de 
cette  foule  immense.  Ici;  c'étaient  des  mères  de  famille 


, 


H 


V^ 


îi 


hahiant  par  la  main  ou  portant  dans  leurs  bras  do  tout 
]>olits  enfants  ;  là,  des  jeunes  filles  qui  venaient,  parées 
comme  au  jour  de  fête,  flétrir  au  pied  d'nn  échafaud  la 
llenr  do  leurs  vingt  ans.  Fatale  curiosité  qui  étoulTe 
tout  sentiment  de  bienséance  ! 

La  potence  s'élevait  au-dessus  du  mur  qui  entoure  la 
cour  de  la  prison,  et  à  une  hauteur  suffisante  pour  que 
t  être  témoins  du  triste  événement  qui  allait 


tous  pussent 


S'y  passer.  Aussi,  tous  les  regards  étaient-ils  tournés  do 
co  côté  avec  une  anxiété  profonde  et  chaque  minute 
(|ui  s'écoulait,  arrachait  un  tressaillement  à  des  milliers 
(le  poitrines. 

A  dix  heures  précises,  on  alla  trouver  le  condamné 
dans  sa  cellule  pour  le  prévenir  que  son  heure  était 
venue.  Depuis  longtemps  préparé  à  ce  moment,  fatal, 
il  reçut  cette  nouvelle  avec  calme  et  suivit  le  geôlier 
dans  l'infirmerie.  C'était  là  que  devaient  se  faire  les 
derniers  préparatifs.  En  y  arrivant,  Beauregard  s'assit 
dans  une  chaise  qui  avait  été  placée  là  pour  lui.  Quoi- 
([u'il  conservât  une  attitude  ferme,  il  était  à  peine  re- 
oonnaissuble.  Il  n'avait  plus  cette  physionomie  dure  et 
farouche,  ses  yeux  ternes  et  louches,  cette  froideur  im- 
])assible,  qu'on  avait  remarqués  pendant'son  procès.  Uno 
<ioacc  sérénité  régnait  sur  sa  figure  pâle  et  amaigrie  par 
les  veilles  et  les  privations.  Le  Révérend  M.  Villeneu- 
ve, son  confesseur,  lui  ayant  demandé  s'il  était  préparé 
à  mourir,  il  répondit  que  oui. 

Le  digne  aumônier,  ainsi  que  M.  Resther,  lui  prodi- 
guèrent alors  toutes  sortes  de  consolations,  lui  montrant 
le  ciel  comme  terme  de  ses  maux,  3t  lui  faisant  em- 
brasser le  crucitix.  Ce  que  redoutait  le  malheureux 
condamné,  c'était  la  honte  qu'il  allait  ressentir  ;  il  de- 
manda qu'on  lui  bât  fortement  les  bras  de  peur  qu'il  no 
ré.^istât  ou  (|u'il  ne  se  débattît  dans  les  dernières  convul- 
tiionw.     On  lui  répondit  qu'il  serait  fait  selon  ses  désirs. 

Le  bourreau,  ce  monstre  qui  n'a  d'humain  que  l'appa- 
rence, fut  alors  introduit  dans  l'appartement.  C'était  un 
liomme  d'environ  six  pieds,  paraissant  être  d'une  très 
forte  constitution.  Il  était  complètement  enveloppé  dans 
une  espèce  de  robe  noire,  et  un  masque  de  mêiue  cou- 
leur voilait  sa  figure.  Ce  funèbre  accoutrement  lui  don- 
nait un  aspect  hideux  et  féroce  très  propre  à  augmenter 
encore  l'horreur  que  ne  peut  ma\iquer  d'inspirer  la  vue 
d'un  bourreau. 


rciiclant  qu'il  remplissait  son  ignoble  oflicc,  avec  utii' 
adresse  et  une  de-  érilù  qni  dénotait  do  rex[)érience, 
les  ministres  dn  .;^nenr  eontinuaient  leur  œuvre  do 
dévouement  îuiprès  du  malheureux  condamné  qui,  ))en- 
dant  qu'on  l'altaelmit,  était  doux  comme  un  erd'ant. 
<' Mon  fils,  luiditle  Révérend  IM.  Villeneuve,  )ap])e- 
îez-vous  que  voire  Sauveur  a  soulTert  la  morleominc 
vous  dans  quel(]uos  moments;  mais  il  était  innocent  et 
vous  êtes  coupable.  Pour  mériter  la  couronne,il  fiiutquc 
vous  portiez  la  croix."  M.  T.lestlier  commença  alors  la 
récitation  des  Litanies  des  Saints  et  de  queliiues  orai- 
sons d^isage.  Beauregard  répondait  à  toutes  ces  prières 
avsc  ferveur,  portant  souvent  à  ses  lèvres  le  crucifix 
qu'on  lui  présentait.  Ces  derniers  devoirs  religieux  rem- 
plis, le  condamné  déclara  qu'il  était  suffisamment  atta- 
ché, que  les  liens  étaient  assez  serrés.  Le  bourreau  lui 
passa  la  corde  autour  du  cou,  lui  couvrit  la  tète  d'un 
capuchon  noir  et  le  lugubre  cortège  se  mit  en  marche 
j[X)ur  se  rendre  à  réchafaud. 

En  tête,  venait  le  geôlier,  puis  l'infortuné  Beauregard 
ayant  à  ses  côtés  les  deux  vénérables  prêtres  qui  réci- 
taient à  voix  basse  le  Miserere, 

Immédiatement  derrière  le  condamné,  s'avançait  le 
bourrea^^  tenant  entre  ses  mains  le  bout  de  la  corde  fa- 
tale. 
Le  k^»»*.rif  Boston  suivait  à  quelques  pas  de  distance. 
Douze  à  quinze  sœurs  de  charité,  rangées  deu:i  par 
deux  et  disant  des  prières,  fermaient  la  marche. 

Plongé  depuis  longtemps  dans  un  obscur  cachot,  le 
malheureux  condamné  parut  éprouver  un  moment  de 
})laisir  en  se  voyant  tout-à-coup  exposé  à  la  lumière  du 
jour  et  en  respirant  l'air  vif  et  pur.  Cependant,  lorsqu'il 
eut  fait  quelques  pas,  son  regard  s^étant  porté  sur  la  po- 
tence, il  revint  au  sentiment  de  la  triste  réalité  ;  sa  phy- 
sionomie devint  plus  sombre  et  sa  démarche  moins  fer- 
me. Mais  cette  faiblesse  fut  de  courte  durée.  En  quel- 
ques instants,  à  la.  voix  du  prêlre  qui  répétait,  *'  cou- 
rage, mon  ami,  courage,"  il  put  maîtriser  son  émotion 
et  reprendre  le  calme  qu'il  avait  si  bien  conservé,  sur- 
tout pendant  les  derniers  jours  de  sa  captivité.  Tl  regar- 
da ceux  qui  étaient  groupés  sur  son  passage  et  salua 
plusieurs  personnes.  Arrivé  au  pied  de  l'échafaud,  il 
secoua  la  neige  qui  se  trouvait  collée  à  ses  chaussures. 


.jwm 


mi 


et  monta  d'un  pas  ferme  et  l'esté,  sans  fléchir  et  sans 
s'arrêter  un  seul  instant,  les  deux  eycalie^s  qui  menaient 
à  la  potence. 

Le  moment  le  plus  terrible  d'une  exécution  est  peut- 
être  celui  où  le  condamné  arri\c  sur  l'échafaud.  Il  faut 
y  avoir  assisté  pour  comprendre  ies  fortes  sensations  et  le 
profond  serrement  de  cœur  que  Ton  éprouve  en  voyant 
paraître  ce  malheureux  qui,  dans  un  instar/t,  en  votre 
prése;nce,  par  un  décret  de  ses  semblables,  doit  être 
privé  de  celte  existence  que  Dieu  lui  a  donnée  ot  qui 
lui  est  chère  comme  à  vous.  En  ce  moment,  vous  ou- 
bliez le  crime  qui  a  causé  le  châtiment,  quelle  que  soit 
l'énormité  de  ce  crime.  Il  n'y  a  place  dans  votre  cœur 
que  pour  un  seul  sentiment:  la  pitié.  Tel  est  Ffefièb 
que  produisit  la  vue  du  malheureux  Beauregard  sur 
l'immense  multitude  desspectat^.iS.  Il  se  fit  un  si- 
lence terrible,  plus  terrible,  peut-êtie,  que  la  scène  qui 
allait  se  passer. 

Le  premier  soin  du  bourreau  fut  d'attacher  la  corde 
au  crochet.  Le  condamné  demaada  alors  qu'on  lui 
tournât  la  figure  du  côté  du  fleuve,  afin  de  jeter  un 
dernier  regard  vers  St.-Hyacinthe. 

Le  Révérend  M.  Villeneuve  lui  dit  :  '^  Il  ne  faut  pas 
y  songer,  mon  enfint."  Beauregard  n'insista  pas  et  res- 
ta la  face  tournée  du  côté  de  la  prison.  Tout  près  de 
lui  se  tenait  M.  Resther,  lui  prodiguant  les  dernières 
consolations  et  lui  présentant  le  crucifix  à  plusieurs  re- 
prises. L'*infortuné  y  portait  ses  lèvres  avec  amour  et 
semblait  puiser  dans  ces  baisers  une  énergie  nouvelle. 
Aussi  ne  le  vit-on,  ni  fléchir,  ni  trembler,  pendant  les 
moments  d'horribles  angoisses  qui  précédèrent  sa  mort. 

Mo»\dieur  l'aumônier  adressa  à  la  foule  quelques  paro- 
les pleines  d'à-propos  et  qui  eurent  un  salutaire  effet.  II 
parla  des  conséquences  du  péché  et  en  particulier  de 
l'ivrognerie.  Faisant  un  rapprochement  entre  la  cause 
du  funeste  drame  dont  on  allait  voir  bientôt  le  dénoû- 
ïï}f  V,  et  certains  édifices  situés  non  loin  de  là  et  d'où 
s'  '  nappait  a?  )rs  une  fumée  noire,  '*  la  distillerie,  dit-il, 
mène  au  crime,  le  crime  à  la  prison  et  la  prison  à  l'é- 
chafciud."  Il  demanda  ensuite  à  tous  ceux  qui  étaient 
présents  de  prier  pour  le  condamné  ;  puis,  il  ajouta  quo 
JJeauregard  mourait  en  vrai  pénitent,  parfaitement  ré- 
signé à  la  volonté  de  Dieu,  et  offrant  son  supplice  en 
çxpiation  des  péchés  ou'il  avait  commis  et  des  scanda- 


ît  sans 
liaient 

t  peut- 
Il  faut 
is  et  le 
voyant 
1  votre 
►it  être 

■A  qni 
ms  on- 
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B  cœur 

Ffefîèt 

ird   sur 

un  si- 

ène  qui 

a  corde 
'on  lui 
eter  un 

autpas 
}  et  res- 
près  de 
îrnièrcs 
eurs  re- 
mour  et 
DU  V  elle, 
ant  les 
la  mort. 
es  paro- 
effet.  II 
ulier  de 
a  cause 
dénoû- 
et  d'où 
e,  dit-il, 
m  à  l'é- 
étaient 
)uta  quo 
nent  re- 
pliée en 
scanda- 


les qu'il  avait  causés.  En  ce  moment,  lo  Dr.  Beaubieir, 
médecin  de  la  prison,  craignant  que  l'infortuné  ne  suc- 
combât à  une  ^rop  grande  émotion,  fit  prier  M,  l'aumô- 
nier d'abréger  ce  qu'il  avait  à  dire. 

"  Laissez 'le  parle?' ^  dit  Beaur égard,  ne  l'arrêtez  pas  ; 
je  puis  rester  ici  longtemps  ;  je  suis  fort."  Quelques  ins- 
tants après  il  ajov.ta:  "  Je  ine  recommande  aux  bonnes 
prières  de  tout  le  peuple  qui  est  ici,^^  Ce  furent  là  ses 
dernières  paroles.  A  peine  les  avait-il  achevées  que  ht 
trappe  s'ouvrit  avec  fracas  et  le  condamné  fut  lancé 
dans  l'éternité.  Un  murmure  sourd  et  comprimé  par- 
courut les  rangs  de  la  foule  saisie  d'horreur,  et,  à  un  si- 
giial  du  prêtre,  tous,  catholiques  et  protestants,  comme 
mus  par  un  ressor^,  tombèrent  à  genoux  afin  de  prier 
pour  le  malheureux  agonisant. 

Beauregard  parut  mourir  sans  beaucoup  d'efforts.  La 
chute  avait  été  d'environ  sept  pieds,  et  le  nœud  de  la 
corde  avait  été  placé  sur  le  derrière  de  la  tête,  de  façou 
à  produire  l'asphyxie.  Après  sept  minutes  et  un  quart, 
les  médecins  qui  étaient  sur  Péchafaud  constatèrent  que 
l'action  du  cœur  était  complètement  arrêtée.  La  face  du 
condamné  était  d'une  couleur  liv' Je  comme  celle  d'un 
noyé.  Ses  yeux  étaient  injectés  île  sang,  sa  langue  pro- 
jetée et  ses  lèvres  bordées  d'écume.  On  dit  qu'il  n'avait 
p^s voulu  qu'on  lui  couvrit  la  figure  avec  le  capuchon  noir. 

Aussitôt  après  avoir  ouvert  la  trappe,  le  bourreau 
accompagné  du  geôlier  qui  le  tenait  par  le  bras,  s'en  re- 
tourna à  la  prison  avec  beaucoup  de  précipitation,  com- 
me s'il  avait  craint  de  demeurer  un  seul  instant  en  pré- 
sence de  la  victimo  de  son  exécrable  ministère.  Un  do 
ceux  qui  se  trouvaient  au  pied  de  l'échafaud,  en  le 
voyant  passer,  iUt  saisi  d'une  telle  indignation,  qu'il  le- 
va le  poing  pour  le  frapper  ;  et  il  aurait  sans  doute  ac- 
compli son  dessein,  s'il  n'avait  pas  été  retenu  par  quel- 
ques amis. 

Le  cortège  funèbre  était  sorti  de  la  prison  à  dix  ^^pu- 
res  et  quart,  et,  à  dix  heures  et  viugt  cinq  minutt  'c 
bourreau  avait  tiré  la  trappe  fatale.  Le  corps  de  Beau- 
regard  resta  suspendu  à  la  potence  pendant  une  heure. 
Au  bout  de  ce  temps,  la  corde  fut  coupée,  le  cadavre 
transporté  dans  la  prison  et  la  foule  s'écoula  silencieu- 
sement, chacun  emportant  dans  son  cœur  un  souvenilF 
ineffaçable  dé  ce  triste  événement, 

1* 


l'i 


I 


\i 


Vers  deux  heures  de  Paprès-midi,  le  Dr.  Beaubien  fit 
l'ûutopsie  du  corps  qui  fut  ensuite  transporté  à  l'Asile  de 
la  Providence  où  se  trouvait  l'épouse  infortunée  du 
supplicié.  Le  lendemain,  dans  la  chapelle  de  cet 
Asile,  un  service  fut  chanté  pour  le  repos  de  l'âme  de 
Beauregard  ;  la  veille,  dans  la  même  chî.  pelle,  au  mo- 
ment de  l'exécution,  une  messe  basse  avait  été  dite  par 
Monseigneur  l'évêque  de  Montréal.  Ce  sont  aussi  les 
vénérables  ftt  dévouées  sœurs  de  cette  Asile  qui  firent, 
pendant  l'exécution,  la  quête  destinée  à  venir  en  aide 
à  la  pauvre  et  malheureuse  famille  du  condamné.  Il 
paraît  que  les  piodnits  de  cette  quête  ont  été  abondants. 
Dieu  soit  loué  !  cette  pauvre  famille  pourra  amsi,  au 
moins  pendant  quelque  temps,  être  exemptée  de  la  mi- 
sère. 

Lorsque  Beauregard  est  monté  sur  Téchafaud,  il  y 
avait  environ  neuf  semaine»  qu'il  était  enfermé  dans 
un  cachot  de  neuf  pieds  de  longueur  sur  quatre  de  lar- 
geur. Il  serait  impossible  de  peindre  tous  les  tourments 
qu'il  eut  à  endurer.  Aux  nombreuses  privations  de  la 
captivité,  il  faut  ajouter  les  remords  et  la  pensée,  la 
pensée  terrible  et  toujours  présente  à  sa  mémoire,  de  la 
mort  ignoihineuse  qu'il  allait  bientôt  subir. 

Le  déshonneur  qui  rejaillirait  sur  toute  sa  famille, 
était  aussi  pour  lui  un  grand  tourment.  Mais  sa  nature 
forte,  puissamment  aidée  par  les  sentiments  religieux 
qu'il  entretenait,  son  repentir  et  l'espérance  d'une  vie 
meilleure,  lui  firent  tout  supporte;  avec  calme  et  rési- 
gnation. "  Jamaisj  disait  le  vénérable  aumônier  de  la 

prison,  je   n'ai  vu  un  condamné  mieux   préparé   à 

mourir  que  Beauregard.'^  Il  avait,  cependant,  quel- 
ques moments  de  faiblesse  :  c'était  surtout  quand  il 
pensait  à  son  vieux  père  et  à  sa  vieille  mère,  au  profond 
chagrin  qu'ils  allaient  éprouver,  à  la  honte  dont  sa  mort 
devait  les  couvrir.  L'avenir  de  sa  femme  et  de  ses  en- 
fants le  préoccupait  aussi  beaucoup.  Il  apprit  avec 
bonheur  comme  on  s'intéressait  à  leur  sort,  et  les  moyens 
que  l'on  prenait  pour  leur  venir  en  aide.  Dans  le 
mois  de  Juillet  dernier,  pendant  qu'il  était  en  prison, 
sous  prévention  du  meurtre  dont  il  a  été  trouvé  coupa- 
ble^ son  épouse  mit  au  monde  un  fils  dont  il  est  question 
dans  le  testament  que  nous  reproduisons  plus  loin.  Il 
éprouvait  un  vif  désir  de  voir  cet  enfant;  mais  on  lui 


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au 


refusa  celte  consolation  ;  on  craijrnait  avec  raison  qtie 
la  vue  de  son  fils  n'eût  d'autre  effet  que  d';uigmenter 
ses  regrets  et  le  rattacher  à  la  vie.  Il  lui  fut  permis  de 
voir  les  autres  membres  de  sa  famille  ;  sa  femme  et  ses 
deux  filles  les  pins  âiiées  vinrent  souvent  le  visiter. 

Beauregard  avait  une  grande  confiance  en  la  miséri- 
corde de  Dieu.  Quelques  jours  avant  sa  mort,  M.  l'au- 
mônier lui  disait:  *'  Espérez-vous  que  Dieu  vous  don- 
nera son  Saint  Paradis  :"  Il  répondit  en  .souriî»nt  :  **  Il 
''  faut  bien  qu'il  me  le  donne  ;  //  doit  me  le  donner.''* 

C'était  un  homme  jovial,  quoique  sa  figure  parût  d'a- 
bord dure  et  repoussante.  11  aimait  beaucoup  à  i)laisanter. 
On  peut  s'en  convaincre  en  lisant  les  deux  traits  suivants. 

Les  Sœurs  allaient  souvent  le  visiler.  Un  jour, 
quelques-unes  d'entre  elles  ayant  passé  plus  d'une  heure 
à  lui  faire  des  exhortations  et  à  réciter  des  prières,  parlè- 
rent de  se  retirer.  '^^  Ahl  m- s  Sœurs,  comme  lous  êtes 
pressées,  leur  dit-il  ^  fumez  donc  encore  un  fcu  V 

Il  badinait  même  sur  les  faits  les  plus  tristes.  Chose 
atroce  et  digne  de  la  barbarie  de  Néron,  on  mit  plus  de 
quinze  jours  à  construire  l'échafaud.  Le  condamné  en- 
tendait le  bruit  des  TP.orceaux  de  bois  trainés  sur  le  gra- 
vier de  la  cour  de  la  prison,  et  chaque  coup  de  mai  tenu 
résonnait  jusque  dans  son  étroite  cellule.  Il  paraît  que  la 
veille  de  l'exécution  les  ouvriers  frappèrent  plus  fort  que 
les  jours  précédents.  Lorsque,  ce  jour  là,  Beau  regard  vit 
arriver  le  ilév.  M  Villene\(ve  ;  "  Mon  fère^  lui  dit-il  en 
riant,  ih  ont  cogné,  aujourd'hui  plu  s  fort  que  de  coutume^'' 

La  veille  de  sa  mort,  Beuregard  reçut  les  derniers  sn- 
crements  avec  beaucoup  de  ferveur.  Il  y  trouva  un  sur- 
croit de  force  et  de  courage  pour  attendre  l'épreuve  du 
lendemain.  Comme  il  le  dit  lui-même  dans  son  testa- 
ment, il  passa  sa  dernière  nuit  sur  la  terre  en  compa- 
gnie de  Monseigneur  Bourgct  évêque  de  Montréal.  Ce 
fut  en  présence  de  ce  saint  Evê(pie  et  du  curé  de  Saint 
Ilyacinthi^  qu^'il  fit  son  testament  écrit  de  la  main  mê- 
me du  Rév.  M.  Uestlier. 

C'est  à  tort  qu'on  a  prétendu  que  Bcaurepnrd  sY'tait 
reconiui  publiquement  coujiable  du  meurîre  d'Anselme 
Charron.  Sur  l'échafaud,  par  l'organe  du  Rév.  M.  Vil- 
leneuve, il  a  spul'îmcnt  déclaré  qu''/7  offrait  sa  mort  en 
expiation  de  ses  j)échés.  De  plus,  dans  son  Icstanenî^  com- 
me CD   le  verra,  il  pardonne  à  ceux  qui  lui  ont  fait  du 


m 


HOi 


5^. 


Ô 

mal,  et  en  parliculier  à  ceux  qui  pourraient  être  la  cause 
(ie  sa  mmt.  Ces  faits  ne  doivent  pas  être  sans  inspirer 
quelque  crainte  à  ceux  qui  ont  coopéré  à  la  condamna- 
tion du  malheureuiç  Beauregard.  Ils  prouvent  aussi 
combien  généralement  est  dangereuse  l'application  de 
la  peine  de  mort. 

Quelques  journaux  anglais  ont  insinué  que  le  monstre 
qui  a  servi  de  bourreau  était  un  canadien  français. 
Cet  avancé  est  tout-à-fait  sans  consistance.  Tout,  au 
contraire,  porte  à  croire  que  c^est  le  môme  nègre  qui  a 
rempli  cet  office  le  25  de  Juin  de  l'îin  dernier. 

Il  ne  nous  reste  plus  qu'à  reproduire  le  testament  de 
Beauregard  ;  mais  avant  de  le  faire,  nous  nous  permet- 
trons une  dernière   réflexion, 

Il  est  bien  consolant  de  voir  combien  la  religion  a- 
duucit  le  sort  des  malheureux  suppliciés.  Autrefois,  ils 
étaient,  pour  ainsi  dire,  im  objet  d'horreur  aux  yeux  de 
tous  ;  leurs  corps  n'étaient  pas  admis  dans  les  cimetières 
communs  aux  catholiques  ;  on  les  jetait  dans  un  endroit  \ 
part,  appelé,  à  cause  de  sa  ùesttination,  le  cimetière  des 
pendus,    L'Eglise  a  voulu  que  cet  usage  fut  aboli. 

£lle  accorde  aussi,  maintenant,  au  condamné,  do 
nombienx  secours  religieux  qu'il  ne  recevait  pas  aupa- 
ravaut  et  qui  ne  contribuent  pas  peu  à  lui  faire  parcou- 
rir  iwireusement  le  court  et  dangereux  chemin  qui  le 
conduit  à  l'éternité. 


COPIE  DU 


TESTAMENT  DE  J.-B.  BEAUREBARD. 

(PRISON   DE   MONTRÉAL, 
{  De  ma  cellule,  16  Dec.    1859. 

Je  remets  mon  âme  entre  les  mains  de  mon  Créateur, 
et  Rédempteur,  et  je  supplie  humblement  sa  divine  mi- 
séricorde de  vouloir  bien  me  pardonner  tous  mes  péchés. 

Je  supplie  l'Immaculée  Vierge.  Marie,  mère  de  mon 
Dieu,  de  vouloir  bien  être  mon  4-vocate  auprès  de  sou 
divin  Fils,  quand  je  paraîtrai  à  son  redoutable  tribunal. 

Je  prie  mon  Ange  Gardien,  mon  saint  Patron  St. 
J'^an- Baptiste  et  tous  les  Anges  et  Saints  du  Para- 
dis, de  m'assister  au  terrible  moment  où  je  monterai  sur 
la  potence. 


a 


9 

Je  demande  pardon  à  tous  ceux  que  j'ai  oifensés  on 
scandalisés  et  je  supplie  qui  de  droit  de  vouloir  me  re- 
mettre ce  que  je  pourrais  leur  devoir. 

Je  pardonne,  de  mon  côté,  de  bon  cœur,  tout  le  mal 
qu'on  m'a  fait,  et^  en  particulier,  à  ceux  qui  pourraient 
être  la  cause  de  ma  mort. 

Je  donne  mon  Crucifix  et  les  quatorze  Images  de 
mon  petit  Chemin  de  Croix  à  ma  bien  aimée  épouse 
Sophie  Delage. 

Mou  chapelet  à  mon  bon  et  infortuné  vieux  père,  à 
qui  je  demande  pardon  de  toutes  les  peines  que  je  lui 
ai  causées,  en  sollicitant  sa  dernière  bénédiction. 

Mes  petites  images  qui  m^ont  tant  consolé  et  fortifié, 
à  chacun  de  mes  chers  enfants^  et  à  ma  bonne  vieille 
mère,  mon  petit  Jésus  portant  sa  croix. 

Au  -pauvre  petit  que  je  rCai  pas  vu,  une  médaille  de 
l'Immaculée  Conception  qî^?  m'a  donnée  pour  lui  le 
Saint  Evoque  de  Montréal,  quia  passé  avec  moi  ma 
dernière  nuit  sur  la  terre. 

A  mon  cher  et  dévoué  frère  Pamase,  ainsi  qu'à  mes 
chères  sœur^i  et  belle-sœur,  les  images  marquées  à 
leurs  noms  respectifs. 

Je  meni:s  content  et  résigné  à  la  sainte  volonté  de 
Dieu,  le  remerciant  de  ses  infinies  miséricordes,  lui  de- 
mandant son  saint  Paradis,  et  en  priant  pour  tous  ceux 
qui  m^ont  fait  ou  désiré  me  faire  du  bien,  qui  prient 
pour  moi,  qui  m'assistent  à  la  mort  et  pour  tous  ceux 
que  je  laisse  dans  la  prison.  J'emporte  un  souvenir 
particulier  du  Capitaine  du  IT^a^J (guichetier)  qui  a  été 
si  bon  pour  moi. 

O  !  Marie,  !  la  porte  du  ciel,  je  vous  recommande  en 
mourant  de  vous  souvenir  du  haut  du  ciel,  du  geôlier  de 
la  prison,  de  sa  bonne  famille  et  d3  tous  les  employés 
qui  se  sont  tant  intéressés  à  moi  pendant  les  jours  de  ma 
captiyilé. 

Dieu  seul  sait  ce  que  je  dois  au  Rév.  et  bon  Mon- 
sieur Villeneuve,  mon  confesseur,  et  aux  bonnes  sœurs  de 
la  Providence  qui  ont  tant  adouci  les  angoisses  de  mes 
derniers  jours  sur  la  terre. 

Que  Dieu  le  leur  rende  au  centuple  dés  celte  vie 
et  dans  l'autre. 

(Signé,)    JEAN-BAPTISTE  BEAUREGAPvD. 


10 


COMPLAINTE 


DU 


CONDAINË  BEAVREGABO. 


Air  : — Pierre^  en  suivant  les  pas  du  Souverain  Monarque. 

h 

Encore  un  criminel  frappé  par  ta  justice  ! 
Seigneur,  ta  volonté  soit  faite  !  son  forfait, 
S'il  le  doit  expier  par  un  cruel  supplice, 
Pardonne  lui,  S-jigueur,  tout  le  mal  qu'il  a  fait  ! 

2. 

• 

ïl  est  là  !  son  cachot  nous  voile  sa  souffrance. 
Dieu  seul  peut  consoler  cet  homme  dans  sa  nuit  ; 
DiCU  seul  peut  lui  donner  cette  grande  espérance 
Qui  fait  qu'on  hait  le  monde  et  sa  joie,  et  son  bruit. 

a» 

On  dit  qu'il  se  repent,  à  son  heure  dernière, 
D'avoir,  pour  un  peu  d^or,  immolé  l'innocent  ; 
Qu^il  fléchit  les  genoux  et  que,  dans  sa  prière. 
On  l'entend  s'accuser  d'avoir  versé  son  sang. 

O  débauche  fatale  !  horrible  intempérance  ! 
Que  n^as-1u  de  bonne  heure  évité  leurs  excès, 
Beauregard,  aujourd'hui,  les  bras  de  la  potence 
Ne  réclameraient  pas  l'hôte  des  cabarets. 

Mais  Ix  religion,  cette  admirable  mère, 
Lorsc^ue  tout  t'abandonne,  accourt  sur  ton  chemin  j 
Plus  ton  angoisse  est  forte  et  ta  douleur  amère, 
Plus  sa  parole  est  douce  et  plus  douce  est  sa  main. 


Souf 
Sour 
Ces 


Ces 

A  se; 
J'ai 
M 


rt 


il 

6. 

Sous  la  forme  d'un  prêtre,  elle  vient  à  toute  heure, 
Sourire  au  condamné,  dans  son  obscur  cachot; 
C'est  un  de  ses  enfants,  c'est  une  âme  qui  pleure 
Qu'elle  veut  consoler  au  pied  de  l'échafaud. 

7. 

C'est  moi  qui  l'ai  tué,  dit-il  au  saint  ministre; 
A  ses  navrants  appels  à  ma  sourde  pitié 
J'ai  répondu  trois  fois,  et  d'une  voix  sinistre  : 
"  Meurs  et  rends  tes  écus  !"  je  le  frappai  du  pié. 

8. 

Sous  mes  coups  redoublés  bientôt  Charron  s'afFaiase^ 
Je  le  prends  à  la  gorge  et  saisis  ses  cheveux. 
IVlalgré  mes  doigts  crispés  dans  sa  chair,  sa  détresse 
Peut  s'exhaler  encore  en  longs  cris  douloureux. 

9. 

Sa  tête  s'inclinait  sur  sa  rauque  poitrine. 
Du  poids  de  tout  mon  corps  je  l'écrasai  soudain. 
Son  sang  jaillit  à  flots  des  yeux,  de  la  narine. . . . 
Lors,  j'ouïs  une  voix  qui  me  disait  :  '*  Gain  ! 

10. 

• 

''  Exécrable  Caïn,  qu'as-tu  fait  de  ton  frère  î 

"  Tu  l'avais  en  ta  garde  et  tu  l'as  immolé  !'' 

Et  la  voix  dans  mon  cœur  grondait  comme  un  tonnerre* 

L'épouvante  me  prit  ;  car  Diea  m'avait  parlé. 

11. 

Pourquoi  n'ai-je  pas  fui  ?     Ce  souvenir  me  navre  ! 
Charron  n'était  pas  mort  j  il  aurait  survécu  ! 
Lorsqu'aux  rapides  flots  je  lançai  son  cadavre, 
L'enfer  était  en  moi  ;  Dieu  me  semblait  vaincu  ! 

12. 

Comme  le  châtiment  toujours  suivit  le  crime. 

Des  passants  m'ayant  7U,  je  fus  incarcéré. 

Je  vais  mourir  !      Mon  Dieu,  tu  venges  ma  victime  \ 

Ta  volonté  soit  faite  et  ton  nom  adoré  ! 


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13. 


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BEAUHEGARD  AU  PEUPLE. 

Oh  !  ue  m'imitez  pas  :  j'ai  mené  folle  vie  ; 
De  ce  qu'on  respectait  je  n'ai  rien  respecté  ! 
Si  je  l'avais  voulu,  mor  sort  eût  fait  envie  ; 
Mais  le  vice  toujours  guida  ma  volonté. 

14. 

Mon  bras  était  robuste  et  mon  intelligence 
Pouvait,  par  le  travail,  me  donner  un  trésor. 
Le  travail  m'effrayait  ;  ma  sordide  indigence 
M'a  jeté  dans  le  crime  et  du  crime  à  la  mort. 

15. 

LES  ENFANS  DE  BEAÛREGARD  AU  PEUPLE. 

Peuple,  regarde-nous  ;  nous  sommes  sa  famille  : 
Nous  venons  à  genoux  implorer  ta  pitié. 
Tes  dédains  nous  tueraient,  moi,  son  fils,  moi,  sa  fille, 
Et  nous  avons  besoin  de  ta  douce  amitié  ! 

16. 

LE  PEUPLE  A  BEAUREGARD  ET  A  SES 

ENFANS. 

Celui  qui  va  mourir  sur  un  gibet  infâme 

A  plus  de  droits  qu'un  autre  à  notre  charité  ! 

Qu'ils  viennent  ses  enfans  !  qu'elle  vienne  sa  femme  ! 

De  tendresse  pour  eux  nos  cœurs  ont  palpité  ! 


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IMPRIMERIE  DE  LOUIS  PERRAULT,  &  CIE.. 


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